Dans son livre " Vivre plus longtemps " *, Rose-Marie Van Lerberghe, présidente du Groupe Korian contribue à la réflexion sur la longévité et la dépendance. A feuilleter sans modération.
Le sujet fait peur
Pourquoi avoir écrit ce livre ?
J'ai été sollicitée par différents éditeurs. J'ai cherché à parler de l'ensemble des problématiques, en restant accessible à tous. Le sentiment que j'ai est que le sujet fait peur. On l'exorcise en parlant uniquement de la maltraitance et du tsunami financier ! La grande vieillesse reste un sujet tabou alors même que chacun a un parent très âgé et/ou dépendant. Les gens aiment l'hôpital, mais pas les maisons de retraite. C'est dommage : le fait de ne pas parler du sujet prive les aidants de conseils et limite la qualité de leur prise en charge.
Vous citez de nombreux témoignages du terrain... est-ce pour augmenter l'attractivité du secteur ?
Beaucoup de gens trouvent des satisfactions dans leur métier auprès des personnes âgées. Sur le terrain les gens me disent : " On fait un métier formidable, les personnes âgées nous donnent beaucoup mais il nous manque la reconnaissance ". A l'heure où se posent des questions sur la sortie de crise, il faudrait s'intéresser en profondeur à ce secteur. Si on ne parle pas du sujet en termes positifs, comment attirer des vocations ?
Quelles sont vos idées sur la prise en charge de la dépendance ?
Le premier impératif est d'organiser de façon efficace la filière de soins pour éviter que les personnes âgées ne passent de longues heures aux urgences des hôpitaux qui ne sont pas adaptées pour recevoir des personnes fragiles et polypathologiques. Il faut aussi éviter que les différences de règles de tarification n'amènent les personnes âgées à rester à l'hôpital une fois passé l'épisode aigu parce que c'est moins couteux pour elles. Il faut donc remettre à plat, à la fois la prise en charge de la dépendance et de l'assurance maladie, pour définir un socle de base financé par la solidarité nationale qui pourrait être complété par des assurances privées.
Il faut enfin prendre garde à ne pas pénaliser les jeunes générations qui risquent de ne pas profiter le moment venu des mêmes avantages.
Vivre à domicile est un souhait des Français. Actuellement le secteur privé lucratif n'a pas vraiment accès au maintien à domicile.
En France, contrairement à ce qui se passe en Italie par exemple, le maintien à domicile est chasse gardée des associations. Les plans d'aide flèchent vers les associations, lesquelles n'ont pas toujours les moyens pour former leurs salariés. L'intervention des groupes, de leur expérience, augmenterait la performance. Il faudrait avoir enfin une vision économique du secteur. Il est normal que l'État contrôle mais les opérateurs pourraient être multiples. Hélas, dans l'opinion, le secteur privé reste synonyme de profit. C'est dévalorisant pour nos collaborateurs qui font un travail de qualité. Qui sait que le résultat net de Korian est de 2,5% ? En d'autres termes, je rémunère mieux l'argent prêté par mes banquiers que par mes actionnaires.