Nous avons rencontré Alain Lecerf, directeur de l'Arefo et de l'Arpad, une organisation associative gérant 37 EHPA et 19 EHPAD.
Pour le maintien et l'extension du "forfait soins courants" à l'ensemble des EHPA
Qu'attendez-vous des commissions sur le logement foyer et les logements intermédiaires?
Nos établissements relèvent de réglementations différentes: le code de la construction et de l'habitation (CCH) et le code de l'action sociale et des familles (CASF). Nous sommes confrontés, et parfois malmenés, depuis de trop nombreuses années, à cette double réglementation, peu lisible pour le grand public. Ceci est essentiel pour tous les gestionnaires car cela impacte aussi bien le statut du résident que le contrat de séjour, la tarification, avec son contenu (notamment les prestations obligatoires et/ou prestations annexes).
Dans le cadre de la préparation du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement, la DGCS a souhaité poursuivre les travaux engagés dans un passé déjà lointain et anime depuis le mois de mars, un nouveau groupe de travail sur deux thèmes essentiels,
des préconisations d'évolution du cadre normatif des logements foyers
les autres formes d'habitat intermédiaire pour les personnes âgées.
L'accompagnement social et médico-social des personnes vieillissantes se caractérise en France par un clivage entre le " tout domicile diffus " et le " tout EHPAD ". Or, d'ici à 2030, on estime à +1,5 million la croissance du nombre de personnes âgées de 85 ans et plus à autonomie maîtrisée. Plusieurs observateurs invitent, ainsi, l'État à soutenir le développement de formules d'habitat intermédiaire pour accueillir une partie de cette population qui en exprimerait le besoin et ce pour divers motifs bien connus (rapprochement familial, sécurisation, lien social, "le vivre ensemble"). Ces structures jouent en effet un rôle essentiel en matière de prévention de la perte d'autonomie : elles permettent de développer le soutien et le maintien au domicile, ou au substitut de domicile, et de retarder l'entrée en EHPAD.
En fonction de sa situation, chacun doit avoir la liberté de choix. Entre le domicile diffus et des solutions extrêmes type EHPAD et/ou long séjour, il doit exister d'autres offres: logements foyer, habitat intermédiaire (lieux d'habitat collectif, de partages, de services), accueils de jour, hébergement temporaire, prenant en compte le degré d'autonomie ou de pathologie.
Toutes ces structures jouent en effet un rôle essentiel en matière de prévention de la perte d'autonomie: elles permettent de développer le soutien et le maintien au domicile, ou au substitut de domicile, et de retarder l'entrée en EHPAD.
L'avenir des logements foyers
Si la pertinence de ce type d'habitat dans l'offre gérontologique de proximité et le parcours résidentiel, son inscription dans la filière gérontologique, n'est plus à démontrer, il convient aujourd'hui de lever les freins à leur essor.
Les gestionnaires réaffirment leur volonté de maintenir les logements foyers dans leur vocation sociale d'habitat intermédiaire entre le domicile diffus et l'EHPAD, mettant en oeuvre une offre de vie et des services adaptés et de qualité à des personnes âgées à autonomie maîtrisée.
Cela ne peut-il pas créer des difficultés de gestion?
Cela va nécessiter des efforts, des adaptations supplémentaires de nos établissements. Cela doit passer par de nouveaux partenariats, des remises à plat de nos pratiques, davantage de travail en réseau, davantage de coordination: avec les services à domicile, les SSIAD, les différents acteurs des quartiers.
La prévention du vieillissement ou du mauvais vieillissement est désormais plus que jamais à l'ordre du jour. Sur ce point, nous sommes très heureux du fonctionnement, dans 8 de nos établissements, du " forfait soins courants''. Aujourd'hui sur les 2500 logements foyers existants 10% bénéficient de ce conventionnement. Cela correspond pour l'assurance maladie à une ligne financière de 4€/résident/jour, qui nous permet d'effectuer un travail de prévention, d'écoute et de présence. Cet outil passe par l'embauche d'une infirmière à mi-temps, d'aides-soignants à temps partiel. Il s'agit de prendre soin. Cela génère bien évidemment des économies pour la sécurité sociale. Il permet d'avoir des référents pour les intervenants extérieurs, notamment les services à domicile. Les gestionnaires de logements foyers souhaitent son maintien mais en outre son extension à l'ensemble des logements foyers de France. Loin de vouloir faire de ces établissements des lieux de soins, ils mettent en avant les bénéfices de ce dispositif.
Enfin, sur l'essor des résidences avec services:
Des résidences avec services pour seniors et autres formules innovantes d'habitat, souvent intergénérationnellesse développent aujourd'hui à l'initiative d'opérateurs immobiliers, en marge de la loi 2002-2. Certaines de ces structures offrent des prestations très proches de celles des logements foyers (locaux collectifs, services), mais elles échappent néanmoins à l'encadrement de la réglementation sociale et médico-sociale: régime d'autorisation, (CCH, CASF), habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale, planification, évaluation de la qualité, etc.
Les personnes âgées accueillies dans ces établissements ont en outre le statut juridique de locataires et non d'usagers, soumis à des contrats différents de ceux des logements foyers.
Soumettre ces structures au régime du code de l'action sociale et des familles risquerait de brider l'initiative privée et l'innovation. A l'inverse, l'absence de régulation pourrait susciter, à termes, des difficultés en termes d'adéquation de l'offre aux besoins et de qualité des prestations.
Pour les acteurs du secteur social et medico social, cela reviendrait à avoir des régimes différents. Celui qui impose des règles en favorisant la cohésion et la cohérence sur un territoire mais aussi l'équité et la solidarité, et celui du libre marché.
Le législateur pourrait alors permettre l'existence de ces deux régimes juridiques distincts avec un socle commun d'exigences sur l'évaluation de la qualité.