Vulnérables et capables
Fêter une ou un centenaire dans un établissement n'est plus une exception. Tant mieux. Pour autant, doit-on ne voir de cet âge, si souvent associé à une certaine déchéance, que cette facette festive et considérée comme une performance, accompagnée le plus souvent par les autorités et les médias locaux ? Il est d'autres réflexions qu'il faut considérer. Anne-Solen Kerdraon (théologienne à l'Institut catholique de Paris), dont le nom ne vous vient pas spontanément à l'esprit, évoque lors d'un échange (avec Clotilde Hamon, journaliste pour Famille chrétienne) cette séquence de la vie dont le philosophe Paul Ricoeur soulignait déjà ces deux particularités humaines : vulnérable et capable.
Être vulnérable et pour autant se sentir capable sont deux choses radicalement différentes et si fortes quand elles s'enrichissent. En évoquant récemment le « droit de visite » développé dans le rapport Frémont , ainsi qu'en insistant sur la dénutrition, véritable fléau silencieux, je traduisais modestement des éléments concrets de cette réflexion. Certains aujourd'hui peuvent penser que le monde est né à leur naissance... Qui se souvient de l'organisation du « Dimanche Savoureux » construit autour des cinq sens, pensé et élaboré par Michel Daureil et Annie de Vivie et auquel j'ai pu contribuer avec fierté. C'était précurseur de tout ce que nous entendons actuellement. Lorsque la vulnérabilité s'est installée, il faut écouter le coeur, être attentif à d'autres signes, le regard, un sourire, une main qui en serre une autre. C'est l'enjeu dès lors de maintenir la vie, autrement, différemment. Mais si richement. Et d'éviter ce gouffre qu'est l'impression de ne « servir à rien ». En ces temps plus que compliqués, espérons avoir le temps de cette humanité.