Alors que le 15e Congrès national de l'animation et de l'accompagnement en gérontologie, CNAAG, doit se tenir les 22 et 23 novembre 2021 à Grenoble, Bernard Hervy, vice-président du Groupement des animateurs en gérontologie (GAG), accepte pour Géroscopie d'en dresser les principaux contours. Entretien.
Nouveaux « en jeux » de l'animation avec les personnes âgées
Le congrès 2020 a été annulé pour cause de crise Covid. Quel thème avez-vous choisi pour cette édition 2021 ?
La crise et le confinement nous ont contraints en effet à annuler l'édition 2020. Mais tout repart en 2021. Nous avons déjà largement dépassé les 200 inscrits et nous visons le retour d'un congrès en présence physique (qui a tant manqué à nos animateurs...), avec probablement 500 participants. Cette édition 2021 nous donnera l'occasion de réfléchir aux enjeux de l'animation avec les personnes âgées, mais aussi bien sûr aux éléments mis en jeux pour satisfaire ces enjeux.
Quels seront les points forts de ce congrès ?
Trois aspects domineront ce congrès. D'abord l'actualité de ces 18 derniers mois et tout ce que la double crise, sanitaire et isolement forcé, a généré en termes de difficultés, enfermements, pertes de liens, et pertes d'envie de vivre. Ensuite, l'agilité, l'adaptation et l'initiative dont les animateurs ont fait preuve.
Enfin, nous aborderons ce qui s'est passé et continue de se tisser avec les familles, leurs demandes souvent légitimes, les organisations nouvelles, et des animateurs plus conscients que jamais de la richesse des rôles des proches, même s'ils restent gênés parfois par des critiques injustes et déplacées.
Les participants retrouveront les modalités habituelles des congrès CNAAG : apports, analyses, confrontations d'idées et de pratiques, ateliers d'échanges, et bien sûr le concours « Anim'Awards » marqué cette année par les deux thèmes que nous venons d'évoquer, les innovations pendant la crise et les travaux avec les proches, qu'on ne peut plus cantonner au seul rôle d'aidant.
Comment appréhendez-vous la fonction animation aujourd'hui ? Comment s'est-elle adaptée au confinement et à l'isolement forcé ?
Il faut reconnaître que les animateurs vivent une période délicate et contrastée. Ils vont bien, parce que la crise a démontré leur utilité dans l'animation de la vie sociale des anciens, et leurs capacités d'adaptation. Mais pas moins d'un sur trois a été touché par la Covid par manque de protection adaptée (d'après nos estimations, car il n'existe pas de statistiques officielles).
Malgré cela, ils restent déterminés à faire évoluer la situation : 1 animateur pour 64 résidents, c'est ridiculement insuffisant. Nous demandons 1 animateur pour 30 résidents, avec un impact sur la tarification autonomie-dépendance, pour réduire le reste à charge des familles et bénéficier de meilleures exigences qualitatives.
La grande nouveauté de ces années 2020-2021, c'est le début du nouveau Bac professionnel animation de l'Éducation nationale. Une formation sur l'animation en trois ans (comprenant pas moins de 22 semaines de pratique) tournée vers les deux publics quantitativement les plus importants, à savoir les enfants et les personnes âgées. Cette formation permet d'obtenir un diplôme officiel et une qualification reconnue. Le GAG a d'ailleurs signé une convention de partenariat sur ce Bac pro animation avec l'Éducation nationale.
Cette formation est délivrée dans 173 lycées, et il est à noter que les promotions sont aujourd'hui complètes ! Ce qui tend à prouver que le discours institutionnel sur la « perte d'attractivité des métiers du grand âge » n'est pas totalement exact, et qu'il convient de ne surtout pas généraliser !
Il sera important pour la suite de se poser les bonnes questions :
- Pourquoi créer des postes dans des secteurs où l'on sait qu'il n'y a pas de candidats sur le marché du travail et où les écoles sont vides ?
- Les actions (courtes et coûteuses) d'adaptation à l'emploi en trois semaines ne répondent pas à la perte d'attractivité de certains métiers. Ne faut-il pas les compléter par des perspectives de qualifications et d'évolutions ?
- Pourquoi ne pas investir et proposer des emplois qualifiés dans des secteurs utiles où l'on trouve des professionnels formés (la crise a montré les dégâts de l'isolement et la richesse des liens sociaux) ?
Le choix est clair : tenter de remplir un trou sans fond ou s'appuyer sur des potentialités existantes.
Quelles animations/animateurs pour demain ? Comment s'adapter à cet « Ephad de demain » dont tout le monde parle ?
Les animateurs de demain travailleront pour des publics larges, dans la diversité des territoires. Je suis très dubitatif sur la notion d' « Ehpad de demain ». La crise a montré les limites de l'Ehpad en tant que modèle unique, et probablement en tant que modèle tout court. Ses deux fondements que sont la concentration dans des lieux fermés de personnes avec les mêmes difficultés, et la sanitarisation de ses fonctionnements, ne correspondent pas aux demandes des personnes âgées de demain, et même d'aujourd'hui. Elles veulent de la vie, du mouvement, de la dynamique, des échanges, en complément des soins et de la sécurité. L'animation de la vie sociale occupera sûrement une place importante dans des plateformes de services multidimensionnels.
Infos pratiques : Centre de congrès du World Trade Center Grenoble : www.congres-cnaag.com