Mourir, oui, mais comment ?
Après trois mois de débat, les 184 membres de la Convention citoyenne sur la fin de vie se sont prononcés à 72 % en faveur du suicide assisté et à 66 % en faveur de l'euthanasie. Ils sont 75 % à exprimer leur volonté d'une ouverture de l'aide active à mourir, plébiscitée par Emmanuel Macron, contre 19 % à y être opposés, selon le vote retransmis en direct du Conseil économique, social et environnemental (CESE).
S'il ne s'agit que d'une « orientation citoyenne », chargée « d'éclairer » les débats qui se tiendront à l'Assemblée nationale, l'évolution de la loi actuelle vers l'« aide active à mourir » semble déjà bien engagée.
Pourtant les organisations professionnelles directement impliquées dans l'accompagnement des personnes en fin de vie s'inquiètent de cette évolution. La légalisation de l'euthanasie et du suicide assisté « ne peuvent en aucune manière relever du soin », indiquent-elles, invitant plutôt le législateur « à s'attacher à réparer un système de santé fortement dégradé », et développer l'accompagnement palliatif.
Dans l'agitation du débat, un documentaire, discret mais redoutablement pertinent, propose de plonger « Au coeur de la fin de vie ». Médecins, juristes, directeurs d'Ehpad, psychologues, professeurs d'éthique et patients y revisitent les enjeux philosophiques, juridiques et médicaux d'une éventuelle légalisation, se nourrissant de l'expérience des pays déjà engagés dans cette démarche. En Belgique par exemple, « l'euthanasie est présentée comme un ultime soin, dernière alternative à la souffrance », même si, dans la réalité, le geste est loin d'être anodin. Au fil des ans, le nombre d'euthanasie ne fait qu'augmenter, passant de 230 en 2003 à 2 700 en 2021.
« Dans tous les pays ayant légalisé l'euthanasie, des dérives ont été constatées. La loi est incontrôlable », confirme le Dr Jean-Marie Gomas, gériatre, médecin de la douleur et de soins palliatifs. Pour Théo Boer, professeur d'éthique de la santé aux Pays-Bas, « la légalisation a favorisé la demande. À partir d'une réponse à une situation exceptionnelle, on a créé une nouvelle manière de mourir. Et il n'y a pas de raison de croire que la France, l'Allemagne ou l'Autriche fassent exception à la règle. »
Ce documentaire de 70 minutes, soutenu par la Fondation Lejeune dont on connait par ailleurs les positions, a le mérite de poser le débat en des termes nouveaux, d'examiner la réalité du terrain, aux côtés des soignants, des familles, des plus vulnérables... mais aussi de redécouvrir les soins palliatifs et promouvoir un accompagnement de qualité, auxquels toutes sociétés aspirent.
En savoir plus : www.aucoeurdelafindevie.fr