Depuis le 14 mars 2022, l'Ehpad Maison Fleurie de l'hôpital de Pithiviers (Centre-Val de Loire) a ouvert un Pôle d'activités et de soins adaptés (PASA) de nuit, le premier de la région. Accessible sur prescription, il offre une prise en charge non médicamenteuse aux résidents présentant des troubles modérés du comportement.
PASA de nuit : pour une continuité d'accompagnement
« Au sein de notre Ehpad, nous accueillons 136 résidents, dont plus de 70 % présentent des troubles neurocognitifs évolutifs », explique le Dr Marie-Claude Pocquet, médecin coordonnateur de la structure. Pour répondre à leurs besoins spécifiques, l'Ehpad a d'abord ouvert un PASA de jour en 2013, labellisé depuis 2014 par l'agence régionale de santé (ARS) et le Conseil départemental. Cependant, certaines personnes âgées présentent aussi des troubles nocturnes du comportement (déambulation avec risque de chutes, bouffées d'angoisse, anxiété, troubles du sommeil, cris, agitations). « Jusqu'à présent, l'offre de l'Ehpad ne leur était pas adaptée. Leur agitation nocturne rendait leur endormissement difficile et gênait le sommeil de l'ensemble des habitants, souligne le médecin. Pour assurer une continuité des soins et de la prise en charge entre l'offre de jour et l'accompagnement de nuit, nous avons demandé à l'ARS l'autorisation d'ouvrir un PASA de nuit. » Le cahier des charges des PASA est décliné dans le plan Alzheimer 2008/2012 à la mesure 16. Les établissements doivent le respecter pour bénéficier de financements publics. Depuis 2022, l'Ehpad de Pithiviers dispose d'un budget de 96 600 euros par an, pour trois ans, à titre expérimental.
L'intégration dans le PASA
Pour intégrer le PASA de nuit, les personnes âgées doivent être valides et présenter des troubles modérés du comportement. « Aujourd'hui, une quinzaine de personnes y a accès sur prescription », indique le Dr Pocquet. Les locaux du PASA, ouverts de 19 heures à 5 heures, sont organisés autour d'une grande salle possédant une cuisine, des salles d'activité et de repos, ainsi que des toilettes. Les résidents y sont accueillis dès 18h30 pour le repas du soir, en tenue de nuit, afin de matérialiser le chemin progressif vers le coucher. Un dîner thérapeutique peut leur être proposé, pour réapprendre, en petit comité, une certaine autonomie dans la prise des repas. « Souvent, ils ne restent pas à table, ils doivent constamment déambuler, informe le Dr Pocquet. Apprendre à s'autonomiser leur permet ensuite de réintégrer la salle à manger commune. »
En cas de problème la nuit, l'aide-soignante sollicite l'assistante de soins en gérontologie (ASG), qui va alors guider la personne âgée jusqu'au PASA. « Elle y est prise en charge une partie de la nuit, jusqu'à ce qu'elle se sente apaisée et se rendorme tranquillement », fait savoir le Dr Pocquet, précisant que le flux des résidents varie au cours de la nuit. Durant les premières heures de la soirée, l'ASG peut avoir à accompagner quatre à cinq personnes, puis au petit matin, deux ou trois, c'est variable.
Une prise en charge non médicamenteuse
Pendant la nuit, les résidents se voient proposer au sein du pôle, par l'ASG, des activités propices à l'endormissement. L'objectif est de réduire les crises, en diminuant notamment le recours aux traitements (neuroleptiques) et en limitant les contentions, tout en sécurisant le sommeil des autres habitants.
L'ASG, qui intervient seule, aidée des équipes de nuit de l'Ehpad si nécessaire, dispose de matériels adaptés : des poupées d'empathie pour calmer et apaiser les tensions, des coussins musicaux, le phoque émotionnel PARO, des fauteuils d'endormissement ou encore un équipement Snoezelen. Ensemble, elles peuvent aussi plus simplement discuter ou jouer aux cartes en début de soirée tout en bénéficiant de collations gourmandes. L'ASG propose également des temps d'ergothérapie, de psychomotricité, de neuropsychologie, d'art-thérapie. « L'une de nos ASG est formée en réflexologie et toucher massage, précise le médecin. Je l'autorise à y avoir recours si les résidents en manifestent le désir. » Elle est aussi en cours de formation à l'aromathérapie. « Nous sommes ouverts à toutes formations complémentaires pouvant améliorer les prises en charge, surtout si elles sont non médicamenteuses », rapporte le médecin. « Il ne s'agit pas d'animation mais bien d'activités thérapeutiques », précise Marie-Estelle Secondi, la directrice de l'Ehpad.
Une bonne évaluation
Les résidents sont régulièrement évalués via l'inventaire neuropsychiatrique (NPI), afin de déterminer si leur situation s'améliore. Si tel est le cas, leur prescription s'achève. « Depuis que nous avons mis en place le PASA de nuit, les nuits sont beaucoup plus calmes car ceux qui pouvaient perturber le sommeil des autres sont désormais pris en charge dans un lieu spécifique », indique le Dr Pocquet. La qualité de vie au travail des professionnels de l'Ehpad s'en trouve également améliorée, puisqu'ils n'ont plus à gérer des résidents présentant des troubles modérés du comportement.
L'expérimentation d'une durée de trois ans devrait être renouvelée l'année prochaine en fonction du rapport d'activité produit par l'Ehpad, élaboré sur la base d'indicateurs fixés par l'ARS : limiter les troubles du comportement nocturnes des habitants, réduire les crises d'anxiété, les chutes et les déambulations, diminuer le recours aux traitements médicamenteux à risque iatrogène, réduire le recours aux contentions ainsi que les appels itératifs la nuit, sécuriser les personnes âgées et améliorer les conditions de travail du personnel soignant. Les premiers éléments d'évaluation font état de résultats prometteurs.