Santé et dépendance : distinguer l'assurance de la solidarité
La réforme des systèmes sociaux va constituer la priorité de la politique économique des pays de l'OCDE pour ces 10 prochaines années. Avec une question centrale : comment concilier réduction des déficits sociaux, équité (notamment intergénérationnelle) et renforcement de la croissance économique. Une question apparemment insoluble mais qui admet pourtant des solutions, si l'on accepte de faire précéder des mesures fortes d'une réflexion approfondie et partagée.
Ce travail a commencé à être fait sur la question des retraites. Les opinions publiques des pays occidentaux ont globalement compris (en dépit des résistances, notamment en France) que la pérennité des systèmes de pension par répartition passait forcément par un allongement de la durée de cotisations, sous une forme ou sous une autre (augmentation du nombre d'années de cotisation, report de l'âge légal de départ en retraite, report de l'âge minimum pour une pension complète, retraite à points...). En outre, les travaux de l'OCDE sont venus rappeler que ces mesures avaient plutôt pour conséquence de renforcer la croissance économique des pays qui les adoptaient.
Sur la question de la maladie (qui englobe la dépendance), ce travail a à peine débuté. Pourtant l'enjeu est de taille. En 2050, les dépenses de retraites représenteront dans les pays de l'OCDE environ 10 % du PIB. Concernant la maladie et la dépendance, certaines projections annoncent 20 % du PIB ! Il est donc plus que temps de travailler sur ces sujets, de peur que le poids de ces dépenses ne devienne insoutenable et contribue à l'insolvabilité de certains Etats (insolvabilité qui se fait déjà jour, notamment en raison du poids des dépenses sociales, en Grèce, en Irlande ou au Portugal). Une part importante de ce travail porte sur le financement, et en particulier sur la distinction de ce qui relève de l'assurance et de la solidarité. Le financement des maladies bégnines (les " maux d'hiver " par exemple) et d'une partie de la traumatologie repose sans doute sur l'assurance, qu'il s'agisse de l'assurance-maladie ou des complémentaires. Avec toutefois une implication : c'est que la tarification soit également celle de l'assurance : ceux qui refusent de se faire vacciner contre la grippe ou ceux qui font du ski doivent payer des primes supplémentaires, car ils génèrent un risque plus important que la moyenne. Le traitement des affections de longue durée (les fameuses ALD, qui représentent 60 % des dépenses de l'assurance-maladie) relèvent sans doute de la solidarité, ce qui suggère un financement par l'impôt, CSG ou pourquoi pas TVA.
Concernant la dépendance, là aussi, ce travail de réflexion doit être mené, pour dépasser les antagonismes entre ceux qui pensent que la réforme doit simplement passer par une assurance-privée obligatoire, et ceux qui pensent qu'il suffit d'ajouter une nouvelle tranche de cotisation sur les salaires. Par exemple, les cas de dépendance les plus graves pourraient voir leur financement fiscalisé, alors que les cas de dépendance soft pourraient être financés par une assurance, pourquoi pas obligatoire. Aux médecins et aux experts de tracer la ligne de séparation.