Alors que la campagne présidentielle est terminée on notera combien la question de la démocratie ne peut faire l'économie du rapport au réel. C'est dans cette perspective que les politiques du care ou du prendre soin sont aussi une façon de faire (re)vivre dans le concret la démocratie.
La conscience de l'autre, un pas pour la démocratie
En effet, une démocratie du care et de l'accompagnement implique de soutenir les personnes mais aussi de mettre en avant que les faibles et les fragiles sont tout autant en capacité, à un moment ou à un autre, d'apporter et d'accompagner d'autres personnes. La notion de soin mutuel, de prise en compte de l'environnement, implique une prise de conscience de notre destin commun. Une prise de conscience de la fragilité globale du système, qui concerne les personnes mais aussi la biodiversité, l'environnement... Plus la société est complexe, plus elle produit de la vulnérabilité et de la perte de sens. Et plus le care et les démarches d'accompagnement sont nécessaires pour inverser cette logique, inclure de nouvelles références et créer du lien permettant que fonctionne le collectif. Afin que chaque humain puisse trouver sens à sa vie.
Mais il s'agit aussi que ceux qui se sentent du " bon côté " puissent être attentifs aux autres et pas seulement aux plus fragiles. L'approche du care est d'abord un rapport à l'autre qui se traduit dans le quotidien : le manager d'entreprise qui porte attention à un salarié aidant et qui va lui aménager ses horaires de travail, le couple qui rémunère convenablement la garde de ses enfants, la femme hyperactive qui comprend que la femme de ménage a aussi des responsabilités à l'extérieur, l'enseignant qui fait évoluer ses méthodes d'apprentissage par rapport à sa classe, la personne qui sait prendre le temps de trouver les mots qui réconfortent celle ou celui qui est en situation de vulnérabilité... Ce sont donc aussi des personnes qui étant du bon côté ont, cependant, besoin des autres, de plus faibles, de moins diplômés, de dévalorisés pour bénéficier du care. Encore une fois pensons au trader qui fort de ses millions a aussi besoin d'écoute et de soutien, ou tout simplement de faire garder ses enfants...
Cette conscience de la fragilité de l'autre ressort aussi de la conscience de sa propre fragilité potentielle, latente ou ressentie. De ce point de vue, la révolution démographique contribue à ce que chacun puisse appréhender son propre vieillissement, et donc sa perte de puissance potentielle. Personne n'est par essence assuré de sa puissance, de sa force. Le vieillissement en est la preuve. Mais pratiquement tout le monde s'est déjà retrouvé (ou se retrouvera) immobilisé, au moins de façon partielle, par un incident ou une maladie. Et dans ces cas-là, la prise de conscience de sa propre faiblesse, de sa fragilité est rapide. Il s'agit de ne pas oublier la leçon.