Petits mangeurs, consommateurs standards, gros mangeurs, mangeurs difficiles cohabitent en EHPAD. Comment les professionnels peuvent-ils adapter la restauration en fonction de chaque profil ? Comment améliorer l'offre alimentaire pour les résidents qui mangent peu ?
La restauration en EHPAD face au défi des "petits mangeurs"
Lancé en 2012, le programme RENESSENS (Réussir Écologiquement une Nutrition Équilibrée et Sensoriellement adaptée pour Senior) vise à améliorer le rendement alimentaire des seniors dépendants, en développant des solutions permettant de « personnaliser » leur prise en charge. « Un outil comme le GEMRCN (Groupe d'Études des Marchés de Restauration Collective et Nutrition) n'est pas adapté aux besoins et aux capacités d'ingestion des résidents. Le GEMRCN va proposer un volume alimentaire, sur une journée complète, 1,7 à 1, 9 kg. Or, d'après les études, un résident est en capacité de consommer entre 900 grammes et 1,2 kilo de nourriture. Les volumes alimentaires sont supérieurs aux capacités d'ingestion des résidents. Ce qui conduit à une consommation partielle des repas, et donc à une dégradation du statut nutritionnel des résidents et un gâchis alimentaire », explique Julien Garnier, directeur associé du Groupe EC6, spécialiste de la restauration et nutrition hospitalière et gériatrique.
Quand un résident mange très peu, l'offre alimentaire peut-elle être revue, non pas dans son volume mais dans la manière dont on va répartir les composantes sur les quatre principaux repas de la journée. « Indépendamment de ces appétits différents, les besoins nutritionnels sont identiques chez les résidents, avec une moyenne de 1900 calories par jour. De fait pour les "petits mangeurs", un volume alimentaire réduit doit intégrer les apports nutritionnels nécessaires au maintien de leur bonne santé. On va, dès lors, jouer sur la densité énergétique, l'enrichissement, la concentration en calories et en protéines. Toutefois, les recettes ne sont pas simples à mettre en oeuvre pour les chefs cuisiniers en EHPAD car quand on amène de la protéine, on change la consistance de l'aliment et le goût. Par exemple, les protéines lactées peuvent entraîner un goût métallique », explique Christine Copin, Ingénieure Nutrition - Auditeur Senior au sein du Groupe EC6.
Quelles sont les pistes d'amélioration ?
« On peut utiliser des produits alimentaires de meilleure qualité ; travailler sur la formation des équipes de cuisine est primordiale, tous les acteurs de la restauration collective se mobilisent dans ce sens ; miser sur les techniques de cuisson basse température qui vont permettre d'attendrir les fibres des produits, sur la texturation des aliments, ou encore densifier l'apport nutritionnel. Quand les compléments nutritionnels oraux sont arrêtés, c'est une ligne financière qui disparaît et qui peut être déployée sur la qualité, la formation des équipes ou les ingrédients bio », détaille Julien Garnier.
Le programme RENESSENS prévoit de tester, fin 2017, une centaine de recettes adaptées à chaque type de mangeur, et « respectant les préférences et les habitudes alimentaires de chacun », auprès de personnes âgées vivant à domicile recevant un portage de repas, en EHPAD et à l'hôpital.