Les preuves médicales sont aujourd'hui réunies pour prouver les effets catastrophiques de la dénutrition, notamment sur les personnes âgées. Pourtant médecins et patients restent encore trop passifs face à cette maladie silencieuse. Le point avec le Pr Agathe Raynaud-Simon, Chef du Département de Gériatrie à l'hôpital Bichat, Beaujon et Secteur ambulatoire de Bretonneau APHP.

Avec le vieillissement programmé de la population, si rien n'est anticipé, la dénutrition des âgés risque de devenir rapidement un problème aux conséquences multiples. Car on sait que la dénutrition favorise la perte d'autonomie, les chutes et les fractures, les hospitalisations, puis les infections nosocomiales, les complications postopératoires. Elle augmente la durée des hospitalisations, et enfin retarde la guérison. La dénutrition peut conduire à la mort.

Dans les 3-4 mois qui suivent sa sortie d'hospitalisation, une personne âgée continue à perdre du poids. "Cette perte a des impacts immédiats sur son autonomie", confirme le Pr Agathe Raynaud-Simon. Une consultation nutritionnelle permettrait de réduire cette perte de poids. Pourtant elle est loin d'être systématique, avec les conséquences qu'on connait.

Le problème est déjà suffisamment sérieux, on compte en France 2 millions de personnes dénutries, pour que professionnels de santé, aidants et associations de patients aient décidé de se mobiliser. Réunis en collectif, ils invitent chacun à signer un manifeste composé de 10 mesures. Elles visent à alerter l'opinion publique comme les politiques aux enjeux et conséquences de la dénutrition.

Pour signer et faire signer ce manifeste : www.luttecontreladenutrition.fr

Encadré : Manifeste contre la dénutrition : 10 mesures phares

1. Faire de la dénutrition la Grande Cause nationale du prochain quinquennat

2. Lancer un Plan de lutte contre la dénutrition 2018-2021 pour enrayer la progression de la maladie et faire face à ses conséquences médicales, sociales et économiques

3. Se fixer pour objectif: "Zéro personne âgée tuée par la dénutrition"

4. Nourrir correctement 100 % des patients malades

5. Peser 100 % des patients dénutris de l'hôpital jusqu'à leur domicile

6. Imposer la présence d'un médecin nutritionniste et de 10 diététiciens pour 600 lits d'hôpital

7. Doter les établissements de soins d'un référent dénutrition

8. Créer un Comité national de vigilance de la dénutrition chez l'enfant permettant un meilleur accompagnement vers la guérison

9. Former les futurs médecins, le personnel médical et soignant, les professionnels de santé ainsi que les malades, leurs proches et les aidants au risque nutritionnel

10. Prendre soin de chacun en valorisant le goût et le plaisir. 

A retenir

Après 70 ans, la personne ne doit pas perdre de poids.

Seule la pesée régulière permet de dépister la perte de poids

Il faut agir sur les causes et mettre en place un accompagnement nutritionnel

En EHPAD, le plaisir de s'alimenter est essentiel. Il passe par un plaisir immédiat et un travail sur la convivialité des repas, à l'image de ce qu'a permis de développer le Prix Silver Fourchette.