Alors que le lancement national de MaPrimeAdapt' s'opère depuis quelques semaines, la question de l'adaptation au vieillissement de la population sur les territoires reste à construire.
Les enjeux sur les territoires
« Nous sommes à un moment charnière des politiques de développement territorial », souligne Patrice Vergriete, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la Cohésion des territoires, chargé du logement, mais aussi élu local de Dunkerque, lors du colloque organisé à l'Assemblée nationale par France Silver Eco. « La Covid a fait émerger des besoins nouveaux notamment en matière de logements. On voit bien que la ville, au sens des territoires que nous avons fabriqués, ne peut plus continuer de se développer de la même manière, sans considérer la démographie et l'écologie. » Pourtant, seuls 6 % du parc de logement est aujourd'hui adapté à cette réalité du vieillissement de la population et aux 85 % de personnes qui disent vouloir rester chez elles. « Le vieillissement est peut-être le plus impensé de toutes les transformations à venir », et ce, « y compris dans le parc HLM, ajoute Patrice Vergriete, à l'inverse de la transition énergétique sur laquelle il est par ailleurs très en avance ».
Des impacts variés en fonction des territoires et des habitats
Observateurs du secteur depuis de nombreuses années, les acteurs de la Silver Économie s'accordent aujourd'hui sur un même constat : les territoires français ne sont pas prêts, même s'ils ne sont pas tous concernés de la même manière. « 400 millions d'euros sont programmés pour engager une politique d'adaptation au vieillissement, mais il apparait clairement que nous n'avons pas encore réussi à faire passer dans l'esprit des gens cette culture de la prévention. Les dispositifs actuels sont des solutions curatives qui fonctionnent sur de petits volumes, mais ne sont pas à la hauteur des enjeux à venir. » Patrice Vergriete insiste : « Il faut lever les freins, développer les outils d'autodiagnostic, pour sensibiliser davantage le grand public à la nécessité d'adapter son logement. Enfin, il ne faut pas oublier que tous ne pourront pas rester à domicile. Nous devrons développer une aide intermédiaire adaptée, et ce, quelle que soit sa forme. »
Adapter les métiers
L'un des principaux obstacles à la massification reste, selon l'élu, la difficulté de structurer la filière. « À Dunkerque par exemple, nous ne trouvons pas suffisamment de diagnostiqueurs, indique Patrice Vergriete. Demain, il faudra des ergothérapeutes et des accompagnateurs », pour conseiller, suivre et vérifier la qualité des travaux réalisés. « Pour être efficace, une rénovation doit être globale », mais la sensibilisation prend du temps et passe d'abord par du monogeste, qui permet de gagner la confiance des usagers. « Il nous faut maintenant intégrer plus largement le changement profond de notre développement territorial. Nos logiques économiques, juridiques, sociales fabriquent des modèles devenus incompatibles avec l'adaptation des logements. MaPrimeAdapt' ne va pas transformer les villes. C'est à nous de les repenser car elles sont devenues inadaptées au vieillissement de la population. »
Des besoins variables
Si les collectivités locales connaissent bien la réalité et les besoins de leur population, elles n'en restent pas moins confrontées à de graves difficultés. Comme l'explique Inaki Echaniz, député des Pyrénées Atlantiques, « le vieillissement de la population est plus important dans la ruralité qu'ailleurs ». Il serait intéressant de proposer à chaque bénéficiaire de l'APA d'accéder à un dossier unique pour les deux dispositifs que sont MaprimeAdapt' et MaPrimeRenov' et de réfléchir ainsi à des synergies nouvelles.
May'Autonomie, la Mayenne s'adapte
Pour aller plus loin, le département de la Mayenne a créé une Maison de l'habitat, qui réunit et fédère l'ensemble des intervenants. Comme l'explique Olivier Richefou, président dudit conseil départemental, « nous avons développé un Plan Bien Vivre May'Aînés (prononcé mayennais) qui augmente de 50 % le plafond des aides fixé par l'Anah. Un forfait de 2 500 euros est également versé chaque fois qu'un bailleur social aménage un logement. » Ce Plan May'Ainés comporte plusieurs dispositifs dont May'Autonomie, qui fournit des solutions matérielles pour faciliter l'accessibilité du logement.
Le dispositif May'Autonomie est en fait un guichet unique destiné aux mayennais de plus de 60 ans. Il propose un accompagnement gratuit et personnalisé, « pour faciliter la vie à domicile, dans les meilleures conditions ».
À chaque demande, afin d'évaluer les besoins et de préconiser les meilleures solutions (aides techniques ou travaux d'adaptation), un ergothérapeute se rend systématiquement au domicile de la personne. « C'est une condition sine qua none à la validation du dispositif », précise Olivier Richefou. Aujourd'hui, pas moins de 800 ménages sont accompagnés chaque année grâce à la fine collaboration du Département, de Centich, du CCAS de Laval, des Centres Hospitaliers du Sud et Nord Mayenne, de La Poste et de Soliha Mayenne, qui prend le relai, notamment pour faciliter les démarches administratives, si des travaux d'adaptation doivent être réalisés. Cet acteur associatif s'est ainsi spécialisé dans l'accès et le maintien dans l'habitat des personnes fragiles et vulnérables.