Soigner et prendre soin... Les plaies et cicatrices sont aujourd'hui une des priorités absolues des professionnels qui accompagnent des personnes âgées en Ehpad. Parce qu'elles sont particulièrement redoutées pour les risques d'infections ou de complications qu'elles génèrent, elles nécessitent une attention toute particulière.
La cicatrisation, quelle plaie !
2,5 millions, c'est le nombre de plaies soignées en France dont 35% sont susceptibles de devenir chroniques si elles ne sont pas correctement soignées. Un chiffre loin d'être anodin quand on connaît les effets de la chronicité.
Qu'est-ce qu'une plaie ?
Une plaie est une blessure, une atteinte de la peau, qui peut se révéler plus ou moins profonde. La qualité de sa cicatrisation dépend de sa surface, de sa profondeur mais aussi de la zone touchée, de son environnement immédiat (muqueuse, humidité, frottement...) comme de la qualité de l'alimentation du patient. On observe deux types de plaies complexes.
Les plaies aigües
Créées par des déchirures cutanées, brûlures, chirurgies ou traumatismes, ces plaies cicatrisent généralement en quelques semaines. La durée varie en fonction de l'âge du patient et de ses pathologies, mais aussi du soin apporté et des traitements médicamenteux. Lorsqu'elles peinent à guérir ou récidivent, ce qui reste le cas dans 35% des situations, on peut les voir se transformer en plaies chroniques.
Les plaies chroniques
Escarres, ulcères de jambe, plaies du pied diabétique, dermites associées à l'incontinence... sont plus fréquents au grand âge et se caractérisent par un délai de cicatrisation supérieur à 6 semaines, lui-même souvent corrélé à une pathologie (diabète, insuffisance veineuse ou artérielle, cancer...). Ces plaies difficiles à soigner, et souvent douloureuses, nécessitent une prise en charge multidisciplinaire, et généralement de long terme.
Les personnes âgées, mal diagnostiquées
« Ce n'est pas tant l'âge que les pathologies associées qui génèrent des difficultés de cicatrisation », confirme le Dr Sylvie Meaume, dermatologue, gériatre à l'unité de Gériatrie Plaies et Cicatrisation de l'hôpital Rothschild (APHP).
« Nous disposons aujourd'hui d'un arsenal thérapeutique complet qui nous permet de soigner efficacement les plaies. La difficulté réside davantage dans le fait d'identifier correctement l'origine. Contrairement à certaines idées reçues, ce n'est pas le pansement qui guérit la plaie, mais bien un traitement étiologique. Par exemple, il faut en cas d'escarres des talons ou d'ulcères de jambes réaliser un bilan vasculaire et surtout artériel des membres inférieurs. Ce sont les artériopathies, souvent méconnues car les personnes ne marchent plus, qui sont souvent responsables d'un retard de cicatrisation. »
Prévenir avant tout
Certaines plaies sont très douloureuses, notamment celles liées à l'incontinence. Des nouveautés existent dans ce domaine mais pour éviter de créer des irritations évolutives, certains gestes sont à proscrire : laver ou frotter trop fort, masser avec des crèmes inadaptées, savonner trop souvent... « Les personnes âgées ou en fin de vie ont des plaies qu'on ne cicatrise pas forcément. Il faut surtout dans ces cas-là leur apporter du confort », confirme le Dr Meaume. « Matelas, coussins, kinés, un support diététique permettent de les soulager et de les aider à guérir ».
Se former tout au long de la vie
La discipline Plaies et Cicatrisation se développe massivement depuis 1997. « Nous avons créé un diplôme universitaire, des congrès en virtuel, en réel, qui attirent de plus en plus de professionnels », ajoute Sylvie Meaume. « La formation initiale est loin pour certains, inexistante pour d'autres et les concepts ont évolué. Nous avons élaboré des recommandations avec la Haute Autorité de santé (HAS). Il faut continuer à les diffuser car elle sont souvent méconnues. Cette discipline n'est pas une spécialité à proprement parler mais une activité pluriprofessionnelle et pluridisciplinaire. Il est intéressant de constater que les infirmiers sont très concernés par ce sujet. Chaque année, j'ai 70 étudiants dont la moitié d'infirmiers, qui s'inscrivent au diplôme universitaire à Paris et cela est observé dans toutes les facultés françaises. Dans les Ehpad aussi on voit une forte mobilisation. Beaucoup de formations ont été réalisées à destination des gériatres, qui eux-mêmes forment leurs collaborateurs pour essaimer les bonnes pratiques ».
La télémédecine, une ressource précieuse
Pour Sylvie Meaume, il est primordial d'utiliser les outils à disposition. La télémédecine, par exemple, permet de ne pas déplacer les personnes âgées. « Les professionnels doivent se saisir de cette nouvelle opportunité pour consulter des experts. Les trois quarts du temps, lorsqu'on nous demande un avis sur un pansement, nous recherchons la cause de la plaie. Cela permet d'aider les infirmières à comprendre l'origine du problème et d'améliorer les chances de guérison. »