La gestion du linge en EHPAD réunit pour les équipes nombre de difficultés. Et pose bien sûr la question de la responsabilité du directeur. Internaliser ou externaliser la fonction ? Pour quel service au résident ? Comment lui garantir un rendu de qualité ? Le point dans notre dossier du mois.
Le linge du résident : un concentré d'attachement
Une fonction sociale, un lien affectif
Le linge est un effet personnel qui joue des fonctions multiples. Il a une vocation sociale, portant des valeurs tant culturelles que sentimentales. Tel vêtement est plutôt adopté dans tel ou tel milieu social, a pu être offert ou porté dans des circonstances particulières, par des êtres chers, peut-être aujourd'hui disparus. Et c'est bien cette singularité, souvent non perceptible par les équipes, qui en fait sa valeur aux yeux de la personne accueillie. Elle peut à l'inverse générer des conflits « incompréhensibles » si le vêtement est abimé ou perdu.
Conscients de la fonction sociale jouée par le vêtement et de la mission qui leur incombe, à savoir offrir un service d'entretien de qualité, chaque directeur d'établissement se trouve un jour confronté à la question de l'internalisation ou de l'externalisation du service.
Pourtant comme l'explique Patrick Gonguet, formateur chez Audit, Conseil et Formation, « nombre d'établissements choisissent de traiter le linge en interne, sans s'interroger sur leur capacité à mettre en place des moyens suffisants, qu'ils soient humains, techniques, en matière de qualité des locaux, de circuits, de gestion de flux, de budget, de savoir-faire... Parfois ils optent pour l'internalisation car ils n'ont pas trouvé de prestataire capable de garantir un service de qualité. En effet, les blanchisseurs industriels et loueurs de linge se montrent peu intéressés par ce marché complexe qui compte beaucoup de catégories d'articles pour de petits volumes et des contraintes techniques en lavage et finition, repassage ou pliage.Sinon certains créent des filiales ou des unités orientées vers le traitement de linge de résident comme AD3 (ELIS). Les blanchisseries de proximité sont intéressées par ce marché mais ne mesurent pas toujours les conséquences qu'impose cette prestation pour leur organisation. C'est notamment le cas quand le client demande des procédures de maîtrise selon la méthode RABC. »
Le marquage du linge, un outil d'efficience
Identifier le traitement de chaque vêtement
Le premier bénéfice du marquage est de faciliter l'identification du traitement à mettre en oeuvre pour ne pas endommager le vêtement. L'étiquette indique ainsi la composition du vêtement, et les traitements possibles : lavage, blanchiment, séchage, repassage, traitement par un professionnel... En Europe, donc en France, le COFREET informe les consommateurs de la signification des symboles, via notamment un site internet très bien documenté www.lavermonlinge.com. Une application smartphone complète l'information et permet à toutes lingères de disposer des informations en un clin d'oeil. Cette signalétique facilite notamment la distinction entre les articles qui peuvent être traités directement par l'établissement et ceux qui nécessitent un traitement spécifique en externalisation. C'est le cas par exemple des articles qui ne peuvent sécher que par étendage. Les établissements ne savent généralement pas gérer cette spécificité, faute de place et de temps . En effet, beaucoup de professionnels, même les plus aguerris, croient que les accidents résultent d'un mauvais programme de lavage. En réalité, ils sont dus le plus souvent à un séchage inadapté. D'ailleurs comme le confirme Patrick Gonguet, « 50 % des lingères ne savent pas utiliser leur séchoir et passent des articles qui ne supportent pas le séchage dans un tambour rotatif. » C'est dire si ces informations peuvent se révéler précieuses.
Identifier le nom du résident
Le marquage du linge permet également de savoir à qui appartient le vêtement. Plusieurs procédés existent. Le plus ancien, le plus artisanal aussi, est l'étiquette cousue, thermocollée ou thermo-soudée sur le linge du résident. Ce principe est efficace mais nécessite la lecture d'une personne. Depuis quelques années, des marquages par code-barres (ou QR code) ont fait leur entrée dans l'univers du linge. Le QR Code est un code barre à 2 dimensions qui permet de stocker des informations numériques (textes, adresses, données diverses). Il est déchiffré par lecteur optique couplé à un système informatique. Imprimé sur un support, textile par exemple, il permet de relier l'espace physique et l'espace numérique.
Les puces électroniques, avenir de la traçabilité
Depuis une dizaine d'années sont apparues les puces électroniques, qui renferment des données diverses. Elles sont encore compliquées à utiliser car leur application nécessite de faire appel à des prestataires tant pour l'installation, la mise en oeuvre que le suivi et/ou l'entretien.
« Les puces électroniques, et notamment les puces RFID (Radio Frequency Identification) envahissent notre quotidien », ajoute Patrick Gonguet. « Dans le domaine du linge, elles sont utilisées pour identifier et tracer les vêtements mais elles peuvent avoir d'autres fonctions très utiles qui intéressent beaucoup les fabricants (lutte contre la contrefaçon, gestion de stocks, logistique, transports...). Ces puces peuvent être activées à distance, ce qui permet de retrouver les vêtements égarés ou en cours de traitement plus aisément.»
D'autres applications sont envisageables et parfois déjà en cours de déploiement, comme l'explique la CNIL sur son site Internet. Les puces permettront sans doute de connaître instantanément le contenu d'un caddie au supermarché. On peut donc imaginer aisément qu'elles pourront bientôt analyser le contenu d'un sac de linge sans nécessiter d'ouvertures manuelles. Les enjeux tant en terme de manutention, de gain de temps que d'hygiène sont considérables. Finie la manipulation de vêtements sales. Un bénéfice évident notamment en période d'épidémie de grippe, de gale ou de gastro-entérite. Pourtant reste un problème de taille : ces dispositifs semblent aujourd'hui encore onéreux pour les établissements car ils nécessitent l'acquisition de matériels complexes.
Pour enregistrer et traiter des centaines de données sur ces puces, un logiciel de cryptage des informations adapté aux capteurs de restitution ou de lecture est nécessaire. L'établissement doit aussi disposer d'appareils pour suivre, décrypter et détecter la présence de la puce. Autrement dit, de l'informatique et de l'électronique pour remplacer, compléter, le travail de l'Homme, et augmenter la fiabilité et la performance des systèmes de suivi et la traçabilité.