L'Arefo Arpad est un ensemble associatif gérant 35 EHPA, 2 résidences avec services, 19 EHPAD et un service de transport de proximité "Le Cyclopousse", et qui développe des filières gérontologiques et des parcours résidentiels pour les personnes âgées. Alain Lecerf, son directeur général, nous précise ce projet, les objectifs et le cadre d'action de cet ensemble.
Un projet associatif original mais contrarié
L'ensemble associatif accomplit sa mission qui repose sur des valeurs fondamentales: l'économie sociale et solidaire, le bien être des personnes accueillies à ressources modestes, la mutualisation des moyens, l'équité. Notre activité ne s'inscrit pas dans la démarche commerciale.
L'Arefo et l'Arpad inscrivent leur activité dans ce que ses dirigeants appellent, depuis bientôt cinquante ans, le parcours résidentiel : domicile diffus, substituts de domicile (logements foyers), accueil temporaire, accueil de jour et EHPAD.
Nous ne sommes jamais propriétaires des immeubles que nous gérons : ce sont les entreprises sociales de l'habitat qui assurent cette fonction. Nous recherchons toujours des financements multiples et si possible gratuits (prêts aidés de l'Etat, CNSA, régions et départements, institutions et régimes de retraite).
Le logement foyer (EHPA) fait partie des réponses que nous considérons comme pertinentes : un habitat confortable et sécurisant pour les personnes dites à " autonomie maîtrisée " (GIR 5-6), le développement d'une offre de vie et de services de qualité, un rapprochement familial...c'est une offre qui prend encore plus son sens en 2012.
Sanitarisation ou développement d'un vrai lieu de vie ?
L'ensemble associatif gère des établissements autorisés, EHPA et EHPAD, dans des propositions diverses tandis que l'ensemble du panel des hébergements qui ne sont pas aujourd'hui soumis à autorisation peuvent se développer en toute liberté. Ceci n'est pas acceptable ; il ne peut pas y avoir deux poids, deux mesures.
Le projet de l'Arefo et de l'Arpad repose sur une volonté: reconstituer, autant que faire se peut, dans leurs établissements, un chez soi, avec son environnement, ses accompagnateurs du quotidien que sont les professionnels.
Hélas, aujourd'hui, l'originalité n'est plus de mise. Ce que nous avons mis en place, traduisant nos projets associatifs depuis des décennies, est désormais systématiquement remis en cause par des autorités de tarification. La vieillesse n'est pas une maladie. Dans notre beau pays de France, la pensée unique voudrait que dans les établissements on privilégie le " soin " et non le " prendre soin ". Le risque doit être zéro depuis cette crise de 2003 qui a emporté plus de 15 000 personnes, vivant majoritairement dans leur domicile diffus ! La réglementation se durcit et nous sommes de plain-pied dans l'expression d'une politique, en direction des vieux, essentiellement comptable et budgétaire.
Or, nous pensons, nous, que le sens que nous donnons à notre action est primordial; ce sens c'est celui de la vie et cette action dépend du regard que l'on porte sur les personnes : des personnes vieillissantes ou des malades !
Notre mission est celle de l'accompagnement des actes de la vie quotidienne de la personne accueillie dans son logement, et non d'une quelconque " prise en charge " dans une " chambre " dont il faudrait réduire la surface car tout cela coûte trop cher !
Nous avons créé une fonction de "maîtresse de maison" ayant la qualification de cadre infirmier et dont la mission est, notamment, d'assurer la coordination des équipes " auxiliaires de vie et aides soignants " car nous ne souhaitons pas voir se développer dans nos établissements des métiers plus ou moins nobles que d'autres. Le métier de soignant n'est pas plus noble qu'un autre.
Mais aujourd'hui, alors que cette fonction émargeait depuis l'origine à la fois sur l'hébergement et le soin, les départements, pour des raisons financières, sur nos établissements habilités à l'aide sociale, ne veulent plus intégrer dans les prix de journée le coût de cette fonction " maîtresse de maison " et demandent aux ARS de l'intégrer dans le budget soins.
Cela va à l'encontre de notre projet et accroît l'uniformisation des organisations sur le territoire. Nous attendons une vraie réforme de la tarification avec un rééquilibrage entre les trois secteurs de cette tarification. Nous appelons de nos voeux la création d'un 5ème risque.
Remise en cause du secteur associatif
Le secteur associatif est mis à mal depuis quelques années; sa spécificité est remise en cause; elle est jalousée. Nous avons, par exemple, depuis la création de nos premiers EHPAD, souhaité obtenir l'habilitation totale à l'aide sociale départementale pour les personnes que nous accueillons. Mais les départements voient leurs budgets sociaux exsangues et recherchent des économies. Cela conduit à remettre en cause la poursuite de nos choix fondamentaux reposant sur l'accueil et l'aide aux personnes aux capacités contributives réduites.
L'autre problématique du secteur associatif et de ses associations est son éparpillement : beaucoup de structures sont, à ce jour, mono établissement, ce qui devient de plus en plus difficile à tenir aujourd'hui : il faut nécessairement envisager des regroupements afin de rendre plus fort le tissu associatif.
Il ne se passe pas une semaine sans que nous ne soyons interpellés sur ce sujet. Pour autant, nous avons à faire face à une relative difficulté pour finaliser ces regroupements, même si notre sensibilité est proche. Le secteur social et médicosocial associatif doit se réveiller, s'organiser, parler d'une même voix, favoriser la mobilisation, avancer des propositions fortes dans une démarche humaniste. Notre action doit être visible, lisible et séduisante pour être repérée et entendue comme innovante par les pouvoirs publics.
Au-delà de l'engagement très ferme du nouveau Président de la République, et à l'heure où les actions de proximité revêtent une importance toute particulière, ce dernier vient de nous confirmer dans une lettre " qu'il a une profonde conviction que les acteurs du monde associatif jouent un rôle irremplaçable et apportent une précieuse contribution à notre lien social ". Nous en sommes convaincus et nous l'affirmons haut et fort.*
Propos recueillis par Patrice LEFRANCOIS.
* L'Arefo et l'Arpad viennent de publier leur histoire " La Force d'une Conviction "