Très implantés dans les pays anglo-saxons, les modes amiables de règlement des différends familiaux prennent une place de plus en plus importante dans le règlement des conflits. L'enjeu ? Le maintien ou la reprise de relations familiales apaisées. Maître Muriel Sedbon et Maître Dominique Dollois, avocates en droit collaboratif, présentent des outils encore méconnus... que les directeurs sauront mettre à profit.
Les modes amiables de règlement des différends familiaux
Voir vieillir ses parents n'est pas une chose facile. Aussi le vieillissement peut être source de conflits au sein de la fratrie ou dans le cadre des relations avec les personnes en charge de s'occuper de leur vie quotidienne. Certains sujets sont régulièrement source de conflits?: la mise sous régime de protection (curatelle, tutelle...) du parent, le financement des frais d'hébergement en logement foyer ou maison de retraite par les enfants...
Face à ces questions, la famille et les directeurs d'établissement se sentent souvent désemparés. Les directeurs et leurs équipes peuvent être pénalisés?: retard ou non-paiement des factures, relations délicates avec la famille... De leur côté, les familles sont partagées entre le souhait de pas envenimer la situation existante et celle de voir trancher ce conflit par un Juge au risque d'une décision douloureuse, inadéquate et coûteuse.
De nouvelles voies sont ouvertes pour résoudre à l'amiable ces différends?: la médiation et le droit collaboratif. Tous deux font partie des "?Modes amiables de règlement des différends?". Les directeurs gagneront donc à les présenter aux familles en difficulté.
I - LA MÉDIATION
La médiation qui remonte à la nuit des temps (Palabres africaines, Saint-Louis sous son chêne...) est désormais encadrée par la loi.
De quoi s'agit-il??
Il s'agit d'un processus volontaire, confidentiel, faisant intervenir un tiers, le médiateur, dont le rôle est de permettre l'expression des positions, des sentiments, valeurs... des personnes concernées pour qu'ils trouvent une solution satisfaisante pour chacun.
À quel moment se déroule la médiation??
La médiation peut intervenir dès la survenance d'un différend en dehors de toute procédure, les personnes concernées décidant de faire le choix d'un médiateur pour éviter que la situation dégénère au sein de la famille. On parlera alors de médiation conventionnelle. (Articles?1530 et suivants du Code de Procédure Civile).
La médiation peut également intervenir dans le cadre d'une procédure d'ores et déjà engagée à l'initiative du Juge ou de l'une des parties en présence. Il s'agit alors d'une médiation judiciaire. (Articles?131-1 à 131-15 du Code de Procédure Civile).
Dans ces deux hypothèses, la médiation reste un processus volontaire, nécessitant l'accord des parties.
Qui est le médiateur??
Toute personne peut être médiateur, cependant sa formation est essentielle. En effet, il doit être capable d'être impartial et faire preuve de neutralité afin de favoriser l'expression des opinions de chacune des personnes en présence. Il est donc impératif de s'enquérir de la nature de la formation initiale et continue du médiateur.
Comment se déroule la médiation??
Le médiateur va rencontrer les personnes concernées ensemble ou séparément dans un cadre strictement confidentiel. Il va s'assurer que chacun peut s'exprimer en toute liberté et être entendu par les autres personnes concernées et ce jusqu'à ce qu'une solution satisfaisante pour tous apparaisse.
Ses outils seront?: l'écoute active (la reformulation, un questionnement non directif), des recadrages, la négociation raisonnée et une grande bienveillance qui permet de passer de positions figées à la recherche des intérêts, des besoins profonds et des valeurs des parties.
II - LE DROIT COLLABORATIF
Du fait de sa compétence juridique et judiciaire, l'avocat peut également jouer un rôle d'apaisement grâce au processus collaboratif.
De quoi s'agit-il??
Le processus collaboratif permet aux parties de parvenir à des solutions originales et adaptées à leur problématique. Ces solutions pourront être entérinées par un Juge, en évitant ainsi l'aléa judiciaire.
L'efficacité du processus collaboratif repose sur les engagements contractuels pris par les parties?: confidentialité, transparence, recherche du meilleur accord possible pour chacun.
Dans le cadre de ce mode alternatif, chaque partie doit être assistée d'un avocat spécifiquement formé afin d'être écoutée, conseillée et soutenue tout au long du processus.
À quel moment intervient le processus collaboratif??
Le processus collaboratif intervient?:
- Avant toute saisine judiciaire (ouverture d'une procédure auprès du juge des tutelles, juge des affaires familiales...),
- L'avocat devra conseiller et aider son client à l'élaboration d'une solution acceptable.
Comment se déroule le processus collaboratif??
Chaque partie doit faire le choix d'un avocat formé en droit collaboratif.
Les parties signent un contrat de participation aux termes duquel celles-ci s'interdisent de saisir le Juge.
Le processus se déroule en plusieurs étapes se succédant dans un ordre précis. Il alterne des rencontres entre chaque avocat et son client et des rencontres en présence de l'ensemble des parties et de leurs conseils.
Au cours du processus, les parties peuvent s'exprimer en toute sécurité sur les causes réelles de leur litige et ce en toute confidentialité. Ainsi, une totale transparence est garantie pendant tout le processus.
Les avocats collaboratifs oeuvrent dans le sens de la recherche de solutions sages et pérennes. En cas d'échec des négociations, les avocats collaboratifs se déchargeront du dossier.
NB?: les parties ne pourront pas utiliser dans le cadre d'un débat judiciaire des éléments dont ils ont eu connaissance pendant le processus.
Quelle est la différence entre le droit collaboratif et la médiation??
Les outils de la médiation et du droit collaboratif sont de même nature (écoute active, reformulation, questionnement, confidentialité...) Tous deux permettent une créativité dans l'élaboration des solutions, dans le respect de l'ordre public. Néanmoins, leur cadre est différent?:
- Présence d'un tiers neutre s'agissant de la médiation,
- Présence d'avocats formés intervenant aux côtés de chacune des parties s'agissant du processus collaboratif.
La méthode fait ses preuves?: dans plus de 60?% des situations une solution amiable naît. Et avec elle, le maintien ou la reprise de relations familiales apaisées...
En savoir plus : www.droit-collaboratif.org