Le Conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie a transmise au parlement un avis qui détaille ses interrogations et ses alertes sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024.
Le conseil de la CNSA déplore une « absence de vision globale »
Le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024 sera examiné par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale à partir du 17 octobre et débattu dans l'hémicycle à partir du 24. Il a été présenté le 3 octobre au Conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) par Aurore Bergé, ministre des Solidarités et des familles et Fadila Khattabi, ministre déléguée aux personnes handicapées.
L'avis motivé du Conseil sera transmis au Parlement. Il y détaille les interrogations et alertes qui restent nombreuses, dans un contexte de très fortes tensions sur l'ensemble du secteur des établissements et services médico-sociaux.
« Régime adapté » de financement des Ehpad
Dans le champ du grand âge, les membres du conseil se sont penchés sur le « régime adapté » (dérogatoire) de financement des Ehpad qui sera proposé aux conseils départementaux volontaires et mis en oeuvre à partir de 2025.
Pour certains membres du Conseil, son caractère optionnel entre en contradiction avec les objectifs d'équité territoriale et de simplification portés par la branche Autonomie. Ils appellent à une généralisation rapide de cette mesure.
D'autres questionnent le risque de médicalisation accrue des Ehpad qui pourrait en résulter ou encore son impact sur le reste à charge des familles. Ils seront attentifs aux modalités de mise en oeuvre de cette mesure. Ils s'interrogent, par ailleurs, sur l'opportunité d'envisager un schéma de financement unifié dans le cadre de la réforme des services autonomie à domicile.
Plus globalement, s'agissant des Ehpad, les membres du conseil ont rappelé leur souhait d'assurer un contrôle régulier de la réalité des 50 000 créations d'emplois programmés d'ici 2030, dont + de 6 000 au titre de 2024, afin de renforcer leur taux d'encadrement.
« Une forte incompréhension » sur l'absence de mesure nouvelle pour le domicile
Concernant les services d'aides et d'accompagnement à domicile, les membres du conseil notent également la montée en charge de plusieurs mesures votées en LFSS pour 2022 et 2023. L'absence de mesures nouvelles sur le domicile en particulier soulève leur « très forte incompréhension » au regard de l'objectif de promotion de l'approche domiciliaire et d'aide aux aidants. Au regard des enjeux liés au vieillissement de la population et à l'inclusion, il ne leur parait pas possible de répondre aux besoins croissants des personnes sans une progression plus importante des dépenses de la branche et de nouvelles recettes. Ils notent que ce constat est partagé par le Haut conseil des finances publiques qui relève dans son dernier avis du 22 septembre que la trajectoire des dépenses des administrations de sécurité sociale présente une hausse en moyenne de 0,8 % sur la période 2024 - 2027, mais que cette trajectoire « ne laisse cependant pas apparaître de surcoût progressif lié aux dépenses de dépendance, malgré la hausse des besoins liés à la perte d'autonomie découlant du vieillissement de la population ». Ils demandent donc à ce que le gouvernement prenne enfin la mesure des besoins.
Des taux de défaillance inédits
Compte tenu des très grandes difficultés remontées par les structures du secteur, qui présentent « des taux de défaillance inédits », ils considèrent également que le montant du fonds d'urgence de 100 millions d'euros annoncé cet été est très insuffisant et souhaitent que des mesures plus structurelles soient prises pour l'ensemble du secteur, en établissement comme à domicile, reposant sur une clarification des responsabilités des acteurs et une simplification de la gouvernance territoriale de la branche.
Enfin, les membres du conseil souhaitent rappeler qu'une politique ambitieuse pour l'autonomie nécessite de construire une vision globale et de penser chaque mesure dans un ensemble cohérent. Cette vision globale continue de manquer actuellement et nuit à la lisibilité des nombreuses mesures prises dans chacune des lois de financement de la sécurité sociale pour améliorer les droits des personnes. Celle de 2024 ne fait pas exception en la matière et se révèle dès lors décevante au regard des enjeux.