A 94 ans, une résidente de la maison de retraite Beausoleil de Chaville a été expulsée de l'établissement parce que sa prestation hébergement était restée impayée plusieurs mois. Pour 40 000€ d'impayés, cette dame s'est retrouvée provisoirement à l'hôpital. Ce qui pose de nombreuses questions dont celle du contrat de séjour et de savoir si sa chambre est un domicile ou non ?
Les résidents sont-ils expulsables pour impayés ?
Cette dame a pourtant deux fils, dont l'un est médecin et l'autre gestionnaire de patrimoine. Si sa retraite ne couvre pas totalement ses frais d'hébergement, ses fils sont tenus de l'aider. En effet, l'article 205 du Code civil donnent obligation aux enfants de subvenir aux besoins de leurs père et mère, ou autres ascendants dans le besoin. Les deux enfants doivent donc contribuer à parts égales à payer ou à compléter le paiement des frais d'hébergement de leur mère.
Expulsable ou non expulsable ?
Les impayés en maison de retraite ne sont pas rares et pourraient devenir très pénalisants pour les établissements dont l'équilibre reste toujours difficile, d'autant plus que le niveau des retraites baisse et que nombre de résidents peinent à payer leur dû. La procédure d'expulsion pose le problème de la nature de la chambre du résident. Est-ce un domicile ou non ? Si la chambre est assimilée à une habitation principale, alors la trêve hivernale s'applique (Article L412-2 - Code des procédures civiles d'exécution). La trêve peut durer jusqu'à 3 mois...
Si la chambre d'une maison de retraite est considérée comme un hébergement collectif ou hôtelier, alors la trêve hivernale ne s'applique pas. Aucune jurisprudence n'a véritablement tranché ce point...
Taxe d'habitation
Toutefois, la fiscalité donne un réponse puisque la taxe d'habitation a fait l'objet de diverses jurisprudences. Celle-ci considère que l'espace privatif d'un établissement conventionné par l'État ayant conclu une convention tripartite, laquelle impose un cahier des charges, doit être considéré comme la transposition en établissement du domicile du résident.
"L'espace privatif doit également permettre à chaque résident de recevoir dans l'équivalent d'un chez soi, facilitant ainsi ses relations sociales, notamment avec sa famille et son entourage" (Arrêté II 2.2.).
L'administration considère les maisons de retraite assujetties à la taxe d'habitation pour les parties communes (cuisine,salle à manger, salle d'animation). (Rep. DELELIS - AN 22 juin 1979 p.5474 °14402). En revanche, si les pensionnaires ont la disposition privative de leur chambre, ils doivent être assujettis à la taxe d'habitation sur la valeur locative de leur logement.
Toutefois si les contraintes suivantes sont imposées : aucun repas ne peut être pris en dehors des salles de retaurant - les heures de visite sont limitées - les agents ont un libre accès aux chambres même en dehors des urgences - les résidents peuvent être changés de chambre selon les besoins de l'établissement - alors seul l'établissement est redevable de la taxe d'habitation.
Différentes juridictions ont apprécié différemment la chambre du résident, selon ces critères, d'où une grande incertitude.
Bref, cette actualité douloureuse jette "un coup de projecteur sur la pâte difficile que je travaille depuis six mois : l'immense complexité, humaine, administrative, réglementaire, éthique, de la politique de l'âge" comme le dit très justement Michèle Delaunay.
Impayés et assurances
Existe-t-il des assurances couvrant le risque des impayés en EHPAD ? Pour le savoir nous avons demandé à M. François Xavier Hiley de Cornil @cie : « Les impayés représentent environ 2 à 3% par établissement, ce qui est assez peu. Cela handicape la bonne marche des établissements mais ce n'est pas simple à assurer pour un assureur. Il y a peu de fréquence et peu de recul sur la pérennité de l'équation assurantielle ».