J'ai déjà évoqué dans cette chronique « L'Appel pour plus d'équité en faveur des aidants ». Premier bilan
Les aidants sortent de l'anonymat social
Il s'agissait d'abord de contribuer à sortir de l'anonymat social ces 10 millions d'aidants de personnes en situation de handicap, fragilisées par le grand âge ou par une maladie chronique invalidante. Ce sont des acteurs majeurs de la santé publique et de la solidarité. Les aidants bénévoles - mais aussi celles et ceux qui sont rétribués pour accompagner et aider les plus fragiles -, sont les artisans au jour le jour de la société du care. Le care n'est pas un point de vue théorique mais s'inscrit bien dans une confrontation au réel.
Ces aidants bénévoles réalisent une mission pour le bien commun et contribuent à soulager la difficulté de vivre de 10?millions de personnes fragilisées. Nous parlons donc de 20 millions de personnes : un tiers de la population ! Or la reconnaissance pour les aidants reste individuelle : avant cet Appel, il n'y avait pas de parole collective ni, d'ailleurs le sentiment très développé de partager une identité. Citons l'extrait de cette réaction de Liliane500, qui résume cette prise de conscience à propos du chiffrage de l'implication des aidants : « je suis aidant, et quand j'ai vu ce chiffre, ça m'a réveillé ! »
Les invisibles
Pour faire avancer auprès des pouvoirs publics la nécessité d'une politique de soutien, il importait de montrer la contribution des aidants au vivre ensemble et à la santé publique de manière très directe. En faisant valoir l'économie de fonds publics permise par les aidants (164 Mds €), nous sortions d'une approche fondée sur la victimisation et la subvention, pour entrer dans l'ère du contrat et de la réciprocité.
Nous avons centré nos demandes en premier lieu sur la prévention santé. Sachant que les aidants se fatiguent plus que les autres et qu'ils ont besoin d'un accompagnement adapté. Nous voulions aussi alerter le monde de l'entreprise : un salarié sur cinq est en situation d'aidant. Cela a des effets directs sur la mobilisation professionnelle de la personne et par ailleurs cette dernière se trouve souvent à subir la "double peine". En plus d'être dans une situation personnelle complexe, elle doit jongler avec les contraintes professionnelles et perd des droits sociaux dès lors qu'elle réduit ou cesse son activité.
Peut-être que l'effet le plus important du lancement de l'Appel a été de libérer la parole des aidants. Il n'est que de se connecter à la page Facebook que nous avions créée, et qui maintenant est aussi gérée par des aidants, pour voir la diversité des messages et des échanges postés par des aidants. De ce flot émerge la demande de reconnaissance et de parole publique. Et aussi des propositions pragmatiques d'accompagnement.
La mise en avant des aidants était la raison première de cet Appel. Pour faire évoluer le regard des aidants sur eux-mêmes, et faire bouger les lignes dans l'espace public.