Alors que presque cinquante ans nous séparent du célèbre Rapport Laroque de 1962, décideurs, citoyens ordinaires et personnes vieillissantes et âgées elles-mêmes continuent de penser le vieillissement et leur propre vieillesse en termes de problèmes et de risques. Nul doute que, comme l'enfance, la vieillesse et, plus particulièrement, la très grande vieillesse soient des périodes de vulnérabilité, de fragilité et de dépendance à autrui plus radicales. Pourtant, bien que réels, la solitude, le handicap et la maladie ne constituent pas des indicateurs fiables pour décrire les "vieux" en 2011. Réduire la longue période de vie qui s'étend désormais après la cessation progressive d'activité à une inévitable dégradation physique, psychologique et sociale relève donc de l'erreur.
En prenant le titre de Vieillesses ordinaires, ce numéro donne à lire l'hétérogénéité et la superposition des modes de vie, des états de santé, des situations personnelles, des attentes, des besoins, des réalisations, des projets de "vieillesses qui vont bien" et qui dénoncent par avance toute tentative de généralisation. Alors que l'espérance de vie n'a jamais été aussi importante, le paradoxe de nos sociétés est de rajeunir sans cesse l'âge auquel on devient vieux en le liant trop étroitement à l'activité productive. Or, s'il y a une caractéristique commune à toutes les vieillesses ordinaires c'est bien la prise de nouveaux rôles sociaux et le fait de vivre autrement l'ensemble des liens qui nous unissent les uns aux autres.
De la création d'activité à l'engagement associatif et à l'empowerment en passant par les pratiques des nouvelles technologies, les activités de loisirs, les "vieux" sont présents et actifs. Ce numéro rappelle le décalage qu'il y a entre les pratiques de vie quotidienne, les représentations sociales et les politiques publiques de la vieillesse, un décalage qu'il est urgent de rattraper et de combler.
Gérontologie et société n° 138
Prix du numéro : 26,50 euros - ISSN 0151-0193
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