Confort, bien-être, soins : l'hygiène du résident en EHPAD s'inscrit dans tous ces registres à la fois. Ce volet de la prise en charge des personnes âgées pose des questionnements éthiques, organisationnels ou de pratiques professionnelles pour les équipes.
L'hygiène du résident, partie prenante de la bientraitance
En grec "hygieinon" signifie "santé". Les soins d'hygiène du corps du résident en EHPAD dépassent donc le simple cadre de la propreté. La toilette représente, pour la personne âgée, le temps maximum de sa journée passé avec le soignant. Elle est un temps fort de la communication et de la relation soignant-soigné. L'hygiène du résident s'inscrit dans le projet de vie et d'accompagnement individualisé, elle est partie prenante de la politique de qualité et de bientraitance menée par l'établissement. Respect de l'intimité, de la pudeur, de la dignité, des habitudes de vie et du libre choix : l'hygiène du résident questionne l'établissement et les équipes sur leurs principes éthiques et déontologiques.
Réalités des moyens
Ces questionnements prennent de l'ampleur avec l'augmentation de la perte d'autonomie des personnes âgées admises en EHPAD. 91% des résidents ont besoin d'une aide pour la toilette et 83% pour l'habillage, selon une étude de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) publiée fin 2014.
" Il y a un manque évident de personnel pour répondre aux besoins des résidents. Veiller à l'hygiène du résident, c'est certes? la toilette corporelle quotidienne et la douche hebdomadaire mais aussi le change régulier des protections urinaires, la pose des prothèses auditives, la coupe des ongles, le nettoyage des yeux, etc. Une politique de bientraitance est impossible quand certains médecins coordonnateurs définissent des protocoles de toilette en 10 minutes ", déplore Joëlle Le Gall, présidente d'honneur de la Fédération nationale des associations de personnes âgées en établissements et de leurs familles (FNAPAEF). Et l'arrivée en EHPAD d'une nouvelle population dont les concepts culturels d'hygiène et de propreté différents ont évolué - demande de douches plus fréquentes - risque de réduire davantage encore la marge de manoeuvre des établissements.
Injonctions contradictoires
L'hygiène du résident met en exergue une organisation du travail des équipes parfois en contradiction avec le respect du rythme, du confort, du bien-être du résident, voire de la prévention de la perte d'autonomie. Enfin, l'hygiène du résident est à la croisée des chemins entre culture médico-sociale et culture sanitaire. Ainsi, les équipes soignantes sont confrontées à des injonctions, là-aussi contradictoires, entre de lourds protocoles de soins ultra-médicalisés pour lutter notamment contre les risques infectieux et la personnalisation des toilettes. " L'EHPAD est à la fois un lieu de vie et un lieu de soins. Il faut trouver le juste équilibre dans les pratiques professionnelles, prioriser, faire en fonction de la réalité des moyens tout en veillant à la lutte contre les risques infectieux qui contribue à la qualité de vie des résidents ", recommande le Dr Pierre Parneix, responsable du Centre de Coordination de la Lutte contre les Infections Nosocomiales (CCLIN) Sud Ouest. Un défi quotidien pour les établissements.