Entre réglementation et attentes des personnes âgées ou vieillissantes, l'offre d'hébergement cherche un juste équilibre. Les logements-foyers attendent une volonté publique, les EHPAD se spécialisent sur la grande dépendance. Dans ce contexte, les résidences-services marquent clairement des points.
Une offre en plein devenir
Il y a encore quelque temps, les rôles semblaient sur le papier bien distribués entre EHPAD et logements-foyers. Les premiers, selon leur projet d'établissement, pouvaient accueillir une population variée : personnes autonomes (conjoint de personnes dépendantes ou pas) légèrement dépendantes, très dépendantes, ou uniquement des personnes désorientées. Les seconds accueillaient les personnes en légère perte d'autonomie (GIR 3 ou 4) et vivant en ville. Parallèlement les USLD occupaient le terrain du soin lourd et les MARPA le territoire rural.
Au fil du temps, le paysage a changé. Il s'est ouvert à de multiples initiatives, du village senior à la cohabitation intergénérationnelle. Les logements-foyers se sont raréfiés du fait de la vague de médicalisation et le public comme les pouvoirs publics les sont oubliés. Aujourd'hui, face à des EHPAD qui ont vu augmenter à la fois l'âge moyen et la dépendance des résidents, le logement-foyer, avec sa taille humaine et sa situation en zone urbaine, apparaît comme un maillon fort du parcours de vie. Leur situation est pourtant compliquée. Les logements-foyers :
- ont un positionnement peu clair pour le public et souffrent d'une image peu attractive, celle d'établissements accueillant une population aux moyens faibles.
- sont soumis à trois réglementations : le Code de la consommation (CCC), le Code de l'Action sociale et des Familles (CASF) et le Code de la construction et de l'habitation (CCH). Un locataire devrait donc signer deux contrats : contrat de séjour et un contrat d'occupation pour répondre aux exigences respectives du CASF et du CCC, avec des contradictions. S'ajoute à cela l'éventuel conventionnement APL, par lequel qui on relève aussitôt du CCC. A noter que la DGCS travaille à définir un contrat unique.
- connaissent une grande diversité de fonctionnement : certains établissements disposent encore d'un forfait soins (selon leur choix lors de la réforme de 2007), d'autres négocient des forfaits dépendance avec le conseil général de leur département.
- souffrent d'une architecture mal adaptée?: isolation thermique inexistante, présence de baignoires, absence d'ascenseur excluent les personnes handicapées ou à un couple dont un des conjoints est en perte d'autonomie. D'autres enfin n'ont pas les moyens pour appliquer les normes incendie... Mais comment investir ? Ainsi les Plans d'aide à l'investissement (PAI) de la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie) ne sont pas accessibles aux logements-foyers. Les prêts à taux zéro, s'ils sont utiles, n'ont pas d'impact sur le reste à payer du résident, contrairement aux PAI.
A noter que les moyens de fonctionnement sont tout aussi réduits. Le Forfait Autonomie, destiné à financer ergothérapeutes ou activités d'animation, ne voit pour l'heure le jour que sous une forme expérimentale et avec un financement la CNAV (Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse) et non de l'Assurance Maladie. Un fait regrettable pour un outil qui pourrait alors répondre en tout point au triple A (anticipation - adaptation - accompagnement) cher à Mme Michèle Delaunay. La DGCS (Direction générale de la cohésion sociale) annonce un cahier des charges pour 2013, positionné davantage comme un guide de bonnes pratiques que comme un instrument réglementaire. Toutefois, sans financement complémentaire, les logements-foyers ne sortiront pas d'un mal-être qui pénalise les locataires. " Le produit foyer-logement a été en son temps une réponse innovante. Il le redeviendra, avec l'aide de la puissance publique, déclarait en substance Claudy Jarry, président de la FNADEPA (Fédération Nationale des Associations de directeurs d'établissements et services pour personnes âgées), lors d'un colloque consacré aux logements-foyers reste donc à inventer. En attendant, comme aime à dire Didier Sapy, directeur FNAQPA (Fédération Nationale Avenir et Qualité de Vie des Personnes Âgées) : " Les foyers-logements demeurent le seul domicile où l'on ne peut pas devenir dépendant ! ", sous peine d'être orienté vers d'autres structures.
Un besoin non satisfait existe donc et les résidences-services l'ont compris. Elles accueillent les personnes âgées, indépendamment de leur autonomie. Neuves, disposant d'une architecture adaptée, elles proposent logements et services à la carte... et des tarifs plus élevés dans la grande majorité des cas que ceux des logements-foyers (en attendant l'émergence des résidences-services "sociales").
Attention toutefois?: les résidences-services ne sont pas des établissements mais une offre de logement adapté et doivent veiller à ne pas élargir trop leur offre de services (repas, services à domicile, services infirmiers...). Cela pourrait entraîner une requalification. La résidence-services relèverait alors du CASF et de la loi de 2002 - et de ses contraintes - comme les EHPA et EHPAD.
La situation est-elle plus claire pour les EHPAD ? Pas sûr. Leur marge de manoeuvre semble se réduire : les ARS les incitent à réserver leurs places aux personnes de GIR 1 et 2. Ce qui change la donne... Accueillir, à chaque fois qu'une place se libère, une personne très dépendante revient à :
- augmenter le GMPS de l'établissement. A moyen égal, l'EHPAD doit assurer pour un nombre de résidents croissant une prestation gourmande en temps et qualification.
- diminuer la durée de séjour des résidents. Le taux d'occupation va donc connaître des variations plus fréquentes. Et le directeur consacrer davantage de temps à l'accueil des familles, la promotion de son établissement...
- exposer les équipes à des décès plus fréquents. Le secteur qui souffre d'un manque d'attractivité devra faire un effort supplémentaire pour préserver ses équipes de l'épuisement et les fidéliser.
Il reste donc beaucoup à faire pour que la palette de solutions soit à la fois adaptée à la demande et viable sur les plans économique et humain.