Trois questions à Jean-Sébastien Schwertz, DG de Chemins d'Espérance
Votre Ehpad de Mauriac vient d'obtenir le feu vert du Cantal pour un tarif différencié. Pourquoi l'aviez-vous sollicité ?
Notre association a en effet signé une nouvelle convention d'aide sociale pour son Ehpad Les Vaysses. La hausse ne pourra pas être supérieure à 15 % par rapport au tarif journalier ASH de 62,84 euros (64,10 pour l'UVP) et concerne les nouveaux entrants à compter du 1er avril.
Il n'est ni le premier ni le seul. Nous avons d'ores et déjà signé six conventions de tarifs différenciés et deux autres trouveront à s'appliquer le 1er mai prochain. Pourquoi ? Parce que nécessité fait loi. Le modèle économique de nos établissements habilités à l'aide sociale est, d'année en année, plus fragile et nous cherchons à sortir - partiellement, très partiellement -, d'un mode de financement qui dépend presque exclusivement de nos autorités de contrôle et de tarification, elles-mêmes confrontées à des enjeux d'équilibre budgétaire.
Comptez-vous généraliser le tarif différencié ?
Nous gérons notamment 23 Ehpad dont 90 % de nos places sont habilitées. Nous avons été contraints de précéder la loi face à l'urgence et au péril qui pèsent sur eux. Il est impérieux, pour la pérennité de l'association, de tenter de revenir à l'équilibre mais aussi de reconstituer en partie les fonds propres de nos établissements. Soyons clair, notre souhait de départ était bien un rebasage de nos tarifs qui tienne compte de l'inflation depuis 2019. Les conseils départementaux n'ont pas donné de suite favorable, d'où notre choix d'actionner ce levier de financement. Cependant, si sur le principe, le tarif différencié peut être envisagé comme une forme de solidarité choisie entre résidents (sans stigmatisation puisque les prestations sont les mêmes), il n'en reste pas moins vrai que pour une association d'origine congréganiste comme la nôtre, le risque de polarisation n'est pas sans poser un cas de conscience.
Qu'entendez-vous par polarisation ?
Celle entre les résidents bénéficiaires de l'ASH et ceux qui peuvent payer un tarif différencié. La loi Bien vieillir et autonomie donne un cadre national mais la réflexion doit porter sur un garde-corps pour éviter les effets de bord. Je pense en particulier aux personnes âgées dont les revenus les rendent de peu inéligibles à l'ASH et qui risquent de ne plus entrer chez nous. Bien entendu, la modulation à la ressource peut être envisagée, mais elle pose des questions épineuses sur la détermination des biens et revenus à prendre en compte. Nous ne sommes pas inspecteurs des impôts ! Nous devons être vigilants sur le futur cadre réglementaire : le niveau de décision pertinent doit être celui de l'etablissement. Je souhaite que des marges de manoeuvre soient données aux gestionnaires qui sont force de proposition et ont démontré, a fortiori au cours des quatre dernières années, leur capacité d'adaptation.