Les résidences-services trouvent progressivement leur place dans le parcours de vie des personnes âgées. Derrière la gymnastique douce et la restauration à la carte se cachent des professionnels aptes à repérer les premiers symptômes de la perte d'autonomie et à accompagner les résidents jusqu'à l'entrée en Ehpad.
Résidences-services : repérer la perte d'autonomie
Mieux vaut ne pas dire à Nathalie Perraud qu'elle ne connaît pas la gérontologie. En poste depuis cinq ans aux Jardins d'Arcadie de Saint-Étienne (Loire), la directrice a signé une convention avec l'hôpital Nord de la ville, rejoint le réseau gérontologique local, formé son équipe au repérage des premiers signes de la perte d'autonomie...
Les résidences-services seraient-elles donc devenues des acteurs à part entière du parcours gérontologique ? Produit immobilier pour retraités aisés et autonomes, indépendantes de toute autorité de tarification, les résidences de la première génération sont apparues longtemps plus préoccupées par la répartition des charges de copropriété que par le parcours de vie des résidents. Les choses ont changé et la profession entend aujourd'hui tenir une place de choix dans une filière gérontologique revisitée : les Ehpad se recentrent sur les GIR 1 et 2, les logements-foyers questionnent les barrières du GIR 300 et des 10 % de GIR 1 et 2. Un espace se crée... " Nous proposons des solutions d'accueil performantes pour permettre aux personnes âgées de prolonger leur autonomie ", résume François Georges, président du SNRA (Syndicat national des résidences avec services pour aînés) et président des Jardins d'Arcadie (bientôt 40 résidences-services). Pour autant, alors que locaux lumineux et sourires éclatants ponctuent les plaquettes commerciales, quelle place existe-t-il dans les résidences-services pour le repérage, l'accompagnement de la perte d'autonomie naissante?? Voici quelques réponses.
L'accueil : la construction de repères
Les directeurs reçoivent tous les futurs résidents. Contrairement à ce qui se passe en Ehpad, l'entrée en résidence-services est un choix de la personne âgée : le lien avec le directeur est alors un critère essentiel dans la décision. " L'entretien est l'occasion de vérifier si le projet de la structure est compatible avec le projet de vie et le degré d'autonomie de la personne, explique Valérie Obadia, directrice des exploitations pour Cogedim Club. Nous demandons aussi une attestation du médecin-traitant qui précise le GIR de la personne. "
L'entretien sert aussi à appréhender le mode de vie de la personne. On y recueille les habitudes et le projet de vie. Heure du petit-déjeuner ou amour du cinéma, souci de l'élégance ou bonne humeur, l'équipe note. On peut y identifier également une personne de confiance.
La prévention :
Dans la résidence Cogedim Club Le jardin d'Aragon de Villejuif (94), on mise sur l'activité physique adaptée. Ainsi, une jeune société centrée sur les bienfaits du mouvement (Aphysia) anime des ateliers, payants pour les résidents, dans une salle spécialement dédiée à cet usage. Au programme : échauffement, exercices musculaires, motricité fine, étirement, relaxation... le tout dans un groupe de 8 personnes maximum. " C'est l'occasion à la fois d'entretenir sa forme et de détecter des problèmes, affirme Valérie Obadia. Si besoin est, notre partenaire orientera vers un bilan médical complet. "
La mise en place de services à domicile peut également jouer un rôle dans la prévention. Dans cet esprit les Jardins d'Arcadie ont créé leur propre structure. " Nous avons commencé par faire appel à des structures extérieures mais nous n'étions pas toujours maîtres des horaires de passage et il y avait trop de turn-over, explique François George. Avec notre structure propre, nous choisissons les horaires d'intervention. De plus, en offrant aux intervenants des postes à temps complet, nous les fidélisons et pouvons les former. "
L'observation : la clé d'une prise en charge individualisée
Si l'équipe est restreinte par rapport à celle d'un Ehpad, elle a l'oeil ouvert. " L'observation est fondamentale, explique la directrice stéphanoise. L'hôtesse d'accueil, l'animatrice, le personnel de la restauration sont vigilants. Pourquoi ce monsieur ne joue plus au Scrabble alors qu'il adorait cela, pourquoi cette résidente coquette se laisse-t-elle aller ? L'apparition de comportements agressifs, la baisse de la mobilité nous alerte aussi. Les auxiliaires de vie ou les aide-ménagères apportent également leur lot d'information."
La vraie question est : le signe qui a alerté peut-il être résolu (problème de vision, d'audition...) ou est-il un début de perte d'autonomie ? Dans le deuxième cas, le bilan médical va s'imposer. A noter que dans la Haute-Loire, le département a bien fait les choses : il a créé une hotline pour les professionnels. Ainsi, le médecin-traitant est mis en relation avec un gériatre qui peut l'aider à construire son diagnostic et à prendre les bonnes décisions.
La transition vers l'Ehpad : entre obligation et douceur
Le contrat signé à l'arrivée le précise : le résident devra chercher une autre solution si la dépendance s'installe. Pour autant, impliqués dans les réseaux - " Nous sommes courtisés par les Ehpad ", reconnaît une directrice de résidence-services - les équipes peuvent préparer avec sérénité la suite du parcours des personnes en perte d'autonomie, pendant trois mois, six mois...
Ainsi récemment, quand l'entrée d'un résident en Ehpad est devenue inéluctable, Nathalie Perraud et son équipe ont été attentifs : " Pour éviter l'épuisement de son épouse, nous avons contacté le Conseil général, déclenché un dossier de demande d'APA, mis en oeuvre des services à domicile sur mesure. "
Qui dira encore que les résidences-services n'ont pas leur place dans la filière ?