Les Ehpad ne verront pas les dépenses de médicaments intégrer leur dotation Soins. Entre méthode d'évaluation incertaine et incohérence des politiques publiques, la profession s'étonne.
Quand "expé" rime avec perplexité
L'expérimentation initiée en 2009 sur l'introduction de la dépense de médicaments dans les dotations des EHPAD ne disposant pas de pharmacie à usage intérieur n'a pas permis de faire émerger des éléments suffisamment concluants pour poursuivre cette démarche. Fondées sur une observation d'un mois et un échantillon miroir dont la composition échappe à tous, les conclusions du ministère laissent songeur le directeur général délégué du Noble Age. " C'est dommage de renoncer. Le pilotage du bon usage des médicaments par les Ehpad avait de nombreux avantages, explique Willy Siret. Il simplifiait la vie des familles, réduisait leurs frais et responsabilisait les Ehpad. A ce jour, les établissements ne sont pas impliqués dans la gestion du médicament : ils ne prescrivent pas, ne connaissent pas les coûts, n'ont pas de droit de regard : dans les cas extrêmes, certains résidents prennent plus de 15 molécules quotidiennes différentes ! En intégrant les médicaments, on pouvait mener une réflexion plus globale pour améliorer la prise en charge. " Dans ce groupe où les établissements ont joué la carte du forfait global soins - tant que cela a été possible-, on s'étonne aussi de cette décision alors que l'enjeu consiste bien à optimiser le parcours de santé de chaque résident tout en contribuant à la maîtrise des dépenses de santé. " La LFSS 2013 prône une logique de filière, poursuit Willy Siret. Pourtant les Ehpad, qui vont se médicaliser de plus en plus, et les établissements sanitaires fonctionnent sur des modèles différents en matière de gestion des médicaments ! Enfin, comment les Ehpad peuvent-ils faire avancer les thérapies non-médicamenteuses si ils ne sont pas responsables des thérapies médicamenteuses ?" En attendant, les deux établissements expérimentateurs du Noble Age doivent faire machine arrière. Reste à savoir comment les familles, et les salariés investis dans cette démarche, vont prendre la nouvelle.
" Je suis en-dessous du budget donné par l'ARS "
Jean-Marc Vénard, directeur de l'Ehpad les Jardins de Matisse (Seine-Maritime)
" En incluant les honoraires du pharmacien référent, les dépenses de médicaments sont passées de 5,41 euros par jour/résident à 4,56 euros. Je suis en dessous du budget donné par l'ARS.
Le volet médicament est désormais bien pris en compte. Nous avons mis en place un pharmacien référent, qui a travaillé avec le médecin-coordonnateur, sur l'iatrogénie. Le binôme a aussi oeuvré avec les médecins-traitants pour mettre en place les pratiques professionnelles recommandées par l'ARS. Certains médecins-traitants prescrivaient encore trois médicaments pour la maladie d'Alzheimer...
Nous allons garder le livret thérapeutique, les bonnes relations avec le pharmacien et les médecins-traitants. Je ne comprends pas les résultats globaux. Les remboursements des mutuelles ont-ils été pris en compte ? De plus, la décision a été prise d'après un échantillon miroir et sur une période d'un mois seulement, il aurait fallu regarder sur deux ans. "