La modernisation des logements foyers, renommés « résidences autonomie » est l'un des axes forts de la loi d'adaptation de la société du vieillissement. Prévention de la perte d'autonomie, rénovation du parc : sans un réel « nouveau souffle » financier, il sera difficile pour ces établissements de retrouver leur juste place dans l'écosystème médico-social.
Résidences autonomie : la révolution... sans les moyens
Exit la dénomination - jugée désuète par beaucoup - de « logement-foyer ». Depuis le début 2016, les acteurs du secteur sont priés de parler de « résidence autonomie ». La loi d'adaptation de la société au vieillissement (ASV) du 28 décembre 2015 s'engage en effet à donner un "nouveau souffle" à ces établissements laissés pour compte par les pouvoirs publics ces vingt dernières années au profit du couple domicile/EHPAD. Et non sans conséquences puisqu'entre 2003 et 2011, le parc de ces structures intermédiaires a perdu près de 30 % de ses capacités.
Ce changement de nom acte-t-il un vrai ancrage de ces établissements dans le parcours résidentiel des personnes âgées ? Les résidences autonomie « doivent désormais constituer une réponse efficace dès l'apparition des premières fragilités et surtout une alternative souhaitée aux maisons de retraite médicalisées quand l'âgé est plus autonome que dépendant », promet le Ministère des Affaires Sociales et de la Santé. Pour ce faire, leur mission de prévention de la perte d'autonomie est reconnue et réaffirmée par la loi. Depuis le 1er juillet 2016 - et sous certaines conditions fixées par un décret - les résidences autonomie peuvent se voir accorder un « forfait autonomie » par les départements dans le cadre de la nouvelle « conférence des financeurs ».
Ce forfait est versé sous réserve de la conclusion d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (CPOM) permettant notamment de définir les engagements de la résidence autonomie à assurer les actions individuelles ou collectives de prévention de la perte d'autonomie. Et le menu est copieux : maintien ou entretien des facultés physiques, cognitives, sensorielles, motrices et psychiques ; nutrition, diététique, mémoire, sommeil, activités physiques et sportives, équilibre et prévention des chutes; repérage et prévention des difficultés sociales et de l'isolement social, développement du lien social et de la citoyenneté ; information et conseil en matière de prévention en santé et de l'hygiène ; sensibilisation à la sécurisation du cadre de vie et repérage des fragilités. Ces actions de prévention peuvent être dispensées par un ou plusieurs intervenants extérieurs notamment des animateurs, des ergothérapeutes, des psychomotriciens et des diététiciens, des jeunes en service civique formés à cet effet.
25 millions d'euros pour 2 365 structures
Vaste programme pour prévenir et maintenir les capacités des résidents autonomes et semi-autonomes accueillis en résidences autonomie. Un programme certes ambitieux mais avec des financements sous-dimensionnés. En effet, un arrêté ministériel du 5 avril fixe, pour 2016, une enveloppe de 25 millions d'euros au titre du forfait autonomie pour... 2365 résidences-autonomie, ce qui équivaut à environ 10 000 euros par structure. Le gouvernement avait estimé le besoin de financement généré par ce forfait autonomie à près de 40 millions d'euros par an, soit 438 euros par place. Ce qui devait permettre alors de financer environ 0,5 ETP par établissement. Pour l'heure, on est loin du compte. Si les résidences autonomie sont invitées à mutualiser les actions de prévention, les établissements souvent éloignés les uns des autres en particulier dans les zones rurales auront des difficultés à adhérer à cette option.
Le chantier coûteux de la réhabilitation
Les hommes vieillissent, les murs aussi... Les résidences autonomie datent en majorité des années 1960, 1970 et 1980. Or, ces structures ont longtemps été écartées des dispositifs de financement et notamment du plan d'aide à l'investissement (PAI) de la CNSA. Aujourd'hui, par exemple, 2/3 des 1200 résidences autonomie gérées par des CCAS nécessiteraient de lourds travaux de rénovation ou de réhabilitation, qui risquent de déboucher sur des niveaux de redevance incompatibles avec les revenus des résidents. L'État avait annoncé un investissement de 40 millions d'euros pour redonner une nouvelle jeunesse à ces structures. Le PAI de la CNSA devait être abondé "de manière exceptionnelle pendant trois ans", en lien avec la CNAV, la caisse des dépôts, les collectivités territoriales. Dès 2014, en anticipation du vote de la loi ASV, 10 millions d'euros financés par la CNSA ont ainsi été mobilisés.
Pour autant, seuls 27 dossiers, soit 1 338 logements individuels, ont pu être subventionnés grâce au PAI 2014, sur les 264 dossiers de demande reçus. Mais en 2015, la CNSA a débloqué seulement... 2,9 millions d'euros pour financer les projets de rénovation. La CNAV et la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) ont lancé, en 2014, une enquête nationale « cadre-bâti » auprès des logements-foyers avec la Scet (filiale de la Caisse des Dépôts), "afin de mieux connaître les besoins financiers pour la réhabilitation du parc et « permettre une analyse pertinente des attentes en matière de politique publique (type de financement, mode d'allocation des ressources, répartition territoriale...) ». Les résultats de cette enquête étaient attendus pour avril 2016. Une enquête qui permettra de reposer à nouveau la question des moyens financiers indispensables pour redonner un souffle certain et durable aux résidences autonomie.