Les Assises des ehpad qui se sont tenues les 10 et 11 septembre à la Mutualité à Paris ont relancé le débat sur la pénurie de moyens du secteur et le besoin d'un signal politique fort.
Les acteurs du grand âge continuent de réclamer une loi
Comme chaque année, depuis 2018, date de promesse d'une loi grand âge par Emmanuel Macron, les professionnels du secteur, réunis en congrès, dressent un état de la situation. Et cette fois, peut-être plus encore que précédemment, le constat est alarmant. Les chiffres publiés quelques jours plus tôt par la Fédération hospitalière de France lors de sa conférence de rentrée, le rappellent (voir notre article Géroscopie). 85% des Ehpad publics sont en déficit - avec un déficit cumulé 2022/2023 estimé à 1,3 milliard - situation inédite « qui illustre une dégradation généralisée ».
Pour Jean-Benoit Dujol, directeur général de la cohésion sociale le confirme, « Il y a bien une crise de l'Ehpad (sanitaire, réputationnelle, inflationniste). Elle révèle une situation extrêmement dégradée aujourd'hui. En quelques années, on est passé de 25 % aux 2/3 des établissements enregistrant un déficit. »
Les taux d'occupation également en berne
Matière grise confirme en s'appuyant sur les chiffres de la CNSA, une forte chute du taux d'occupation depuis la crise covid, soulignant de graves difficultés pour le secteur privé commercial et le public hospitalier ; le privé associatif et le public autonome maintenant des taux supérieurs à 85%.
Ces résultats tendraient à confirmer les propos de Benoit Hamon, président d'ESS France, sur le renforcement de la place du non lucratif, « pour protéger les plus âgés des convulsions du marché. » « A condition que la société s'empare de la question du grand âge », ajoute Thierry Beaudet, président du CESE. « Aucun mouvement structurel dans la population ne porte aujourd'hui cette question. Et la 5e branche n'apporte pas les ressources structurelles suffisantes. (...) Il faut des financements complémentaires. »
Les ehpad ont-ils un avenir ?
« Certainement oui », tonne Arnaud Robinet, président de la FHF. « 600 000 personnes y vivent aujourd'hui. (...). Mais nous pensons qu'il faut transformer ces ehpad, l'organisation, l'architecture, créer des plateformes de services, des établissements ouverts sur la société. Et intégrer les ehpad dans un parcours global. »
« La question démographique doit irriguer toute l'action locale (pas que les ehpad) », complète Edouard Philippe, en sa qualité de Maire du Havre, ex premier ministre et candidat déclaré à la prochaine élection présidentielle.
Mais alors loi ou pas loi ?
« Je sais combien il y a une appétence et un besoin d'un dispositif législatif et d'avancer (...) mais se dire qu'avec le vote d'une loi grand âge tout ira mieux, c'est tomber dans un travers (...) c'est un peu plus compliqué que ça ».
En effet, « la question est plus ancienne. On sait qu'elle est essentielle mais les dispositifs de gouvernance et de financement sont imbriqués. Il est donc difficile de trancher. Il nous faut garantir les retraites pour pérenniser cette loi grand âge. Compte tenu des masses financières et des transformations à assumer, on ne pourra pas proposer de réponses crédibles si on n'arrive pas à équilibrer les pensions (pour financer les besoins complémentaires liés au grand âge). Nous avons fait face à un maestrom d'oppositions. Le fait de ne pas pouvoir aller au bout de la réforme des retraites n'a pas aidé à placer des solutions crédibles pour le grand âge. Mais attention, ce n'est pas parce qu'on fait une grande loi qu'on résout tous les problèmes. »