L'instruction budgétaire 2023 sous-estime les effets de l'inflation et ne donne pas les moyens aux établissements et services médico-sociaux de fonctionner, ni a fortiori de recruter.
Une campagne budgétaire 2023 à côté de la plaque
Quelques mesures sont certes saluées, mais l'ensemble du secteur des Ehpad, tous statuts confondus, a tiré à boulets rouges sur l'instruction du 15 mai relative aux orientations de la campagne budgétaire des établissements et services médico-sociaux (ESMS) pour 2023 : « pas de réponse à la hauteur des difficultés budgétaires des Ehpad publics » (FHF) ; « un décalage criant entre les ambitions affichées et les besoins réels des établissements et services sur le terrain » (Fehap) ; « loin des efforts financiers structurels attendus par le secteur dans un contexte de hausse des coûts généralisée » (SYNERPA)... Bref, elle est à côté de la plaque, résume un directeur d'Ehpad : selon une enquête de la Fnadepa publiée début juin, 64,8 % des établissements et services étaient déficitaires fin 2022, pour un montant moyen de 143 325 euros par structure... Et les faits sont têtus : un récapitulatif de l'agence régionale de santé (ARS) d'Île-de-France affiche un taux d'occupation moyen de 85 % pour l'ensemble des 707 Ehpad franciliens au premier trimestre 2023 - il plonge même sous la barre des 80 % pour les Ehpad hospitaliers de trois départements !
Objectif global des dépenses
La campagne 2023 repose, en construction, sur un taux de progression de 5,13 % de l'objectif global de dépenses (OGD) : +?5,04 % pour les ESMS accueillant des personnes âgées (PA) et +?5,22 % pour les ESMS accueillant des personnes en situation de handicap (PH). L'instruction précise que la contribution du secteur au mécanisme de mise en réserve prudentielle, destiné à garantir l'exécution de l'Ondam, est fixée à 121?millions d'euros pour 2023 - en pleines difficultés financières, elle diminue d'autant les moyens alloués aux ESMS, s'indigne le secteur.
Mesures de revalorisations salariales et d'actualisation
Près de 143?millions d'euros sont délégués aux ARS afin de compenser diverses mesures de revalorisations salariales post Ségur issues de la conférence des métiers du 18 février 2022 : 104,30?millions pour la hausse de salaire des personnels de la filière socio-éducative des établissements du secteur du handicap, 11,8?millions pour la prime de 517?euros nets mensuels pour les médecins coordonnateurs et les médecins salariés exerçant en ESMS. S'y ajoute le financement des mesures issues du Ségur 2 et de l'axe 3 du Ségur.
Taux d'évolution de la masse salariale et effet prix
Le taux d'évolution global des moyens alloués aux ESMS est porté à +?2,06 % pour le secteur PA et +?2,53 % pour le secteur PH. Il intègre 214?millions d'euros pour tenir compte « de l'évolution tendancielle du coût de la vie et du contexte d'inflation exceptionnelle ». Ces taux permettent par ailleurs de couvrir l'évolution de la masse salariale à hauteur de 1,80 % sur le secteur PA et 1,97 % sur le secteur PH, afin de tenir compte notamment de la revalorisation du point d'indice au 1er?juillet 2022.
Le taux d'évolution global des moyens alloués aux ESMS intègre la revalorisation du point d'indice mais également 214?millions d'euros pour tenir compte « de l'évolution tendancielle du coût de la vie et du contexte d'inflation exceptionnelle ». Comme lors de la seconde phase de campagne budgétaire pour 2022, l'effet prix exceptionnel et la hausse de la valeur du point d'indice dans la fonction publique seront financés pour les Ehpad en tarif global comme en tarif partiel par une augmentation de la valeur du point GMPS. L'actualisation des valeurs de point GMPS intègre également des crédits dédiés au renforcement du taux d'encadrement (52 millions). Le détail de l'actualisation des nouvelles valeurs de point GMPS est précisé dans l'annexe?1.
Les Ehpad en tarif global ne bénéficient pas d'actualisation de leur forfait soins pour l'effet masse salariale (GVT) ni pour l'effet prix exceptionnel : sur la base de l'actualisation des valeurs de point GMPS par arrêté ministériel (publié le 14?juin, ndlr), l'instruction prévoit un taux d'évolution des moyens différencié pour les Ehpad en tarif partiel ou en tarif global.
Les priorités d'actions
L'instruction rappelle que trois mesures nouvelles ont été inscrites dans l'OGD 2023 avec pour objectif de renforcer l'accompagnement des personnes âgées à domicile : 45?millions d'euros seront alloués pour la réforme tarifaire des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) et 400?millions pour favoriser la création de 25 000?places de Ssiad d'ici 2030 ; 200?millions devront permettre la création de 500?centres de ressources territoriaux (CRT) d'ici 2030 dont 40?millions dès cette année. Ces crédits pérenniseront les 23?dispositifs renforcés d'accompagnement à domicile (Drad) actuellement expérimentés dans le cadre de « l'article 51 » ; enfin une enveloppe de 20?millions est allouée pour améliorer la couverture du territoire en pôles d'activités et de soins adaptés. Des mesures bien accueillies, elles.