Dans le n° 76-janvier 2017  -  La Chronique de Serge Guérin  6129

Le revenu universel, solution miracle ?

Un véritable must : le revenu universel, revenu de base ou encore revenu inconditionnel, est à la mode. Il est paré aujourd'hui de toutes les vertus.


De gauche à droite, des libéraux radicaux perdus dans la financiarisation de l'économie aux keynésiens orphelins de la croissance, en passant par les derniers écologistes ou des politiques issus du catholicisme social, chacun y voit la martingale. Ou plutôt sa martingale au sens où personne ne met la même chose derrière le terme de revenu universel.

Si l'instauration d'un revenu universel offre une perspective novatrice et foisonnante, reste qu'elle pose aussi trois questions?: son coût, l'enjeu de la citoyenneté, la tentation de l'invisibilité du social.

D'abord, le coût?!

Selon les estimations et le niveau de revenu de base (entre 450 et 1?000?€ mensuel), le coût pour l'état pourrait varier de plus de 300?milliards à plus de 600?milliards... Comment le financer alors?? Pour les libéraux radicaux, le financement se fera grâce à la suppression des autres aides sociales et des fonctionnaires chargés de les gérer et de les contrôler. Pour les keynésiens, le financement sera assuré par la lutte contre l'évasion, l'optimisation et la réduction des niches fiscales... Autre problème, il est assez probable que l'instauration d'un revenu universel conduira à un moment ou un autre les Français à descendre dans la rue pour exiger l'augmentation immédiate du revenu de base que certains qualifieront très vite d'insuffisant voir d'indigne... Peut-être même la perspective de disposer de ce revenu rendra la France encore plus désirable pour des populations en grande souffrance à la recherche de l'Eden...

L'enjeu de la citoyenneté

Certes ce revenu inconditionnel ouvrirait le champ des capabilités, chères à Amartya Sen, et permettrait à chacun de développer ses projets de formation, le choix d'un métier plaisant et épanouissant, l'engagement associatif, l'accompagnement d'un proche, ou encore d'innover, de s'ouvrir aux autres, d'inventer de nouvelles solidarités... Mais il se pourrait aussi que cette révolution chargée de rénover notre modèle social se fasse au prix d'une citoyenneté réduite aux droits où la part des devoirs serait définitivement éteinte. La France inaugurerait le droit universel à l'existence subventionnée et sans devoir. En oubliant que l'estime de soi repose en grande partie sur le sentiment d'être utile.
La solidarité sociale active dépasse largement la redistribution. L'enjeu, c'est l'accompagnement social de la personne, le care, le soutien à une démarche vers plus d'autonomie. La solidarité sociale repose sur la co-construction d'un chemin avec la personne fragilisée. Il s'agit que chacun puisse disposer des outils et aides qui lui permettent d'être auteur de sa vie.

Serge Guérin

@Guerin_Serge

Professeur à l'INSEEC Paris

Directeur du MSc " Directeurs des établissements de santé "

Dernier ouvrage : Silver Génération. 10 idées fausses à combattre sur les seniors, Michalon

01/10/2024  - Ce qui se voit...

Luxe, calme et propreté

S'il est bien une condition indispensable au bon fonctionnement des Ehpad, c'est à n'en pas douter l'hygiène des locaux. Nettoyage, bionettoyage, hygiène du linge... Les consignes et protocoles ne manquent pas pour assurer l'organisation et l'évaluation de ces tâches quotidiennes. Et pourtant, ce travail reste invisible. Ou plutôt, il n'est visible que quand il n'est pas fait. Paradoxe ?
01/10/2024  - Billet

Les vieux aussi !

Serge Guérin me pardonnera de paraphraser le titre de son dernier ouvrage en date* pour titrer mon billet. Vous l'avez lu ou en connaissez le thème : bousculer les idées reçues sur le désintérêt des « vieux » en matière de gestes écologiques et solidaires. Tribune pour répondre à ceux qui pensent que ces générations issues de la deuxième guerre mondiale et des années cinquante ont abusé des trente glorieuses et se moquent des incidences climatiques et générationnelles futures. Elles pourraient pourtant donner des leçons d'économies à beaucoup en matière d'eau, de déchets et de courage. Une anecdote a fini de me convaincre. Récemment par une belle journée je me dirigeais vers la déchetterie suite à des travaux de jardin et je vis sur le bord de la route une personne âgée, courbée et tirant deux chariots utilisés pour les courses. Je me fis la remarque du courage de cette personne sachant que le commerçant le plus proche était à bonne distance. Sur la route de mon retour, je la revis. Quelle ne fut pas ma surprise de constater qu'en fait cette dame âgée ramassait des deux bords de la route les déchets que les « clients » de la déchetterie laissaient tomber de leurs remorques en roulant. Je ralentis pour en avoir la certitude et raconter ce vécu à l'ami Serge. Plus encore, je décidais en ces temps riches d'à priori primaires d'en faire le thème de ce billet. Méfions-nous de ces raccourcis trop faciles. Oui, les vieux « aussi » sont sensibles à ces sujets qui mobilisent beaucoup de jeunes, à juste titre. Gardons-nous de ces clichés clivants. Demain ne pourra se construire qu'en faisant société, intelligemment, avec tolérance et respect. Et dès lors, même si mon propos est naïf, il fera bon vivre ensemble. ...
01/07/2024  - Billet

La victoire appartient au plus opiniâtre

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01/06/2024  - Toucher

Découvrir le corps

Toucher des corps qui ne sont ni les nôtres ni ceux des proches aimés. Les couvrir et les découvrir, au gré des soins et des besoins de chacun. Les toucher avec pudeur et respect, dans l'intimité d'une chambre. C'est notre quotidien de soignants, qui prenons soin de ceux qui ont besoin d'assistance pour les actes simples de la vie.
01/06/2024  - Partie I

Virage domiciliaire: Les risques du tête à queue...

Le « virage domiciliaire » est une formule qui sent bon la novlangue administrative et le poncif bureaucratique. Voici des années que ce virage est annoncé, que de nombreuses caravanes publicitaires stationnent sur les aires d'autoroute de la seniorisation... Pour autant, le bilan est maigre.
16/05/2024  - Billet

Éloge du temps

Le débat sur la fin de vie est en cours. Tel un marqueur politique nécessaire, il a été décidé d'en accélérer la réflexion. Il est vrai que le sujet est plus que sensible car on le constate déjà, la sémantique le dispute au fond. On évoque un « modèle français », qui de mon point de vue sera difficile non seulement à construire mais aussi à mettre en oeuvre. Il a été dit qu'il fallait donner du temps au temps. Et cette formule est reprise bien souvent et complaisamment. Sans vouloir procrastiner, car il est légitime qu'une société évolue, j'ai pour autant l'humilité de penser que notre pays est assez enclin à légiférer et « sur-légiférer » sans s'assurer de la réelle application des lois déjà votées. Un consensus se dégage ainsi pour affirmer qu'en matière de fin de vie, la douleur est le facteur essentiel. Et que le nombre de places en soins palliatifs est non seulement insuffisant mais géographiquement injuste. Le sujet presque tabou est difficilement évoqué. Triste constat. La loi Claeys-Leonetti est incomprise, souvent non mise en oeuvre. Elle correspond pourtant à un encadrement important et nécessaire de ces moments si difficiles. ...
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Les débats sur la loi « Bien vieillir » agitent les acteurs du secteur médico-social. Le grand public est plus préoccupé par d'autres sujets sociétaux, anxiogènes et médiatiquement plus à la « une ». Encore une fois, le grand âge est victime du syndrome de l'indifférence et d'un manque de volonté politique face au mur qui se rapproche de plus en plus. C'est un combat permanent, lassant, décourageant souvent, mais essentiel cependant selon le terme si employé lors de la récente pandémie. ...
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Pas de société de la longévité sans volonté de valoriser les métiers du care

Pour poursuivre notre série sur la valorisation des métiers du care, évoquons les initiatives visant à améliorer très concrètement le quotidien des femmes et des hommes (surtout des femmes) qui travaillent auprès des plus fragiles.
01/05/2024  - Chronique

Et si on arrêtait de cacher les vieux?

La France des vieux, c'est la France du passé, la France d'hier. Place aux jeunes, à la modernité et à l'innovation digitale ! Bien entendu, je ne suis pas sérieux... Je vous imagine déjà sursauter...