Créer du lien entre les enfants et les aînés, chanter, jouer,... mais aussi se retrouver pour un spectacle de fin d'année, interroger les pratiques d'animation, rencontrer les habitants de la commune. Le partenariat monté par la MAPI Médica de Bondy (93) et le Centre Social de la ville autour des enfants est un vrai cadeau de Noël.
Les charmes cachés de l'intergénérationnel
À 17 heures, dans la grande salle à manger de la MAPI Médica de Bondy (Seine-Saint-Denis), on guette leur arrivée. Qui attend-t-on en ce vendredi de décembre ? Des petits visiteurs du nom de Nassim, Jejma, Shaima,... soit une vingtaine d'enfants des écoles primaires voisines. Comme chaque semaine, accompagnés de deux animateurs, Bruno et Amira, les écoliers viennent passer une heure avec les résidents. Au programme en ce mois de décembre, des chants de Noël des jeux, un spectacle de fin d'année et surtout des rires, des blagues et des échanges savoureux...
" Le partenariat entre l'EHPAD et le Centre Social de Bondy remonte à quatre ans, au rythme d'une rencontre hebdomadaire, explique Véronique Renaudin, directrice de l'établissement. Avec Aurélia, l'animatrice du centre, nous partageons des activités fédératrices du lien social autour du jeu et du chant. " Dans le restaurant autour des tables rassemblées en un grand rectangle, ils sont une bonne vingtaine de résidents à accueillir les enfants. On salue, on fait une place aux nouveaux venus. Certains enfants sont des habitués, ils fréquentent la MAPI depuis quatre ans, aussi ils ont leurs préférences parmi les résidents... À noter que pour des raisons de nombre comme d'homogénéité, deux groupes d'enfants viennent en alternance : l'un comprend les enfants de CP et CE1, l'autre des enfants de CE2/CM1/CM2.
Pour créer du lien très vite, Corinne, l'animatrice de la MAPI, mise sur les classiques. Aussi les animateurs distribuent les paroles de Petit Papa Noël. Alima, huit ans, partage sa feuille avec Anne-Marie. Un résident se pose en maître de choeur, soutenu par Bruno et Amira. Graves ou enfantines, masculines ou féminines, les voix fusent. Ici et là, des résidents un peu à l'écart du groupe écoutent ou fredonnent.
Avouons-le : malgré les efforts conjugués des maîtres de choeur, l'ensemble est encore parfois un peu chaotique. " On ne chante pas en même temps ! ", s'étonne Alima. Puis le doigt sur le texte : " Là il faut monter, et là aller tout doucement... " Anne-Marie sourit : " Elle connaît les chansons par coeur ! " Anima annonce que, la prochaine fois, elle apportera sa flûte. Soudain le son d'un piano se fait entendre. Une résidente s'est invitée pour accompagner les choristes ! Les notes sont justes, le rythme parfait.
" On s'enrichit mutuellement ! "
La directrice est étonnée. " Cette dame est désorientée, confie-t-elle, et d'habitude elle ne joue que deux ou trois airs, toujours les mêmes ! " Le piano semble faire remonter les souvenirs. " J'ai commencé à jouer à l'âge de quatre ans, avec mon père ", explique fièrement la pianiste. Puis les chants s'enchaînent : " Vive le vent ", " le Petit bonhomme au chapeau pointu ".
Le spectacle de fin d'année aura lieu à la Résidence, il s'agit d'un spectacle de clowns, l'occasion d'inviter également les parents des enfants. Horaire du spectacle : 20 heures ! " Quand le centre social m'a annoncé cet horaire, j'ai eu un temps d'arrêt. Cela ne se fait jamais en EHPAD, s'exclame-t-elle. La seconde d'après, j'ai accepté en me demandant pourquoi je n'y avais jamais pensé. Interroger ses pratiques est un des avantages des partenariats. On s'enrichit mutuellement ! " Un point de vue que les résidents partagent sans nul doute. Eux qui sont issus de milieux favorisés s'entendent bien avec des enfants qui le sont beaucoup moins...
La séquence de chant est terminée. Corinne distribue maintenant d'autres feuilles : c'est le jeu des cinq erreurs. Les échanges en duo ont remplacé la musique. Au milieu de la table, le petit Hakim et sa marraine Clémentine cogitent ferme... Au bout de quelques minutes, le compte est bon !
L'heure passe vite. On se dit au revoir. Clémentine et la petite Alexia échangent leurs feuilles de chant, sur lesquelles chacune a inscrit son nom. Nassim met son blouson puis appelle la directrice. " Le livre de MAPI, on le voit jamais ", remarque-t-il. Véronique Renaudin hésite. " Le livre de MAPI ? le journal ? " L'enfant acquiesce. Et la directrice part chercher le journal mensuel de la résidence pour Nassim. " Les enfants sont des ambassadeurs, poursuit-elle. Contrairement à leurs parents, ils n'ont aucun a priori sur l'établissement ou les résidents. "
Il est 18 heures et les enfants sont partis. La directrice et son animatrice font un point. Des idées, elles en ont beaucoup. En juin, les résidents iront au Centre Social pour la fête de fin d'année. Il y a aussi ce projet de créer une chanson et de demander au fils d'une résidente, musicien, d'en écrire la mélodie. Bientôt, les résidents accompagneront les enfants d'une école primaire à la bibliothèque, au grand bonheur d'une des résidentes, ancienne institutrice. " Cette dame a un contact incroyable avec les enfants ", affirme l'animatrice.
Toutefois, la compétence de l'établissement en matière d'activité intergénérationnelle a un revers : la MAPI est débordée par son succès ! " Nous sommes très souvent sollicités par des écoles, mais je refuse de signer d'autres partenariats, reconnaît Véronique Renaudin. Dans un établissement, il faut des activités variées et je veille à ce qu'on propose des réponses personnalisées à chaque résident. " Un point de vue à chanter sur tous les tons.
Marie-Suzel Inzé