Pour bien distinguer la règle commune des appréciations individuelles, certains rappels à la loi peuvent être précieux. Le point avec Solenne Brugère, avocate associée du Cabinet Carakters.
Laïcité et fait religieux, ce que dit la loi
Des règles spécifiques pour les établissements médico-sociaux
L'article L311-3 du Code de l'Action Sociale et des Familles indique que " l'exercice des droits et libertés individuels est garanti à toute personne prise en charge par des établissements et services sociaux et médico-sociaux ". "Lui sont assurés le respect de sa dignité, de sa vie privée ainsi qu'une information sur ses droits fondamentaux. "
La charte des droits et libertés de la personne accueillie, qui doit être affichée et remise à la personne lors de son accueil, interdit toute discrimination liée à des convictions religieuses en EHPAD, et précise que la pratique religieuse doit être facilitée. Les personnels et les résidents s'obligent à un respect mutuel des croyances, convictions et opinions. Les textes ne font pas de distinctions entre les EHPAD privés, associatifs ou publics. Le règlement intérieur doit toutefois préciser les règles de fonctionnement. A noter que le respect de la laïcité s'applique également au personnel (port d'insignes religieux etc.).
Liberté individuelle en collectivité
Ce droit à la pratique religieuse s'exerce toutefois à condition de respecter les autres résidents et ne doit pas faire obstacle aux missions des EHPAD, ni aux contraintes liées à leur organisation et leur bon fonctionnement. Un résident peut prier dans sa chambre mais non dans le salon si cela gêne les autres. La conciliation entre libertés individuelles et vie en collectivité est permanente.
Les enjeux du respect de cette liberté
Les enjeux juridiques (maltraitance, discrimination...) sont importants. Les manquements sont sanctionnés jusqu'à trois ans de prison et 45 000 euros d'amende.
Les enjeux éthiques et humains sont aussi fondamentaux, car la spiritualité évolue souvent avec l'âge et l'échéance de la mort qui approche. Le respect des libertés de chacun s'inscrit dans la démarche de bientraitance et de bienveillance des équipes. Dans ses recommandations, l'Anesm rappelle que le respect des croyances et le libre exercice du culte sont des éléments essentiels à la qualité de la prise en charge. La FHF a d'ailleurs publié un rapport éclairant sur les problématiques rencontrées par les professionnels du secteur.
Retrouvez sur www.geroscopie.fr la synthèse de la rencontre organisée par la FNADEPA du Gard le 28 septembre 2016, sur le thème " Laïcité et fait religieux en maison de retraite ", avec Nicolas Cadène, Rapporteur général de l'Observatoire de la laïcité auprès du Premier ministre.
Des textes pour fixer le cadre
La liberté religieuse est une liberté fondamentale proclamée par plusieurs textes :
- Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789
- Déclaration Universelle des Droits de l'Homme 1948
- Convention Européenne des Droits de l'Homme signée par les États membres du Conseil de l'Europe en 1950.
- Constitution de 1958 : " La France est une république laïque. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction de religion. Elle respecte toutes les croyances. "
- Loi de 1905 sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat, qui précise que " toutes dépenses relatives à des services d'aumônerie et destinées à assurer le libre exercice des cultes dans les établissements publics " peuvent être inscrites aux budgets des collectivités. La loi vise expressément les EHPAD, sous la dénomination d'hospices.
Parallèlement, les textes interdisent et sanctionnent toute discrimination fondée sur les convictions religieuses