La crise sanitaire générée par la Covid-19 a incité à reconsidérer la fonction linge sous un jour nouveau. Car éviter la prolifération des maladies dans les Ehpad implique de respecter des processus exigeants.
Reconsidérer la question des risques
Contrairement à d'autres acteurs économiques, le secteur de la blanchisserie au service des Ehpad n'a pas connu de baisse d'activité pendant la crise sanitaire. « Le traitement du linge d'un résident est intimement lié aux activités de soin. Nous avons fonctionné en continu, en nous adaptant très rapidement à la situation. Heureusement, pour les protocoles d'hygiène, nous étions déjà bien armés », témoigne Thomas Labrunye, PDG de Bulle de Linge, qui a par ailleurs enregistré une hausse des besoins de dépannage pendant le confinement. Une accentuation de la demande liée à trois facteurs : l'impossibilité pour les familles d'entrer dans les établissements et donc de s'occuper du linge de leurs parents ; le besoin de pallier les arrêts maladie et les absences du personnel des Ehpad assurant la blanchisserie en interne et enfin, l'impossibilité de certains fournisseurs, comme les établissements et services d'aide par le travail (Esat), d'assurer leur prestation du fait de la fragilité des collaborateurs. Face à chacune de ces situations, Bulle de Linge a répondu présent : « Le contexte nous interdisait de baisser les bras. Nos équipes se sont senties investies d'une mission particulière. Les applaudissements du soir s'adressaient aussi à elles en tant que support des services de soins », poursuit Thomas Labrunye.
Car cette crise sanitaire est venue rappeler avec force l'importance d'un traitement plus exigeant du linge. Durant la pandémie, les autorités n'ont eu de cesse de rappeler qu'il pouvait être un vecteur de transmission du virus. De nombreuses recommandations ont été édictées et adaptées au fil des mois. De façon plus générale, les problématiques liées à l'hygiène dans les établissements s'installent désormais au coeur des préoccupations. Ainsi, l'Agence régionale de santé Bretagne a annoncé fin 2020 le déploiement d'infirmiers hygiénistes pour accompagner les quelques 511 Ehpad du territoire sur ces thématiques. « Quelques mois avant la crise, nous avions décidé d'alerter les établissements face à l'abandon de cette partie des risques (lire l'encadré), se souvient Thomas Labrunye. Nous servons une population extrêmement fragile pour laquelle la moindre négligence peut être dangereuse ». Particulièrement sensible à cette question, Bulle de Linge a appliqué dès le début de la pandémie le principe de précaution considérant que tout le linge à traiter était potentiellement contaminé. Les consignes de manipulation ont aussi été adaptées - « ne surtout pas le secouer » - afin d'éviter toute contamination aéroportée. L'entreprise a par ailleurs fait revalider très rapidement l'ensemble de ses programmes de lavage dans le cadre de la certification RABC, version 2016. « Nous avons adapté, en collaboration avec nos fournisseurs, les dosages de produits de désinfection et virucides, explique Thomas Labrunye. Les aménagements ont été mineurs car nos normes de certification sont déjà très strictes ».
Constat partagé
Même constat au sein de la société Laverie privée. « Nous avons toujours respecté les normes sanitaires les plus strictes, explique Mathieu Gérard, associé-gérant de l'entreprise. Depuis l'apparition de la Covid-19, nous avons simplement renforcé la surveillance de nos programmes et bien évidemment appliqué les gestes barrières - port du masque, des gants, respect des distanciations physiques... - de manière très rigoureuse ».
Laverie privée, qui propose ses services aux particuliers et aux professionnels, prend en charge tous les vêtements du quotidien avec une tarification du lavage au kilo et du repassage à la pièce. « Notre particularité est d'offrir du sur-mesure, poursuit Mathieu Gérard. Chaque commande est traitée individuellement selon le principe « une personne, une machine ». Nous supprimons ainsi le risque de perte de vêtements et en cette période de crise sanitaire, notre démarche a rassuré les clients qui apprécient que leur linge ne soit pas au contact des affaires de quelqu'un d'autre malgré l'absence de risque sanitaire. Notre offre est par ailleurs personnalisable : les résidents peuvent par exemple choisir le type de lessive ou encore le parfum de l'adoucissant ».
Il évoque aussi l'impact de la crise en matière en lien social : « Dans les Ehpad, ce sont souvent les familles qui font appel à nous. Avant la crise sanitaire, nous avions l'habitude de livrer le linge en main propre aux résidents ; depuis un an, nous le déposons à l'accueil de l'établissement. Les personnes âgées sont tristes. Elles connaissent les livreurs, les appellent par leur prénom. Ces contacts leur manquent ».
Un avant et un après
Apporter une plus grande attention à la fonction linge figurera incontestablement parmi les enseignements de la Covid-19, même si certains établissements sont plus avancés que d'autres dans leurs réflexions et dans leurs pratiques. « La culture de l'hygiène est plus forte dans les Ehpad du monde hospitalier. Il est impossible de travailler avec eux sans certification RABC, version 2016. Tous les établissements doivent aujourd'hui s'en inspirer car le public accueilli est le même. Face à la Covid-19 et à la menace de nouvelles pandémies virales, nous ne pouvons plus attendre », conclut Thomas Labrunye.