Dans cette période délicate, la tentation de la résignation est forte. Tentons l'imagination!
Penser les territoires républicains
Prenons par exemple le chemin des territoires. D'abord pour une raison de mécanique sociale qui veut que plus le monde s'élargit et se durcit, plus nous avons besoin d'un ancrage culturel, de lien social, de sécurité. Ensuite, parce que le soutien, vital, au développement économique et à l'emploi passe par des politiques de proximité prenant en compte les besoins locaux et le type de qualification des populations.
Il importe que le territoire ait une envergure suffisante afin que des mutualisations soient pertinentes et efficaces. Enfin, plus le territoire concerné sera homogène et à dimension humaine, et mieux ce sera un espace pertinent pour expérimenter, tenter, innover, inventer une société qui soit plus économe des ressources naturelles et des deniers publics, tout en permettant d'accompagner les personnes en fragilité, en particulier les personnes très âgées, dont le nombre va tripler dans les 30 ans qui viennent.
Face aux ruptures que nous vivons, l'invention d'une nouvelle manière d'aborder le territoire paraît essentielle. La mondialisation n'a pas aboli les frontières (c'est même l'inverse avec le réveil des nationalités) mais a réduit la capacité de protection et de sécurisation de l'avenir des Etats. Dans une période mouvante, illisible et insécure, définir un territoire d'équilibre assez grand pour permettre de mobiliser des moyens humains diversifiés est un point central. Contrairement aux représentations véhiculées par les médias la grande majorité de la population reste peu mobile: ni l'envie, ni l'intérêt, ni l'opportunité. C'est dans les territoires de proximité que se construisent les solidarités - en particulier familiales et entre proches - les liens sociaux, les dynamiques de coopération...
D'ailleurs, la démocratie, la confiance dans l'autre, ou encore les solidarités ont besoin de temps pour se construire. Des populations trop mobiles sont difficilement disponibles pour des pratiques ou des projets collectifs. Et leurs capacités de produire de la solidarité de proximité sont faibles.
Les choses bougent. Face à la transition démographique, en termes de besoins des populations et d'opportunités de développement (silver économie), le développement de structures comme le Gérontopôle des Pays de Loire marque bien cette nouvelle approche territoriale où l'ensemble des acteurs d'une filière se retrouvent et coopèrent. De même, le réseau Villes Amies des Ainés regroupe des communes et autres collectivités territoriales qui développent et mutualisent une démarche globale de prise en compte de la dimension senior. De leur côté des Départements multiplient les initiatives comme en Essonne (voir entretien avec J Guedj dans Géroscopie de septembre) où un service public des maisons de retraite a été mis en oeuvre, ou dans la Nièvre qui à travers la dynamique "Bien vieillir en Nièvre" stimule et fédère quantités d'initiatives en direction des seniors.
Dans un monde où les moyens publics vont continuer de se raréfier, l'avenir se joue sur les territoires et passera par la mutualisation des services, la coopération entre les acteurs de proximité et l'innovation technique et sociale.