De nombreuses études révèlent une prévalence importante des troubles psychiatriques et des troubles du comportement au sein des EHPAD. Quelles réponses apporter à l'émergence de ces nouveaux troubles ?
Quelles réponses face aux affections psychiatriques?
87% des résidents d'EHPAD souffrent au-moins d'une affection psychiatrique, pointe déjà en 2007 l'enquête EHPA. Les données présentées par la HAS en 2015 montrent quant à elle que les résidents ont en moyenne 8 pathologies : syndromes démentiels (52%), états dépressifs (40%), troubles du comportement (43%), psychoses-délires-hallucinations (13%).
L'étude plus précise des pathologies selon leur caractère évolutif révèle que 25% des résidents d'EHPAD présentent une poussée aiguë d'une pathologie chronique ou relèvent d'une pathologie chronique non stabilisée dans le registre général des « affections psychiatriques ».
Ces estimations indiquent des parts importantes de résidents présentant des manifestations comportementales perturbatrices en phase dite « productive ».
La prise en charge de ces troubles est encore trop souvent défaillante ou inadéquate et peut conduire à une aggravation des symptômes associée à une dégradation générale des modalités de prise en charge : alourdissement des traitements avec effets iatrogènes, recours aux contentions avec risques de maltraitance, recours inappropriés et inopérants aux services d'urgences, refus d'admission par les EHPAD de personnes aux profils trop « psychiatriques », etc.
Notons également comme problématique générale relative à la prise en soins des personnes âgées, le sous-diagnostic d'un certain de nombre pathologies psychiatriques, en particulier la dépression et les troubles bipolaires, connues pour être insuffisamment repérées et traitées chez les sujets âgés avec des répercussions graves en termes de santé publique (suicide, syndrome de glissement notamment).
Tous les efforts doivent donc être mobilisés auprès des équipes des EHPAD et leurs résidents pour les prévenir et les limiter:
1- « des soins plus pertinents et de meilleure qualité »* notamment pour les personnes âgées chez lesquelles la iatrogénie est une source majeure de recours aux soins
2- Des « réponses aux besoins et (...) modalités de prise en charge (...) pensées autour d'équipes intégrant fonctionnellement, dans le respect des modes d'exercice, la pratique ambulatoire et en établissement » *
3- Une « coordination... » reposant « sur le travail coopératif/collaboratif entre les acteurs sanitaires et médico-sociaux concernés ».*
*Cadre d'Orientations Stratégiques (COS) du Projet Régional de santé (PRS) Ile-de-France 2018-2022.
Pallier à ces nouvelles difficultés
Il s'agit ici d'apporter une réponse concrète aux difficultés rencontrées par les EHPAD dans la gestion des troubles psycho-comportementaux perturbateurs, dont les problématiques sont largement documentées en termes de prévalence, d'enjeux d'accompagnement et de prise en soin, d'impacts sur la qualité de vie des résidents, des aidants et des professionnels. Mais aussi d' « amener l'expertise au pied du lit du malade » pour contribuer efficacement à améliorer l es parcours de soins des résidents, en proposant un accompagnement de proximité des équipes médicales et soignantes des EHPAD.
La formation continue ... encore et encore...
Axe essentiel d'adaptation et de développement des pratiques soignantes en EHPAD, les formations axées sur le repérage des signes de dépression et/ou des troubles du comportement, l'évaluation et l'accompagnement de la détresse psychologique et de la souffrance mentale devraient être systématisées, comme l'utilisation plus généralisée des échelles telles que les mini GDS (GDS : Geriatric Depression Scale) , les NPI-ES, inventaires neuropsychiatriques à destination des équipes soignantes.
L' accompagnement des résidents atteints de troubles psychiatriques requiert un savoir faire psychiatrique, dont la relation d'aide est l'un des actes thérapeutiques et où l'adaptation, l'observation, l'écoute, le soutien, la proxémie, la gestion de crise ne sont pas que des qualités mais de vraies compétences techniques du care.
Les équipes mobiles
Modèle de prise en charge médicalisée sur le lieu de vie de la personne et en lien continu avec les équipes médicales et paramédicales des EHPAD, elles ont pour vocation d'apporter une ré ponse psychiatrique et/ou gériatrique, pour une évaluation globale et des consignes thérapeutiques argumentées.
Elles représentent effectivement une alternative dans une optique :
- De précocité d'intervention au plus près des besoins du résident, afin d'anticiper le plan de soins personnalisé du résident en fonction de sa symptomatologie et de son environnement et améliorer la pertinence et la qualité des soins, notamment en évitant les situations d'urgence ;
- De sensibilisation continue des équipes médicales et soignantes au repérage précoce des troubles du comportement et aux bonnes pratiques de prise en charge par un accompagnement « terrain » suivi : Il peut s'agir de conseils prodigués à l'occasion des interventions sur site ou des démarches régulières d'information/sensibilisées qui peuvent être animées par l'équipe mobile, mais aussi des conseils thérapeutiques prodigués aux prescripteurs, améliorant les pratiques médicales en institution.
- D'aide à l'orientation vers les dispositifs des filières gériatriques et psychiatriques au moyen d'une approche globale et pluridisciplinaire, associant les expertises gériatriques et psychiatriques, les compétences médicales et soignantes ...
La prise en soins géronto-psychiatrique et psycho-gériatrique de Cliniques spécialisées reposant sur un savoir-faire mais aussi un savoir-être spécifique.
Ces cliniques associent la connaissance des affections cognitives et psychiatriques mais aussi un apprentissage de stratégies thérapeutiques comportementales pour la gestion des troubles du comportement, d'outils d'analyse des situations, de techniques interventionnelles propres à dénouer la crise.
Fréderic Signabout
Directeur association Santé Mentale et Environnement, groupe SINOUÉ