Trois questions à Marc Bourquin, conseiller Stratégie de la FHF
Comment recevez-vous cette première campagne budgétaire pour 2023 ?
Elle est en total décalage avec la gravité de la situation ! Elle a été construite sur la base du taux prévisionnel de 4,2 % retenu par la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023, les effets de l'inflation ont donc d'emblée été sous-estimés - pour rappel, elle a atteint un pic à 7,3 % en février.
L'évolution des forfaits soins qu'elle fixe est insuffisante, alors que les Ehpad habilités à l'aide sociale sont déjà confrontés depuis 2022 à un effet ciseau inédit entre l'évolution des dépenses et des recettes sur les sections hébergement et dépendance. Le secteur s'alarme, on lui répond « ne vous inquiétez pas quand un établissement sera en difficulté, on enverra les pompiers » - les pompiers de l'ARS, s'entend. Mais non, c'est l'incendie qu'il faut prévenir. Et soyons clairs, en 2023 nous ne créerons pas d'emplois dans les Ehpad.
Malgré les engagements du Gouvernement ?
Les moyens prévus sont en dessous : les 52 millions alloués aux Ehpad pour le renforcement du taux d'encadrement des soignants non médicaux, via l'augmentation de la valeur du point GMPS, représentent le financement d'environ un millier de postes seulement. Les 91,4 millions supplémentaires annoncés sont en réalité liés à l'actualisation des coupes PMP/GMP et répondent au mécanisme d'ajustement avec les besoins des résidents. Ces crédits, inférieurs à 2022, ne constituent donc pas un renforcement « net » du taux d'encadrement en Ehpad mais accompagnent l'évolution du profil des personnes accueillies.
La FHF parle de pénalisation des Ehpad en tarif global, pourquoi ?
La FHF regrette vivement qu'aient été retenus des taux d'évolution du forfait soins différenciés selon que les Ehpad sont en tarif partiel ou global. C'est un signal négatif et en total décalage avec la volonté affichée par les pouvoirs publics de développer le tarif global. Les Ehpad publics, ayant majoritairement opté pour le tarif global, en seront particulièrement pénalisés. Cette différence conduit à ce que le gain du renforcement des effectifs via la valeur du point GMPS soit gagé par la sous-indexation du tarif global et de fait un renoncement aux recrutements dont ils ont besoin. Enfin, comment ne pas s'indigner de la mise en réserve prudentielle de 121?millions d'euros dans un contexte de difficultés sans précédent. La FHF en demande le dégel immédiat avec abondement à due concurrence des recettes des ESMS.
En revanche, car nous voulons aussi saluer les progrès, nous approuvons l'engagement sur le développement des Ssiad et des Centres de ressources territoriaux, car il y a là une vraie stratégie pluriannuelle.