On compte 4,7?millions de logements sociaux soit plus de 11?millions de personnes concernées. Une partie croissante des locataires se voit gagnée par l'avancée en âge puisque près du tiers des locataires HLM est déjà âgé de plus de 60 ans. Une proportion jamais atteinte et qui devrait croître dans les 20 prochaines années.
Les Hlm ou Le silver habitat social
Aussi les bailleurs sociaux intègrent la transition démographique dans leur approche, par exemple dans le cadre de leur Plan stratégique de patrimoine (PSP), pour détailler leurs choix d'investissement à moyen terme. Et agir ensuite en ce sens. Pour les bailleurs sociaux prendre en compte le vieillissement des résidents implique de développer une politique d'adaptation des logements, de constituer une offre nouvelle, d'initier - ou se préparer à le faire - des services d'accompagnement des plus âgés, ou, encore, d'imaginer des approches en faveur du lien entre toutes les générations. Le tout en prenant en compte le pouvoir d'achat très limité de ces retraités populaires.
Une des demandes anciennes des acteurs du logement social était de pouvoir flécher les attributions des logements adaptés lors de leur remise en location, plutôt que de devoir financer leur remise en état standard. Gabegie idiote alors que la demande est suffisamment forte pour que le logement adapté soit attribué à une personne, âgé ou non, en déficit d'autonomie. Depuis décembre?2015, avec la vote de la Loi d'adaptation de la société au vieillissement, et le décret du 3?mai 2017, il est possible, sous certaines conditions, d'attribuer les logements adaptés prioritairement à des personnes en perte d'autonomie liée à l'âge ou au handicap. Le décret prévoit que «?pour les seuls logements ne faisant pas l'objet d'une réservation par le représentant de l'État dans le département [...], la commission d'attribution peut attribuer en priorité tout ou partie des logements construits ou aménagés spécifiquement pour cet usage à des personnes en perte d'autonomie liée à l'âge ou au handicap, dans le cadre de programmes bénéficiant d'une autorisation spécifique délivrée par le représentant de l'État dans le département?».
Depuis les années 1960, le secteur Hlm a réalisé des résidences collectives adaptées conçus pour le besoin de personnes âgées fragiles, mais autonomes?: les logements-foyers, renommés résidences autonomie. Par ailleurs, les bailleurs sociaux ont aussi construit des Ehpad et, parfois, initié des associations chargées de les gérer. Aujourd'hui, ils innovent et participent à la création de solutions diversifiées?: habitat intergénérationnel, co-location générationnelle, habitat partagé (avec des espaces communs), habitat évolutif...
Devant supporter, sous la pression gouvernementale, une diminution globale des loyers de 1,4 milliard d'euros par an pour alléger la facture des allocations logement (APL) versées par l'État, les bailleurs doivent prouver qu'ils proposent autre chose que la mise à disposition de murs... De ce point de vue, la nouvelle donne démographique est pour eux l'opportunité de démontrer leur capacité d'innovation et de retrouver une légitimité en étant capable de rendre un service d'intérêt général spécifique à des publics fragilisés, en particulier les plus âgés.
Serge Guérin
Sociologue, co-auteur de « La guerre des générations aura-t-elle lieu ? »
Directeur de MSc « Directeur des établissements de santé », Inseec Paris