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17/02/2025  - Conseil d'Etat  17673

Le recours à des aides-soignantes indépendantes en Ehpad est illégal

Le Conseil d'Etat rejette le recours d'une plateforme de mise en relation entre soignants et ESSMS en s'appuyant sur l'article R. 4311-4 du code de la santé publique qui précise les modalités de la relation entre l'aide-soignante et l'infirmière.


La plateforme Médiflash lancée en juillet 2020 propose de mettre en relation des soignants sous le statut d'auto-entrepreneur avec des établissements sanitaires et médico-sociaux (ESMS). Auditionnés le 30 mars 2023 par la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur les révélations des Uber files, les trois co-fondateurs ont défendu un modèle d'emblée mais qui a d'emblée été controversé et sur lequel une enquête a même été menée par Radio France quelques mois après. Avec un point de cristallisation : les aides-soignantes. En effet, un courrier du 30 décembre 2021 aux agences régionales de santé des ministres du Travail et de la Santé de l'époque, Elisabeth Borne et Olivier Véran, rappelle que l'exercice de certaines professions réglementées « font obstacle à l'exercice même de ces activités sous un statut d'indépendant, c'est en particulier le cas de la profession d'aide-soignant ».

Ayant demandé sans succès l'abrogation de ce courrier, Médiflash a alors saisi le Conseil d'Etat en janvier 2024, en référé (urgence), et septembre 2024, sur le fond, pour excès de pouvoir des ministres portant une atteinte illégale à la liberté d'entreprendre et à la liberté du commerce et de l'industrie.

Article R. 4311-4 du code de la santé publique

Après rejet de l'urgence, la plus haute juridiction administrative vient de rejeter le recours de Médiflash sur le fond par un arrêt du 11 février 2025 . Elle juge qu'il résulte des dispositions de l'article R. 4311-4 du code de la santé publique, qui seules définissent les actes pouvant être réalisés par les aides-soignants dans les établissements à caractère sanitaire, social ou médico-social, que les aides-soignants ne peuvent, dans ces établissements, exercer leur activité que sous la responsabilité d'un infirmier ou d'une infirmière, ce qui implique qu'ils sont placés sous la conduite d'un infirmier ou d'une infirmière. En outre, au sein d'un établissement de santé ou d'un établissement social ou médico-social, les aides-soignants ne peuvent exercer leur activité que dans le respect de l'organisation interne de l'établissement et des emplois du temps arrêtés à cette fin et qu'avec les moyens de l'établissement s'agissant des soins à donner aux patients. Il en résulte que, lorsqu'ils exercent au sein d'un tel établissement, les aides-soignants doivent nécessairement être regardés comme étant placés sous l'autorité et le contrôle de la hiérarchie de cet établissement ».

Mettre en garde les directeurs d'établissement

Le Conseil d'Etat valide de ce fait le contenu du courrier ministériel du 30 décembre 2021 qui vise explicitement à mettre en garde les directeurs d'ESMS quant au recours aux services de certains professionnels paramédicaux, dont les aides-soignants, sous un statut de travailleur indépendant, en faisant valoir l'illégalité de cette situation au regard des dispositions du code de la santé publique et du code du travail et le risque, en cas de contentieux, de requalification des contrats conclus avec ces professionnels en contrat de travail ainsi que de possibles sanctions pénales pour travail dissimulé.