De la théorie à la pratique... Pour donner suite aux préconisations du rapport Ricordeau, la circulaire budgétaire, en date du 15 mai et publiée le 25 mai, indique aux agences régionales de santé « les différents aménagements » à mettre en oeuvre pour atténuer les effets négatifs des convergences sur les forfaits soins et dépendance des EHPAD. Une "opération sauvetage" qui devra être menée en concertation avec les conseils départementaux.
Neutralisation de la convergence négative des EHPAD: le mode opératoire des ARS
Deux ans de réflexion. Pour les années 2018 et 2019, conformément aux engagements d'Agnès Buzyn, la ministre des Solidarités et de la Santé, un mécanisme de neutralisation de la convergence tarifaire à la baisse est mis en place. Issu des propositions du rapport de Pierre Ricordeau, inspecteur général des affaires sociales, remis le 18 avril à la ministre, ce dispositif temporaire « permettra de mener des travaux complémentaires au niveau national sur le forfait dépendance avec les représentants des conseils départementaux et des établissements pour personnes âgées sur des bases mieux objectivées », rappelle la circulaire budgétaire 2018 publiée le 25 mai. Pendant que l'on phosphore en haut lieu, les agences régionales de santé (ARS) doivent mettre en oeuvre les différents aménagements pour redonner un souffle d'air aux EHPAD en difficulté.
Une enveloppe de 29 millions d'euros
Une enveloppe spécifique de 29 millions d'euros de financements complémentaires sur le forfait soin afin de neutraliser temporairement les effets négatifs des convergences dépendance et soins pour l'année 2018 est allouée aux ARS. « L'objectif est qu'il n'y ait d'établissement contraint de dégrader son taux d'encadrement sur les effectifs cofinancés par les tarifications soins et dépendance », rappelle l'administration centrale. Les ARS sont appelées à identifier « conjointement » avec les conseils départementaux, les établissements qui devraient bénéficier de ce "dispositif de neutralisation".
La réactualisation des coupes Pathos et des GMP
« Dans certain cas, il est apparu que les difficultés rencontrées par certains EHPAD provenaient de l'obsolescence des coupes Pathos et du GMP qui détermine les forfaits soins et dépendance », note la circulaire. Partant de ce constat, les ARS sont invitées à « réactualiser en priorité les coupes Pathos les plus anciennes et notamment celles des EHPAD en convergence à la baisse » et, en accord avec les conseils départementaux, les GMP les plus anciens, également en priorité pour les EHPAD en convergence négative. Cette actualisation des coupes Pathos peut intervenir même en dehors du cadre de la conclusion d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (CPOM).
Une enveloppe de 2 millions d'euros est également allouée aux ARS dans le cadre du fonds d'intervention régional (FIR) pour « financer des prestations de conseil et d'appui aux EHPAD en difficulté », « afin d'améliorer l'efficience de leurs organisations et de leur gestion ». Pour rappel, Agnès Buzyn avait déclaré que l'Agence nationale d'appui à la performance (ANAP) serait sollicitée pour accompagner les établissements sur ce volet.
La programmation des CPOM
La circulaire budgétaire préconise aux ARS de revoir « le cas échéant », le calendrier prévisionnel de passage au CPOM des EHPAD, en étroite concertation avec les conseils départementaux, afin que les EHPAD les plus fortement impactés puissent être en mesure de signer un CPOM au cours de la période de neutralisation des effets de la convergence à la baisse sur les forfaits dépendance.
Le mécanisme de neutralisation
L'annexe 3 de la circulaire budgétaire détaille le mécanisme de neutralisation. L'objectif visé est de « garantir, sauf pour les EHPAD en convergence négative sur le tarif soins, qu'aucun établissement ne verra ses ressources diminuer en 2018 ».
Comme préconisé par Pierre Ricordeau, la convergence dépendance négative est plafonnée à 5 000 € au maximum, « afin d'éviter que les gains de la convergence tarifaire soins soient annulés par la convergence du tarif dépendance. » « Le montant de 5 000 € annuel a été retenu car cela correspond à un effort de convergence sur 7 ans de 35 000 €, ce qui équivaut à la perte d'un poste d'aide-soignant au sein de l'établissement », explique l'administration centrale.
Si l'ensemble de ces mesures vise à limiter la casse, la circulaire précise toutefois que seul l'effet négatif de la convergence sur le forfait dépendance au titre de l'année 2018 devra être compensé. Il n'y aura pas d'abondement financier au titre de l'année 2017.
Les ARS devront effectuer « un travail de rapprochement » avec les conseils départementaux afin de déterminer précisément les produits de la tarification dépendance 2017 et les comparer aux produits de la tarification 2018 en éliminant « les effets liés à des ouvertures de places en cours d'exercice » et « les financements de compensation qui auraient déjà pu être accordés par les conseils départementaux afin qu'il n'y ait pas de double compensation (moratoire départemental sur la convergence à la baisse des tarifs dépendance, attribution de financements complémentaires par le conseil départemental, etc) ».
Avec la publication de la circulaire budgétaire, les ARS disposent désormais de leur feuille de route pour agir sur les effets négatifs de la réforme de la tarification, pour 2018. Reste à présent à l'État, l'Assemblée des départements de France et les fédérations à s'entendre pour élaborer, d'ici l'automne 2018, un projet d'ajustement du décret de 2016 relatif au forfait dépendance. En somme, sortir du provisoire pour tendre vers une solution définitive.