Un rapport de l'Anact souligne que la fragilité des fondements organisationnels empêche l'appropriation du numérique en santé sur le terrain par et au service des professionnels. Le DUI en étant un exemple.
Numérique en santé : il y a loin des promesses techniques à la réalité du travail
L'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact) vient de publier un rapport d'exploration « Travail et numérique en santé » sur les effets des transformations numériques sur les conditions de travail dans les établissements sanitaires et médico-sociaux. Ce travail en partenariat avec la Direction générale de l'organisation des soins tire les enseignements d'une première phase d'explorations menées au sein de 56 structures sanitaires et médico-sociales. En effet, du fait de l'impact sur la qualité de vie et des conditions de travail (QVCT) des professionnels, l'analyse et la prise en compte des retours de terrain ont été jugées indispensables pour répondre aux questions centrales :
- Le numérique en sante? facilite-t-il la coordination et le partage d'informations au sein d'une structure ?
- Quel intérêt les professionnels portent-ils au sujet numérique ?
- Quels usages en font-ils et quels en sont les impacts sur les organisations ?
- L'accompagnement et la formation a` l'utilisation des outils numériques sont-ils suffisants, au regard de l'impact de l'usage de ces derniers sur la QVCT des professionnels ?
Le DUI : des usages peu développés
L'analyse de l'Anact a balayé l'ensemble de la transformation numérique, dossier patient informatisé (DPI) ou dossier usager informatisé (DUI) d'abord, mais aussi, outil de e-learning, dispositifs d'automatisation de tâches, messageries sécurisées, etc. Avec un constat sévère sur l'intégration du DUI dans le médico-social avec des usages peu développés (voir focus Aract Bretagne) : il apparaît davantage comme un rouage technique du système d'information numérique que les professionnels alimentent et moins comme un outil en réponse a` leurs besoins. Des promesses techniques à la réalité du travail, les technologies numériques « apparaissent davantage encastrées qu'intégrées aux organisations et conduisent davantage à des contournements qu'au développement de nouvelles façons d'agir », résume-t-il.
Avec une question centrale qui interroge l'avenir : quels moyens sont mis à disposition des structures « pour gérer simultanément le temps long des transformations du travail et le temps court de l'activité de soin et d'accompagnement » ? Si les fondements techniques du numérique en santé font l'objet d'une ambition forte et d'un engagement des institutions, « la fragilité des fondements organisationnels empêche son appropriation sur le terrain au service des professionnels ». Il s'agirait certainement de reconsidérer la place et le rôle de ces derniers, au-delà du statut d'utilisateurs, de développer des capacités d'attention au travail, de soin du travail, et pour cela soutenir la possibilité d'un dialogue social technologique de qualité.
Cette approche du numérique en santé par les conditions de travail fera l'objet d'une seconde publication courant 2024.