Le programme national d'actions de prévention des infections associées aux soins (PROPIAS) prévoit de réaliser une enquête nationale dans les établissements sanitaires et médico-sociaux tous les 5 ans. Entre mai et juin derniers, pour la 1ère fois, les EHPAD étaient ciblés. 700 établissements ont été tirés au sort, dans l'objectif de décrire leurs caractéristiques principales, les résidents, les infections ciblées recensées, les traitements antibiotiques prescrits pour dégager des priorités en termes de prévention des infections et de prescriptions antibiotiques.
Lutte contre les infections associées aux soins en EHPAD
L'organisation du recueil des données a été confiée au réseau CClin-Arlin dans le cadre du RAISIN (Réseau national d'Alerte d'investigation et de surveillance des infections nosocomiales et associées aux soins) en partenariat avec l'Institut de Veille sanitaire.
Nathalie Maubourguet, Présidente de la FFAMCO *, membre du PROPIAS, a accepté de répondre à nos questions
Etait-il important de se pencher sur les infections associées aux soins en EHPAD ?
Oui, car il est maintenant incontournable de prendre en compte, dans le cadre de la gestion des risques, celle de la prévention des infections associées aux soins et ce, pour plusieurs raisons
Alors même que le niveau de dépendance et de polypathologie des résidents continue de croître, les équipes soignantes doivent faire face à l'augmentation du niveau d'exigence de qualité et de sécurité des soins. Sans conteste, le profil de la population accueillie aujourd'hui en EHPAD génère une augmentation de la complexité des soins et ce d'autant que les séjours hospitaliers sont de plus en plus courts et qu'il n'est pas rare que ces établissements reçoivent des patients qui nécessitent des soins médico-techniques lourds. Nous devons gérer, de manière concomitante, les facteurs de risque individuel du résident et le risque institutionnel. Par ailleurs, les EHPAD sont de plus en plus confrontés au risque d'infections associées aux soins ayant pour cause l'antibiorésistance bactérienne. A ce risque, il faut associer le mésusage des antibiotiques encore trop souvent rencontré.
Quelles sont les principaux enseignements que l'on peut tirer des résultats de cette enquête ?
Il faut saluer l'impact de Prév'Ehpad 2016, première enquête nationale de prévalence en EHPAD car plus de 28 000 résidents ont été inclus. Les objectifs étaient de mesurer la prévalence des IAS et des ATB** prescrits aux résidents. Il était aussi question d'objectiver, un jour donné, le profil des résidents, des infections associées aux soins et de la consommation d'antibiotiques. L'objectif étant de dégager des priorités d'actions pour la politique de prévention des IAS et le bon usage des ATB ainsi que leur suivi.
Il faut souligner que les données recueillies concernant le GMP moyen et le PMP moyen sont plus en adéquation avec les chiffres annoncés par les médecins coordonnateurs au moment des coupes alors que d'autres sources semblent moins fiables. En effet, l'enquête nationale objective un GMP moyen à 723 et un PMP moyen à 206.
Sans dévoiler les chiffres officiels, il ressort que les infections urinaires, pulmonaires et cutanées sont les infections les plus fréquemment rencontrées.
Quels intérêts présentent-ils pour les médecins qu'ils soient traitants ou coordonnateurs ?
Cette enquête leur fait prendre conscience des efforts encore à fournir dans la lutte contre l'antibiorésistance. Il est nécessaire de poursuivre la sensibilisation des professionnels de santé sur la déclaration des événements indésirables associés aux soins. Deux programmes nationaux de santé publique contribuent à accroître la prise de conscience sur l'importance d'organiser la déclaration des événements indésirables liés aux soins. Le programme national pour la sécurité des patients (PNSP 2013-2017) et particulièrement son axe 2 « Améliorer la déclaration et la prise en compte des événements indésirables associés aux soins » qui encourage à identifier, à analyser et traiter ces événements et le programme pluriannuel de lutte contre les infections associées aux soins (PROPIAS).
Et pour les résidents et les directeurs ? Auront-ils un rôle à jouer ?
La prise en compte de ce risque est un gage de sécurité et de qualité des soins prodigués aux résidents. Le rôle des directeurs est fondamental car la gestion du risque infectieux a un coût pour l'achat des équipements et pour la formation des équipes.
Comment la FFAMCO va-t-elle communiquer auprès de ses adhérents pour une prise en compte effective des résultats ?
Depuis bientôt 10 ans, la FFAMCO contribue, par son implication dans différents groupes de travail, à la prise de conscience de l'indispensable gestion du risque infectieux en EHPAD. Elle a participé à la rédaction du guide publié par Le Haut Conseil en Santé Publique sur la prise en charge des gastroentérites aiguës en EHPAD, à la formalisation d'un outil d'auto évaluation du risque infectieux en EHPAD avec le CCLIN Sud OUEST et à la demande de la SF2H, la FFAMCO a participé à l'actualisation des précautions standard en juin 2017.
Dans le cadre des actions d'accompagnement menées depuis 2008 par la CNAMTS et concernant particulièrement la problématique spécifique des prescriptions d'antibiotiques dans les infections urinaires bactériennes, la FFAMCO participera à la formalisation d'un support qui permettra au binôme médico-administratif des CPAM de rencontrer les équipes soignantes des EHPAD. La 6ème campagne d'action d'accompagnement des EHPAD commencera à l'automne 2017. Aujourd'hui, la FFAMCO fait partie du comité de pilotage du PROPIAS.
Les résultats de cette enquête seront présentés dans les sessions FFAMCO qui se tiendront dans le cadre des Journées annuelles de la Société Française de Gérontologie et de Gériatrie du 27 au 29 novembre 2017 à PARIS.
Françoise Toursière
Consultante Cabinet Convenance Consult