La Cour nationale de la tarification sanitaire et sociale (CNTSS), souvent méconnue, est pourtant une instance très utile. Elle examine et statue des décisions rendues par les tribunaux de la tarification sanitaire et sociale. Les explications de Michel Bey, membre titulaire depuis plus d'un an [1].
La CNTSS, un outil au service des directeurs et des usagers
La CNTSS[2] est une juridiction administrative, prévue et organisée par les articles L 351-1 à L 351-8 du Code de l'action sociale et des familles, et dont le ressort est national. Elle statue en appel des décisions rendues par les cinq tribunaux interrégionaux de la tarification sanitaire et sociale (TITSS). Et c'est le Conseil d'État qui devient dès lors le juge de cassation des décisions qu'elle prend.
Des articles délimitent son champ d'intervention
L'article L 351-1 fixe et précise le domaine de compétences de la CNTSS (et des TITSS), à savoir les recours contre les décisions prises par le représentant de l'État dans le département ou dans la région, le directeur de l'agence régionale de santé et le président du conseil départemental, séparément ou conjointement, notamment. Ces décisions portent, entre autres, sur les dotations globales, les dotations annuelles, les forfaits annuels, les dotations de financement des missions d'intérêt général (MIGAC), les prix de journée et autres tarifs des établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux. Bien qu'inscrit dans le Code de l'action sociale et des familles, le champ couvert est très large et intervient également dans le domaine sanitaire (hôpital et clinique).
L'article L 351-2 fixe la composition des tribunaux interrégionaux.
L'article L 351-3 ouvre les droits à former un recours devant les TITSS pour toute personne physique ou morale intéressée, les organismes de sécurité sociale, le directeur de l'agence régionale de santé, le représentant de l'État dans le département où a son siège l'établissement ou le service dont la tarification est contestée.
L'article L 351-4 donne à la CNTSS la compétence pour statuer en appel des décisions des TITSS.
L'article L 351-5 fixe, quant à lui, la composition de la CNTSS. C'est ainsi qu'elle est présidée par le président de la section sociale du Conseil d'État ou, en son absence, par un des conseillers d'État désignés à cet effet par le vice-président du Conseil d'Etat. Elle compte six membres (trois titulaires et trois suppléants) proposés par les ministres chargés de la sécurité sociale, de la santé et de l'action sociale et nommés par le vice-président du conseil d'État au sein d'une liste proposée par le collège formé des membres du CNOSS[3] .
Le Code de l'action sociale et des familles précise que « ces membres sont nommés pour une période de cinq ans renouvelable. Ils sont choisis parmi les personnes qui présentent les garanties d'indépendance et d'impartialité nécessaires, et que leur compétence ou leur expérience qualifient particulièrement pour l'exercice de cette mission ».
Ces nominations ont fait l'objet d'une publication au Journal officiel du 5 novembre 2019 (arrêté du 11 octobre 2019)
L'article L 351-6 traite de la mise en oeuvre des décisions du juge du tarif : elles sont applicables lors de l'exercice au cours duquel elles sont notifiées à l'autorité de tarification, et sont mises en oeuvre par une décision budgétaire modificative.
Enfin les articles L351-7 et L351-8 renvoient pour l'un au Code des tribunaux administratifs pour certaines dispositions de ce code et pour l'autre à des décrets en Conseil d'Etat, notamment pour les TITSS.
L'organisation des audiences
Trois à quatre audiences sont organisées chaque année. Leur nombre tient pour beaucoup au nombre de recours et aux délais requis ou souhaités afin que la justice délibère dans des temps raisonnables. Les audiences durent une journée entière, parfois sans interruption, et se tiennent dans les locaux du Conseil d'État, au Palais-Royal.
La matinée est consacrée à la présentation des recours : rapporteur, parties au contentieux, le plus souvent représentées par un avocat. L'après-midi est quant à elle consacrée au délibéré avec intervention des commissaires du Gouvernement qui peuvent exposer un avis ou une analyse différente de celle du rapporteur.
Les recours
Des dispositions procédurales particulières sont prévues par les articles R351-15 à R351-41, pour les recours auprès du juge du tarif.
Auprès du TITSS, les recours doivent être exercés dans un délai d'un mois à compter de la date de notification (article R 351-15). Ce même délai s'impose pour les recours en appel devant la CNTSS, à compter de la date de notification de la décision du TITSS.
Les articles R351-17 et R351-18 déterminent deux conditions de recevabilité des recours. Ils sont ainsi soumis à une double obligation :
- L'exposé des faits. Cette première contrainte impose que la requête expose les faits, les moyens et les conclusions avant l'expiration du délai de recours. Comme le rappelle l'un des rapporteurs lors de la présentation d'un recours « le requérant doit présenter une argumentation juridique et ne peut se contenter d'indiquer que la décision contestée ne correspond pas aux propositions tarifaires ».
- La motivation. « La seconde disposition, toujours lors de cette même présentation, exige en outre que le requérant indique les raisons pour lesquelles il ne lui est pas possible d'adapter ses propositions budgétaires aux montants approuvés par l'autorité de tarification ».
Au terme d'une année d'exercice de ce mandat auprès de la Cour nationale, où il faut le rappeler, nous ne sommes pas les porte-parole des établissements, nous assistons les juges dans leur délibéré. La modestie et l'humilité s'imposent tant les sujets sont divers et complexes. L'expérience viendra. Mais au terme d'une année d'expérience, il apparaît que les sujets investigués sont particulièrement vastes. Les services d'aide à domicile et leur tarification occupent une part significative des recours.
Quelques cas particuliers, dont la fréquence va certainement croître, concernent les cessations d'activité et la fixation des derniers tarifs, à appliquer jusqu'à cette cessation définitive d'activités.
Dans le champ sanitaire, ce sont surtout les crédits du Fonds d'intervention régional (FIR), la dotation d'un service d'urgences ou les pénalités pour dépassement d'activité T2a qui restent le plus souvent traités.