La chronique du mois dernier interrogeait le degré de prise de conscience de la société envers les enjeux de prévention.
Pas de société de la longévité sans priorité à la prévention
L'étude citée le mois dernier montrait la conscience qu'ont les Français des enjeux de santé et de prévention. Ainsi, 98 % insistent sur l'importance de l'accès au soin (41% trouvent cela très utile, et c'est le cas de 65 % des plus de 65 ans[1]).
L'attention à l'alimentation, la pratique de l'activité physique adaptée auprès des seniors comme des personnes touchées par un handicap, le recours croissant à certaines médecines complémentaires (avec parfois des risques de dérives) sont des exemples des évolutions de comportements en cours. Avec des résultats positifs en termes de qualité de vie, d'estime de soi comme de qualité du lien social. Dans une logique de proximité, de nombreuses communes développent des actions de prévention auprès des habitants, de tout âge, fragiles ou non.
De même, mutuelles, assurances et institutions de prévoyance prennent de plus en plus en considération les questions de prévention.
Les mutuelles se distingueront par leur capacité d'innovation en termes de prévention, de remboursement, de médecines complémentaires, de soutien à l'activité physique adaptée, d'implication dans le bien-vieillir, de soutien aux aidants... Le plan « anti-chute » lancé par le gouvernement est un exemple d'une mobilisation croissante de politique de prévention. La société civile prend conscience de ce nouvel horizon, de cette ardente obligation, de l'intérêt collectif et individuel à s'inscrire dans une culture de la prévention.
La société de la longévité impose de réinventer la protection sociale en faisant la part belle à la prévention pour mieux impliquer les individus et soutenir l'autonomie des personnes mais aussi dans une logique d'économie des ressources. Investir aujourd'hui dans la prévention, c'est économiser demain sur les prestations.
La société de la prévention s'inscrit dans la logique du care
L'enjeu concerne notre capacité à penser une société habitable, à utiliser les technologies pas seulement pour aller plus vite et plus loin, mais parfois pour aller plus doucement, plus lentement... La prévention, c'est aussi adapter les technologies comme les services aux usages réels, aux besoins exprimés, y compris par des personnes qui prennent de l'âge, par des personnes fragiles, par des personnes pour qui le lien humain est essentiel.
Les Français ont fort bien intégré la notion de care environnemental ou de « one health ». Toujours selon l'enquête Elabe, 89 % déclarent que mener des actions pour protéger l'environnement est utile pour rester le plus longtemps possible en bonne santé.
Rappelons que la société de la longévité est source d'innovations, de qualité de vie, de création d'emplois, de lutte contre le réchauffement climatique, d'inventions d'un pays plus attentif et adapté à la fragilité des êtres vivants et de l'environnement. Cette France qui prend des rides interpelle l'ensemble du corps social. La perte d'autonomie inquiète 71% des Français. Les plus de 65 ans à 80 %, mais aussi les 18-50 ans à 62 %. La perte de capacités mentales angoisse 61% des Français et 72 % des plus de 65 ans.
Pour autant, les Français restent confiants : jeunes et seniors se retrouvent dans une même conviction (à 85 et 84 %), que dans les années à venir, il sera possible de vivre plus longtemps en bonne santé[2].
Et la crainte de vieillir n'est pas une question de (grand) âge. Les 18-24 ans sont 60 % à craindre de vieillir, pour seulement 40 % des plus de 65 ans...
@Guerin_Serge
Professeur à l'INSEEC GE. Derniers ouvrages, « Au service de la vie. Les métiers du service à la personne », Fauves 2021, et « Les Quincados », Calmann-Lévy, 2019.