En poste depuis le 2 janvier 2018, Zaynab Riet est la nouvelle déléguée générale de la FHF. Pour Géroscopie, elle accepte de revenir sur les projets et perspectives du secteur public. Interview.
Quelle place souhaitons-nous donner à nos aînés ? Est-ce une place à part entière ou une place entièrement à part ?
Au bout de 5 mois, comment trouvez-vous la FHF ?
Zaynab Riet : Tout d'abord, il faut rappeler que la FHF existe depuis 1924.Elle représente l'ensemble des acteurs publics, qu'ils soient du champ sanitaire ou médico-social. Elle est reconnue pour son expertise et sa capacité à influer sur les politiques publiques en matière de santé. Elle se doit d'être avant-gardiste dans ses propositions et dans les orientations qu'elle souhaite donner système de santé et médico-social. La FHF est une association constituée de permanents autour de 7 pôles d'expertises (ressources humaines, finances, prospective et relations internationales, autonomie,offre de soins,communication, secrétariat général). Elle s'appuie sur ses pôles d'expertise, ses organes politiques nationaux et sur ses fédérations régionales qui nourrissent les réflexions et propositions et remontent les problématiques territoriales. C'est cet échange constant, dans la transversalité, qui fait la richesse et la spécificité de la FHF. Cette organisation motivée, dynamique, volontariste s'attache à promouvoir et défendre les établissements publics sanitaires ou médico-sociaux pour développer une offre publique de santé qui réponde aux besoins des populations sur les territoires. C'est d'ailleurs à ce titre que nous avons décidé de décliner des stratégies par les territoires puisque nous considérons que chaque territoire a ses propres besoins sur lesquels il convient d'adopter des réponses spécifiques, populationnelles, cliniques avec l'ensemble des acteurs de santé.
Comment les GHT travaillent-ils avec les EHPAD publics ?
Le GHT est un outil de coopération et de mutualisation au service de la stratégie de groupe public. Cela permet aux acteurs sanitaires ou médico sociaux de s'organiser sur les territoires, de travailler ensemble pour up grader les parcours de santé des personnes, notamment ceux des plus fragiles qui restent souvent les plus chaotiques, mais aussi de mutualiser un certain nombre de fonctions comme les fonctions support. Pour autant, cela n'empêche pas d'adopter sur les territoires une approche clinique, par parcours, par filière qui fait intervenir d'autres acteurs, avec lesquels il faut mettre en place des coordinations.
Les établissements médico-sociaux ont sur les territoires une expertise, une connaissance et un savoir-faire, et ce particulièrement en ce qui concerne le grand âge polypathologique et le handicap. C'est à eux de s'assurer que la place du grand âge est bien prise en compte pour améliorer le parcours de santé de ces personnes les plus fragiles. On ne pourra pas optimiser les parcours si on n'intègre pas l'expertise de ces acteurs.
Par ailleurs, nous avons mis aujourd'hui à l'agenda politique la question du grand âge. On peut se réjouir de l'allongement de la durée de vie mais cela nécessite un accompagnement et des services adaptés, et impose de reposer la question du financement et du reste à charge. La FHF a eu le mérite d'ouvrir le débat et souhaite s'y investir. C'est pourquoi la stratégie de groupe public est fondamentale pour permettre sur les territoires de s'organiser entre établissements médico-sociaux pour proposer des accompagnements innovants ou gradués et des plateformes de services.
Que pensez-vous des pistes évoquées par Emmanuel Macron sur le financement de la perte d'autonomie ?
Il y a un véritable enjeu de société. Quelle place souhaitons-nous donner à nos aînés ? Est-ce une place à part entière ou entièrement à part ? Le président de la République s'est prononcé. Pour nous, c'est extrêmement prometteur mais il faudra que le sujet soit abordé dans toutes ses dimensions : sociétales, culturelles, opérationnelles. Et sur le plan financier, le reste à charge est difficilement supportable pour des catégories de population. La FHF va rouvrir le dossier du 5è risque. Une question de solidarité nationale se pose. Nos réponses seront sûrement plurielles.
La FHF avait annoncé la création d'un Observatoire pour étudier l'impact de la réforme de la tarification. Où en est-il ?
Absolument. Nous l'avons réaffirmé, et ce d'autant plus que la réforme de la tarification 2016 a conduit à pénaliser fortement les EHPAD publics. Nous avons alerté la ministre qui nous a entendus puisque Pierre Ricordeau, le médiateur nommé par Agnès Buzyn, a reconnu que les chiffres avancés par la FHF étaient une réalité.
Nous avons créé un Observatoire qui va permettre de vérifier l'effectivité des nouvelles mesures proposées, à savoir les effets de neutralisation et de compensation de la réforme. Il va donc plus que jamais jouer un rôle important. Il est alimenté par les établissements et relayé par les fédérations régionales.
Nous avons aussi décidé de structurer le fonctionnement de la FHF dans la déclinaison de ses travaux, à la fois pour mieux associer les administrateurs, les élus et en même temps structurer les champs d'activité et les travaux produits. Ces 5 commissions sont basées sur deux principes : quel que soit le sujet, il est traité par tous les acteurs qu'il s'agisse des professionnels ou des usagers ; par ailleurs, quel que soit le secteur d'exercice, il n'y a pas de cloisonnement. Si nous réfléchissons aux parcours de santé, nous réunissons à la fois les CHU,les CH, les EPS santé mentale, les EHPAD, les usagers, les élus...
Où en sont les établissements médico-sociaux du virage numérique ?
La FHF a bien pris la mesure de l'enjeu numérique. La télémédecine et la téléconsultation sont des apports considérables dans le champ du social et du médico-social. Elles doivent faciliter l'accès aux soins, sans se substituer à l'examen clinique physique quand il est nécessaire. Elles évitent des déplacements. Le virage numérique permet aussi à des équipes distantes de partager des expériences et des pratiques professionnelles. Les GHT, enfin, peuvent permettre d'accélérer le virage numérique. Les acteurs du grand âge vont ainsi pouvoir peser à la fois sur le projet médical et sur les priorités, mais aussi bénéficier de l'ingénierie numérique de l'établissement support, pour les aider à se déployer sur le plan technique. Mais nous appelons de nos voeux un plan d'accompagnement et d'investissement numérique pour les EHPAD.