Dossier privilégié du président de la République, le plan Alzheimer fête ses quatre ans. Points de vue et expériences contrastées.
Plan Alzheimer : Quatre ans déjà
" Un travail exemplaire ", " un effort d'1,6 milliard d'euros ", un modèle " regardé avec attention dans le monde entier "... Le 1er février dernier, le président Nicolas Sarkozy a fait un bilan élogieux des quatre années du Plan Alzheimer.
" Le plan Alzheimer est une très belle initiative mais qui n'avait pas de financement propre, commente Florence Arnaiz-Maumé, déléguée Générale du SYNERPA (Syndicat National des Établissements et Résidences Privés pour Personnes Âgées). La somme de 1,6 milliard représente des crédits non dépensés du Plan Solidarité Grand Age, qui auraient dû contribuer au renouvellement des conventions tripartites... " La FNADEPA (Fédération Nationale des Association de Directeurs d'Établissements et de Services pour Personnes Âgées) est du même avis. " Plutôt que d'ajouter des places, il aurait été préférable d'ajouter des moyens en personnel ", complète Françoise Toursière, directrice.
Il faut toutefois reconnaître les aspects positifs : création des MAIA, de la formation d'assistant de vie en gérontologie, des unités adaptées pour les patients souffrant de troubles comportementaux (mesure 16). Au 1er février 2012, 486 PASA (Pôle d'Activités et de Soins Adaptés) et 118 UHR (Unité d'Hébergement Renforcé) fonctionnent. 185 PASA et 36 UHR attendent visite de conformité ou fin des travaux pour commencer. " Beaucoup d'établissements avaient déjà des unités dédiées mais il y avait un fort besoin de restructuration, reconnaît le SYNERPA. Les directeurs dont les PASA fonctionnent sont satisfaits. Toutefois les cahiers des charges sont très contraignants et freinent les bonnes volontés. " " Beaucoup de directeurs d'EHPAD regrettent de ne pas pouvoir mutualiser PASA et accueil de jour ou PASA et unité dédiée Alzheimer, remarque-t-on à la FNADEPA. Les financements des PASA sont insuffisants et obligent à mobiliser des personnels de l'EHPAD. Ces dispositifs ne représentent pas la manne financière annoncée. " Une labellisation permet toutefois de faire avancer les dossiers en suspens : signature de la convention tripartite 2, extension,...
Un Plan Alzheimer 2 ?
Reste la question de l'avenir. Aux dires des professionnels, il faut impérativement un Plan Alzheimer 2. Les crédits existent puisque les objectifs (1 800 PASA et 360 UHR...) ne sont pas atteints. Ce plan 2, s'il voit le jour, devra reconnaître la pertinence des établissements 100 % Alzheimer et autoriser les unités à accueillir les non-résidents. " Les 850 000 personnes malades, leur famille et les 250 000 nouvelles personnes diagnostiquées chaque année auront toujours les mêmes besoins fin 2012 et demandent une réforme de la prise en charge financière de la dépendance ", conclut souligne Marie-Odile Desana, présidente de France Alzheimer. Le 1er février, Nicolas Sarkozy a été clair : il n'entamera cette réforme que quand il aura " les moyens de la financer de façon crédible ".
Témoignage
" Un outil fabuleux ! "
EHPAD Beth Seva (Groupe Oméris) - Villeurbanne
" Le PASA ? Un outil fabuleux mais que les autorités ne permettent pas vraiment de financer ! " Tel est l'avis de M. Zeitoun, directeur de l'EHPAD Beth Seva (Groupe Oméris), à Villeurbanne.
Le directeur de cet établissement de 48 lits sait de quoi il parle. Il y a 18 mois, le problème de la prise en charge des résidents " Alzheimer " était entier. " La dépendance augmentait de mois en mois et sans renouvellement de la convention tripartite, les moyens étaient insuffisants pour une prise en charge personnalisée des résidents, désorientés ou non ! ", explique le directeur. Aussi le projet trouve-t-il un écho très favorable auprès des équipes, qui planchent pendant un an sur le dossier.
Le PASA a été pré-labellisé le 19 décembre dernier. Il a conduit à transformer un des quatre étages de l'immeuble : déplacement des cloisons, construction, sur une terrasse inutilisée, d'une véranda de 40 m² - sur vérins ! - avec jardin paysager,... Fabuleux, l'outil l'est assurément : au bout d'un mois, les équipes notent un apaisement des comportements des résidents désorientés.
Côté financement, le ton est moins enthousiaste. Pour trouver les 180 000 euros nécessaires, M. Zeitoun s'est adressé à la CNSA, laquelle a accordé 38 000 €. Le reste provient d'un emprunt auprès des partenaires financiers. Le dispositif ne permet toutefois pas l'équilibre financier. " La dotation est de 4 500 euros par place et par an. Elle ne couvre donc que le nouveau poste d'aide-soignante, insiste M. Zeitoun. Il faut aussi financer une psychomotricienne à mi-temps, 10 % d'ETP de psychologue, les interventions d'un art-thérapeute... sans pour autant augmenter le prix de journée, fixé à 97 €. Comment faire ? " Une lueur d'espoir pourtant : " La loi dit qu'un établissement disposant d'un PASA est prioritaire au renouvellement de la convention tripartite ! ", rappelle le directeur. À suivre...
Témoignage
Entre objectif national et environnement local
Montagney - Haute-Saône
Avec un rez-de-chaussée surélevé sur jardin et un projet bien ficelé, l'EHPAD Notre-Dame des Cèdres (72 résidents, GMP 855, PMP 182) avait tout pour obtenir un PASA. Le budget de l'établissement tenait la route. Les 344 000 euros devaient être couverts par le PAI, le Conseil Général, l'autofinancement, le tout sans impacter le prix de journée *. Le Crédit Agricole avait même donné une subvention de 2 000 euros... " La CNSA nous a accordé 124 000 euros au titre du plan d'aide à l'investissement et l'ARS a validé le projet cet été ", résume la directrice.
Pourtant en ce mois de février, les travaux n'ont pas commencé. " Compte tenu des difficultés financières que le département connaît, le Conseil Général a donné un avis défavorable, répond Hélène Le Mercier. Il nous manque donc 50 000 euros, qui devaient financer la construction d'un ascenseur extérieur. Nous sommes très déçus. " Toutefois, la directrice garde espoir. Actuellement en négociation sur son budget 2012, elle espère bien un retournement de situation.
Repères
Prix de journée : 67,18 en chambre individuelle - 61,07 en chambre double
Tarif dépendance : GIR 1-2 : 19,68 - GIR 3-4 : 12,49 - GIR 5-6 : 5,30