Si les protocoles concernant l'hygiène des mains sont fondamentaux en Ehpad, ils restent encore mal appliqués. Pour s'assurer de pratiques efficaces, les Ehpad peuvent se faire accompagner.
L'hygiène des mains : une pratique à encourager
Le 5 mai célèbre chaque année la Journée mondiale de l'hygiène des mains. Son objectif : assurer la promotion, la visibilité et la durabilité de l'hygiène des mains dans les soins de santé. Cette dernière fait partie du socle des pratiques de bases des professionnels soignants, car leurs mains constituent un vecteur important de transmission de micro-organismes. En Ehpad notamment, la diffusion de bactéries résistantes aux antibiotiques a pour origine principale des transmissions croisées d'un résident à un autre, via les personnels ayant les mains infectées. « C'est le cas notamment pour le staphylocoque doré, présent naturellement sur la peau pour un tiers de la population », indique Dr Gabriel Birgand, praticien hospitalier en prévention et contrôle de l'infection au Centre d'appui pour la prévention des infections associées aux soins (Cpias) Pays-de-la-Loire et responsable de la mission Primo[1]. « Mais pour certaines de ces personnes, les germes présentent des résistances aux antibiotiques. » L'hygiène des mains permet ainsi de limiter les infections, la transmission manuportée de germes bactériens ou encore viraux, donc la contamination des patients, des visiteurs et des soignants au sein des structures.
« La friction des mains avec une solution hydroalcoolique (SHA) est considérée comme la technique de référence pour la désinfection des mains », ajoute le Dr Birgand. La SHA a fait la preuve de son efficacité dans la diminution de l'incidence des infections associées aux soins et dans la diminution des infections et colonisations à staphylocoque doré résistants à la méthicilline. Cette solution est donc à privilégier, sauf en cas de souillure des mains, pour laquelle un nettoyage à l'eau et au savon est préconisé.
Mesurer le nombre de frictions
La mission nationale Primo, portée par Santé publique France et attribuée au Cpias Pays-de-la-Loire, a justement pour objectif d'assurer la surveillance des résistances bactériennes aux antibiotiques, la prévention de la résistance aux antibiotiques et celle des infections associées aux soins.
Dans le cadre de cette mission, le Cpias réalise depuis quatre ans une surveillance de l'utilisation des SHA, notamment en Ehpad, l'objectif étant d'estimer le nombre de frictions des mains réalisées par les professionnels au sein des établissements médico-sociaux, par journée de présence d'un résident. Et les résultats sont loin d'être bons.
En 2019, parmi une cohorte de 619 Ehpad, les chiffres faisaient état de 1,6 friction par résident. En 2020, dans le contexte de la crise sanitaire, les résultats étaient plus encourageants, avec trois frictions par journée de présence d'un résident, redescendant toutefois à 2,6 dès 2021. « Pour un résident, le nombre d'opportunités d'hygiène des mains avoisine 10 à 15 frictions par jour », fait savoir le Dr Birgand. Les causes de ces résultats, perfectibles, sont multiples, avec, au premier rang, l'absence de solution hydroalcoolique au sein des établissements. « Même pendant la crise sanitaire, nous avons constaté qu'il n'y avait pas nécessairement de SHA dans l'ensemble des établissements médico-sociaux », s'étonne le Dr Birgand.
Une solution efficace
Pour améliorer son utilisation au sein des Ehpad, il encourage les directeurs d'établissements à placer des solutions hydroalcooliques en quantité suffisante, dans les endroits stratégiques, notamment à l'entrée des chambres des résidents, pour que les soignants les utilisent.
Il est également nécessaire d'agir sur les connaissances des soignants - versus les croyances -, en rappelant que l'eau et le savon ne sont pas aussi efficaces que les SHA. Le duo eau/savon peut même assécher la peau, contrairement aux SHA, non toxiques, à condition de choisir celles contenant uniquement de l'eau, de l'alcool et un émollient. « Pour éviter les peaux sèches et irritées, il faut choisir des SHA sans parfum, qui peuvent être allergènes, précise le Dr Birgand. Il est aussi intéressant d'impliquer le personnel dans le choix de la formule, entre liquide, gel et mousse, pour assurer une plus grande adhésion. »
L'accompagnement par des équipes mobiles d'hygiène
La mission nationale Primo ne dispose pas des moyens nécessaires pour se rendre au sein des 7 500 établissements médico-sociaux du territoire. En revanche, à l'échelle nationale, « nous avons élaboré une check list sur la base des critères de l'Organisation mondiale de la santé avec les éléments indispensables pour garantir une bonne hygiène des mains au sein des structures », fait savoir le Dr Birgand. Cet outil de promotion et évaluation de l'hygiène des mains en établissement médico-social (Premm[2]) permet aux établissements d'évaluer, à l'aide d'un questionnaire, les éléments existant au sein de leur structure pouvant favoriser les pratiques d'hygiène des mains, d'identifier les changements nécessaires pour soutenir la mise en oeuvre d'une juste utilisation des SHA et de préparer un plan d'actions pour la promotion de l'hygiène des mains en lien avec les instances internes (direction, conseil de la vie sociale, etc.).
Des équipes mobiles d'hygiène (EMH), financées par les Agences régionales de santé (ARS), sont par ailleurs déployées sur une grande partie du territoire. Elles ont vocation à intervenir au sein des établissements afin de rappeler les règles de bonnes conduites concernant l'hygiène. Elles peuvent aussi proposer des actions de formation au sein des établissements. « Les directeurs d'Ehpad peuvent solliciter l'intervention d'une EMH par l'intermédiaire de leur Cpias », conclut le Dr Birgand.