Trois questions à Jérôme Voiturier, directeur général de l'Uniopss
Que pense l'Uniopss de cette amorce de réforme de financement des Ehpad de l'article 37 ?
Nous partageons le constat dressé par le rapport Pirès-Beaune sur le reste à charge : le système actuel ne fonctionne pas, ou mal, avec trois sections différenciées de financement des Ehpad et autant de politiques que de départements. La fusion des sections soins et dépendance peut s'entendre, mais elle ne réussira pas si elle se fait à moyens constants. Comme d'autres structures, les Ehpad sont exsangues.
Par ailleurs, je ne vois pas comment elle aboutira à une diminution du reste à charge, en l'absence de réforme de la section hébergement même si la porte semble ouverte au glissement de certains prestations hébergement dans la nouvelle section soins et entretien de l'autonomie...
Le passage de témoin entre départements et agences régionales de santé vous semble-t-il favorable ?
Ce passage est présenté comme un élément devant permettre de réduire les inégalités. Mais il pose à nouveau la question d'une éventuelle remise en cause des lois de décentralisation ! Recentralisation du RSA, réforme des services de soins infirmiers à domicile/aide et accompagnement à domicile, remise en cause du rôle des départements en matière de protection de l'enfance, et maintenant de dépendance avec cette fusion des sections, on pressent un mouvement ! Peut-on faire l'économie d'un débat politique en profondeur : l'État social, oui, mais sans poser l'alternative d'une politique jacobine ou girondine ? Quant aux départements, je ne suis pas sûr que l'Assemblée des départements de France, leur représentante, soit en mesure de les emmener tous sur une même ligne.
Des membres du conseil de la CNSA ont questionné le risque de médicalisation accrue des Ehpad...
Plus largement, la mesure est porteuse d'un risque de sanitarisation de la dépendance, même si le gouvernement nous assure que ce n'est pas l'objectif. Elle est à mi-chemin, on sent bien que tout n'a pas été réfléchi derrière. Faute de vraie loi autonomie, on se trouve dans une période de stop and go, avec une sorte d'accélération depuis deux ou trois mois sur certains sujets qui mériteraient un temps de réflexion plus important. Avec le sentiment qu'on a perdu un an de quinquennat. Le président de notre Union, Daniel Goldberg, l'a déclaré le 21 septembre lors de notre traditionnelle conférence de presse de rentrée sociale : « Il est temps que le quinquennat social commence ! »