Interrogés sur les caractéristiques du métier de directeur, Jacques Heurtier, président de l'Association Nationale de Formation en Gérontologie1 (ANFG) et Bernard Foussat, directeur opérationnel de Vivalto Vie, n'y vont pas par quatre chemins. Entretiens.
Le métier de directeur, du technique à l'humain
Pour Jacques Heurtier, le directeur d'établissement médico-social doit remplir quatre missions phares.
D'abord, il est le garant du projet d'établissement. Il participe à sa définition et donne à ses équipes, par son management et son engagement, les moyens de le faire vivre. Chaque résident bénéficie dès lors d'un projet de vie, d'un projet de soin, le résident étant placé au centre de la réflexion.
Il gère les ressources humaines, rassure le personnel, lui permet de collaborer et de s'investir.Il assume les fonctions administratives et financières, gère le le budget et entretient les relations avec les autorités de tutelle.
Il inscrit son établissement dans un parcours de santé local. D'ici une dizaine d'années, l'EHPAD sera probablement la seule institution à bénéficier de la compétence locale pour organiser le parcours de santé des personnes âgées. Le directeur doit donc anticiper cette étape et tisser des partenariats avec l'hôpital, la médecine de ville, les résidences seniors, les services à domicile... Un enjeu souligné dès 2015 dans l'étude KPMG « Ehpad : vers de nouveaux modèles ? », qui précise que « Les opérateurs d'Ehpad sont unanimes sur la nécessité pour eux de développer des coopérations externes avec des services locaux sanitaires et gériatriques (hôpital, HAD, soins palliatifs, équipes mobiles, réseaux gérontologiques, etc.). » D'ailleurs « De nombreux opérateurs, selon leur statut juridique, leurs métiers de base, le nombre d'établissements gérés et la densité de leur implantation locale, s'engagent dans des stratégies de diversification de leur offre de services en intervenant sur des segments plus ou moins importants de la chaîne de valeur allant de l'Ehpad à l'hôpital, de l'Ehpad au domicile en passant par toute une série de services intermédiaires. »
Mais le directeur doit également assimiler une constante évolution réglementaire. Chaque année, une vingtaine de nouvelles normes lui sont imposées. Pour l'aider et le former à ces nouvelles exigences, il peut s'appuyer sur les compétences des fédérations ou syndicats professionnels (Synerpa, Fehap Fnadepa, Fnaqpa, AD-PA...), solliciter son réseau de collègues ou s'adresser aux tutelles, chargées de l'informer de toutes évolutions. « Les groupes sont certes bien organisés pour diffuser l'information en interne mais offrent dès lors une autonomie de fonctionnement restreinte et une dépendance plus forte », confirme Jacques Heurtier. « A l'avenir, on risque toutefois de voir disparaître les petites structures familiales simplement parce que nous avons créé un mode d'organisation et de financement qui ne les rend pas économiquement viables. »
Les personnes accueillies, au coeur du dispositif
« Pour moi, la principale qualité d'un directeur, c'est d'aimer l'humain », annonce Bernard Foussat, directeur opérationnel de Vivalto Vie. « Être directeur, c'est prendre en charge dignement, dans une approche bienveillante. Un bon directeur, c'est une personne qui s'occupe de ses 80 résidents comme de ses grands-parents. Il les traite chacun dans leur singularité, leur proposant un cadre de vie agréable, de bons repas, des loisirs divertissants, des lieux pour échanger... Et pour ce faire, il doit considérer qu'il peut s'appuyer sur une équipe compétente, avec qui il partage les difficultés, mutualise les efforts et les réflexions. Le reste n'est que moyens pour atteindre cet objectif. »