Servane Hibon ou la vie en vert
Paysagiste, Servane Hibon a créé le jardin de l'espace Jeanne Garnier, accueil de jour situé dans le 15e arrondissement de Paris. Elle réfute le terme généralement utilisé de jardin " thérapeutique ". Selon elle, ce n'est pas un lieu de soins mais un lieu d'accompagnement et de vie, un support pour organiser des activités.
Après une licence en géographie, Servane Hibon intègre l'Ecole du Paysage de Versailles. Elle effectue son mémoire sur le rôle et les vertus du jardin dans le domaine hospitalier. " Je connaissais le milieu des EHPAD par des petits boulots d'été en tant qu'auxiliaire de vie ", explique la jeune paysagiste diplômée en septembre 2010. En 3e et 4e année, Servane Hibon réalise un voyage d'études en Europe sur le thème de l'hospitalité lors duquel elle multiplie les rencontres avec des paysagistes et des médecins. " J'ai découvert que l'appréhension de la maladie n'est pas identique d'un pays à l'autre. J'ai écrit plusieurs articles à mon retour et j'ai été contacté par l'association des Dames du Calvaire qui gère la maison médicale Jeanne Garnier pour créer un jardin dans son accueil de jour dédié à des personnes atteintes par la maladie d'Alzheimer. "
Pour la jeune femme, le jardin a pour objectif de rendre l'établissement plus vivant et plus convivial. Deux priorités la guident. D'une part, la question de la limite entre l'espace public - la rue - et l'entrée de l'EHPAD ou de l'accueil de jour afin de changer le regard sur le lieu. D'autre part, la question de la circulation et du déplacement dans le jardin en vue d'accompagner au mieux les personnes.
Un lieu de plaisir, d'échanges et de vie
" Même si nous devons répondre à un cahier des charges très précis et contraignant, le jardin ne doit pas être stigmatisant et ressembler à un jardin destiné à des personnes atteintes d'Alzheimer. Le jardin doit aussi être un lieu de plaisir pour les familles et les soignants, un lieu d'échanges et de vie ", précise-t-elle. Le jardin de l'espace Jeanne Garnier crée un lien et un prolongement avec les activités prévues pour les personnes qui viennent chaque jour. " Confection de bouquets, jardinage, parcours de textures avec les pieds...on est dans la psychomotricité, le but consiste à faire bouger le corps dans l'espace et à travailler sur les sensations. Le jardin est également ouvert à l'extérieur et à l'intergénérationnel. Chaque jeudi après-midi, une classe de fin de maternelle vient jardiner avec les personnes âgées. Il y a des initiatives similaires autour de la peinture, de la construction de cabanes... ", développe Servane Hibon.
Le jardin est aussi un lieu festif. Fin juin, la Fête du jardin rassemble les personnes malades, les soignants, les familles et des enfants. Un artiste était présent cette année et prépare une création pour la rentrée suite aux activités qui ont jalonné cette journée.
Laurent Jacotey