Le silence (éloquent ?) de la nouvelle ministre Fadila Khattabi aggrave la confusion sur une prochaine loi grand âge et une réponse de Catherine Vautrin à une interview de Géroscopie l'entretient, alors que dans le même temps un article de la proposition de loi Bien Vieillir prévoit consensuellement une loi de programmation...
Loi grand âge : vers un abandon en rase campagne ?
Lors des questions au gouvernement du 14 février, la double question de la députée socialiste Christine Pirès-Beaune était simple : « faites-vous vôtre l'engagement d'Aurore Bergé » ? et « quand la loi Grand âge verra-t-elle le jour » ? Pas de réponse. Litanie devenue familière, Fadila Khattabi, la nouvelle ministre des personnes âgées et des personnes handicapées, a utilisé son temps imparti de parole pour dévider une nouvelle fois tout ce que les gouvernements successifs avaient fait pour le grand âge depuis le début du premier quinquennat Macron.
« Il n'y en aura pas » (de loi, ndlr), a affirmé au journal La Croix, le 14 février, une source parlementaire au retour d'un rendez-vous ministériel. Ce qui veut dire que Catherine Vautrin se déjugerait (ou serait déjugée..) : auditionnée le 24 janvier par le sénat, la ministre du Travail, de la santé et des solidarités s'était engagée à faire voter une loi avant la fin de l'année.
Désormais, le débat ne semble donc plus être loi « de programmation » constitutionnelle ou pas, mais loi tout court ou pas.
Les propos de Catherine Vautrin aujourd'hui
Dans le cadre d'une interview à paraître dans notre prochaine newsletter, la ministre a répondu le 15 février à une question de Géroscopie sur la loi grand âge, en nous apprenant au passage que le Conseil d'État n'avait pas encore été saisi : « D'abord, dans ce domaine, tout ne relève pas du champ de la loi. Il y a bien des avancées qui pourront être concrétisées dans les mois à venir par voie réglementaire. D'autres le seront d'ailleurs dans le cadre de la PPL Bien Vieillir, qui, après son adoption par le Sénat, arrivera en CMP dans quelques semaines. Ce que j'ai voulu rappeler simplement, c'est que la Constitution définit précisément le champ des lois de programmation, qui doivent déterminer « les objectifs de l'action de l'État ». S'agissant d'une politique, celle du grand âge, qui dépasse le seul champ de l'action de l'État, il peut y avoir des interrogations sur la constitutionnalité d'un tel texte. Le Conseil d'État sera saisi dans les tout prochains jours et se prononcera dans un délai de 4 à 6 semaines. Nous avons à préparer l'évolution démographique de notre pays, avec l'ensemble des acteurs du secteur concerné. Nous devons parler stratégie, gouvernance et financement ».
Que va-t-il se passer maintenant avec la PPL Bien vieillir ?
Question : que va-t-il se passer maintenant avec la proposition de loi « bien vieillir », rebaptisée « grand âge et autonomie » par les sénateurs. Son actuel article 2 bis B prévoit qu'avant le 31 décembre 2024, puis tous les cinq ans, une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge détermine la trajectoire des finances publiques en matière d'autonomie des personnes âgées. Voté dans les mêmes termes par les députés puis par les sénateurs, il ne sera pas au (copieux) menu de la commission mixte paritaire (CMP)...
Et pendant ce temps-là, côté réglementaire, le Journal officiel s'apparente au désert des Tartares depuis des semaines. R.A.S. Même la composition du cabinet de Fadila Khattabi, qui devrait comprendre 13 membres, n'est pas encore officielle. On sait juste que la ministre déléguée va garder son précédent directeur de cabinet, Maëlig Le Bayon. Ce jeune énarque (promotion Georges-Clémenceau 2017-2018) a d'abord rejoint l'administration du ministère des Armées, avant d'être appelé en 2021 par Sophie Cluzel, secrétaire d'État aux personnes handicapées comme directeur adjoint de cabinet.