Pour quelques grammes de plus
Le Professeur Marc Bonnefoy, Chef de service aux Hôpitaux Civils de Lyon, fait un point sur la dénutrition du sujet âgé. Au menu : dépistage, diagnostic, traitement et prévention.
Entre mobilité réduite, problèmes bucco dentaires, handicaps et troubles psychologiques, les risques de dénutrition des personnes âgées sont élevés. " En EHPAD, il faut penser à évoquer la dénutrition très tôt. En effet, entre 20% et 30% des personnes vivant en institution sont dénutries, affirme le Professeur Marc Bonnefoy, Chef de service au Centre Hospitalier Lyon-Sud (Hôpitaux Civils de Lyon) et spécialiste de la dénutrition gériatrique. Il faut donc dépister, diagnostiquer, mettre en place des solutions,... et une politique de prévention. "
Mais qu'est-ce d'abord que la dénutrition ? " La dénutrition résulte d'un déséquilibre entre les apports et les besoins protéino-énergétiques de l'organisme, résume le Professeur. En d'autres termes, les apports sont inférieurs aux besoins. " La dénutrition est diagnostiquée quand le résident répond à un des quatre critères définis spécifiquement pour les personnes de plus de 70 ans par la HAS (Haute Autorité de Santé) : perte de poids comprise supérieure à 5% en un mois ou à 10% en six mois, IMC (Indice de Masse Corporelle ) inférieur à 21, score sur l'échelle MNA (Mini Nutritional Assessment) inférieur à 17, taux d'albumine inférieur à 35g/litre.
Il s'agit ensuite de comprendre l'origine de la dénutrition. " De façon schématique, on distingue deux catégories de causes, une carence d'apport, due à une pathologie digestive, un problème bucco-dentaire, un état dépressif,... ou un problème de catabolisme, enchaîne le Professeur Bonnefoy. Dans ce dernier cas, en raison entre autres de facteurs inflammatoires, l'organisme n'utilise pas suffisamment les apports. "
Pour éviter d'en arriver là, la prévention s'impose, qui passe par des apports caloriques et protidiques suffisants et équilibrés. " 30 kcalories par jour et par kg (1 800 kgcalories pour une personne de 60 kg) et 1 gramme de protide par jour, précise le spécialiste lyonnais. En dessous de 0,8 g, la masse musculaire diminue. 200 kcal/jour sont nécessaires pour fabriquer les 300 grammes de muscles renouvelés chaque jour ! " L'enjeu est de taille : préservation de la mobilité et donc de la qualité de vie, moindre risque de chutes,...
L'évaluation des apports peut être faite par une diététicienne ou par les soignants : il suffira alors de noter la part du repas ingérée par le résident : ½, 1/3, ¼,... en relevant les aliments consommés : viande, légumes, féculents,...
Que faire si malgré tout la dénutrition est constatée ? " Mettre en place une alimentation enrichie en calories (fromages, crèmes,...), répond le Professeur Bonnefoy. Si cette alimentation s'avère insuffisante, ajouter des compléments alimentaires de type compléments hyper-protéinés hypercaloriques ou envisager temporairement la nutrition entérale (par sonde) en cas de risque important. En cas de dénutrition sévère, il faut aussi toujours penser à écarter une cause médicale : une pathologie cancéreuse peut être sous-jacente. " Autant de conseils qu'on consommera sans modération.
Marie-Suzel Inzé