Le PLFSS pour 2023 ne semble pas répondre aux enjeux actuels, selon la Commission des Affaires sociales du Sénat.
Un PLFSS jugé trop timide
C'est en tous cas ce qu'ont déclaré Catherine Deroche, présidente de la Commission des Affaires sociales du Sénat et Élisabeth Doineau, rapporteure générale, chargée des recettes et des équilibres généraux lors d'une rencontre organisée avec la presse ce jeudi 3 novembre.
La commission, réunie le 2 novembre, a adopté 100 amendements en vue de sa discussion en séance publique, exprimant son scepticisme face aux chiffres encourageants affichés par le Gouvernement. Elle pointe une absence totale de stratégie de redressement des comptes sociaux.
Les comptes pour l'exercice 2021 semblent en très net redressement après le déficit historique enregistré en 2020 (lié à la crise Covid et aux conséquences de l'activité partielle). Pourtant la Cour des comptes conteste vivement le mode de calcul retenu par le Gouvernement pour les cotisations sociales dues par les travailleurs indépendants. Elle considère que 5 milliards d'euros de recettes enregistrées en 2021 auraient dû l'être en 2020, ce qui modifie dans les mêmes proportions les résultats de ces deux années.
Ainsi, selon la Cour, le redressement de 2021 ne s'élève qu'à 5,5 milliards d'euros (au lieu des 15,5 annoncés). Le déficit de 2021 flirterait dès lors avec celui de 2010 considéré comme le plus élevé de l'histoire avant l'arrivée de la Covid.
Une hausse en trompe l'oeil des objectifs de dépenses pour la branche autonomie
L'objectif de dépenses de la branche autonomie pour 2023 s'élève à 37,3 milliards d'euros en augmentation de 5,3 % par rapport à l'année précédente. Les dépenses prévisionnelles pour les ESMS attendraient 30 milliards, en hausse de 6%. Mais ces hausses résultent principalement des revalorisations salariales mises en oeuvre dans le cadre du Ségur de la santé et de son extension à d'autres personnels non médicaux des ESSMS. Elisabeth Doineau et Catherine Deroche s'inquiètent des marges de manoeuvre disponibles dans les années à venir. Selon les projections, la branche autonomie retrouverait une situation excédentaire à compter de 2024 (0,9 milliard d'euros), qui diminuerait pourtant les années suivantes du fait de création de postes en Ehpad (50 000 prévues même si seules 3 000 sont programmés ce jour) et du financement des 2 h dédié au lien social des personnes âgées à domicile. Des recettes nouvelles devront être dégagées.
Reste également la question des recrutements. Bien que le Gouvernement évoque 50 000 créations de postes, mais le rapport El Khomri évalue les besoins à 93 000 postes pour les années 2022-2024 et considérait comme nécessaire de former 260 000 professionnels supplémentaires pour pourvoir les postes vacants.
Se doter des bons outils
Enfin Elisabeth Doineau et Catherine Deroche réclament un meilleur pilotage de la branche, par un renforcement conséquent du contrôle des Ehpad, la poursuite du virage domiciliaire et la mise en place de nouveaux instruments de gouvernance. Sur ce point elles attirent l'attention sur les derniers travaux de la Cour des comptes qui pointaient l'augmentation inquiétante de la sinistralité au travail dans le secteur médico-social. Là encore la prévention et une véritable politique de gestion des risques professionnels sont une nécessité.